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Page:Dickens - Dombey et fils, 1881, tome 2.djvu/72

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mots qu’elle avait cru lire à travers son étrange sourire, sans être bien sûre qu’il les eût prononcés. Enfin elle répond d’une voix faible qu’elle lui est très-obligée, mais qu’elle n’écrira pas, qu’elle n’a rien à dire.

« Ni rien à envoyer, mademoiselle ? dit l’homme aux dents.

— Rien, dit Florence, si ce n’est ma plus tendre affection, s’il vous plaît. »

Florence, dans son trouble, leva un regard suppliant et plein d’expression sur M. Carker. Ce regard semblait dire, et M. Carker le comprit bien : Une commission de ma part serait déplacée, épargnez-moi, je vous prie. M. Carker sourit et s’inclina ; puis, chargé par M. Barnet de présenter à M. Dombey, de sa part et de celle de Mme Barnet, leurs sincères compliments, il prit congé de la société et s’éloigna, laissant une impression favorable à ce digne couple. Florence, en le voyant s’éloigner, frissonna encore, et M. Barnet, fidèle à la tradition populaire, supposa que quelqu’un apparemment passait en ce moment sur le tombeau futur de la jeune fille. Justement, M. Carker tournait le coin de la rue ; il jeta un dernier regard, s’inclina et disparut, comme s’il courait droit au cimetière pour justifier le pressentiment superstitieux de M. Barnet.



CHAPITRE IV.

Étranges nouvelles de l’oncle Sol.


Le capitaine Cuttle, qui n’était pourtant pas dormeur, ne sortit pas de très-grand matin le lendemain du jour où il avait vu Sol Gills à travers les vitres de la boutique, écrivant dans la salle à manger, avec l’aspirant de marine sur le comptoir, et Robin le rémouleur prêt à se coucher dessous. Les horloges sonnaient six heures, lorsque le capitaine se leva sur son coude et fit l’inspection de sa petite chambre. Les yeux du capitaine devaient avoir une fameuse besogne, s’il les ouvrait tous les jours comme il les ouvrit ce matin-là ; et ils étaient bien rudement récompensés de leur vigilance, s’il les frottait à moitié aussi durement qu’il les frotta ce jour-là. Mais il faut dire aussi que les circonstances n’étaient pas or-