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Page:Dickens - L’Abîme, 1918.djvu/107

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ments ascensionnels se succédaient, mais plus lentement, à mesure que les minutes s’écoulaient. En même temps, sur la tête de Madame Dor, la gaze noire se balançait, tombait en avant, revenait en arrière. Un paquet de bas s’échappa des genoux de la bonne dame et demeura sur le parquet ; un énorme peloton de laine suivit les bas et s’en alla rouler sur la table. La coiffure de gaze entra de nouveau en danse. Un son étrange, qui ressemblait un peu au miaulement d’un gros chat, un peu au cri d’une planche de bois tendre qu’on rabote, s’éleva au-dessus des chuchotements de nos deux amoureux. C’est que la nature et Madame Dor s’étaient entendues ensemble pour le plus grand bonheur de Vendale ; la vieille Suissesse, la meilleure des femmes, dormait.

Marguerite se leva pour l’arracher aux douceurs de ce repos d’occasion. Vendale retint la jeune fille par le bras et la repoussa doucement vers sa chaise.

— Ne la dérangez pas, — murmura-t-il. — J’ai longtemps attendu le moment de vous dire un secret. Laissez-moi parler enfin.

Marguerite reprit sa place, elle essaya de reprendre son aiguille, mais ses yeux étaient couverts d’un voile et sa main tremblait.

— Nous rappelions, tout à l’heure, — dit Vendale, — cet heureux temps où nous nous sommes rencontrés et où, pour la première fois, nous avons voyagé ensemble. Oh ! j’ai un aveu à vous faire, Marguerite, je vous ai caché quelque chose. Lorsque plus tard je vous parlai de ce premier voyage, je vous fis part de toutes les impressions que j’avais rapportées en