Page:Dickens - Dombey et fils, 1881, tome 2.djvu/167

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

gnements de Mme Miff sont conformes à ceux de M. Sownds, homme d’église, respectable et orthodoxe dans sa foi, mais gras comme un moine, et grand amateur du beau sexe : aussi fait-il la remarque d’un air de componction que c’est une fameuse gaillarde… L’expression parait un peu forte à Mme Miff, ou du moins elle lui paraîtrait un peu forte dans la bouche de tout autre que M. Sownds le bedeau.

Chez M. Dombey, à la même heure, il y a grand remue-ménage. Les femmes surtout se trémoussent : depuis quatre heures, il n’en est pas une qui ait fermé l’œil, et toutes étaient habillées avant six heures. Towlinson est, de la part de la bonne, l’objet d’une plus grande considération que d’habitude : au déjeuner, la cuisinière dit qu’un mariage en fait faire d’autres. La bonne ne croit pas cela : les proverbes sont bien trompeurs. M. Towlinson ne dit ni oui ni non : il est mélancolique parce qu’il sait qu’on vient de retenir un étranger qui porte des favoris (Towlinson n’en a pas) pour accompagner l’heureux couple à Paris : en ce moment, il est en train de charger la voiture neuve. À propos de ce personnage, Towlinson déclare que les étrangers n’ont jamais porté bonheur, et se défend du reproche d’avoir des préjugés, en poussant l’argument suivant : voyez plutôt Bonaparte tout le premier, de quoi n’était-il pas capable ! La bonne trouve que l’observation est très-juste.

Le pâtissier est dans son coup de feu au milieu de la chambre funèbre de Brook-street, et les jeunes laquais sont aussi très-occupés… à regarder. Un de ces grands gaillards commence déjà à sentir le Xérès, et ses yeux ont une tendance à rester fixés sur les objets sans les voir. Le grand gaillard a la conscience de son état, et dit à son camarade que ce n’est rien : cela tient à ce qu’il est un peu en guinguette ; mais la langue lui a tourné : il voulait dire : en goguette.

Les sonneurs de clochettes ont eu vent du mariage ainsi que les chapeaux chinois et les cymbales auxquelles se sont joints des musiciens ambulants. Les premiers appartiennent à un orchestre de guinguette, près de Battle-Bridge ; les seconds sont entrés en rapport, par l’entremise de leur chef, avec Towlinson auquel ils demandent de l’argent pour ne pas venir ; enfin les musiciens ambulants rôdent au coin de la rue, et par l’organe d’un rusé trombone, ils s’adressent à un marchand et lui promettent une récompense, s’il veut bien leur révéler le