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Page:Dickens - L’Abîme, 1918.djvu/153

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de rire d’un rêve que l’on n’a point fait… Où est votre bougie ?

— Consumée.

— J’en ai une tout entière dans ma chambre. Faut il aller la chercher ?

— Mais oui, je le veux bien.

La chambre d’Obenreizer était voisine de celle de Vendale. Il ne s’absenta qu’un moment, et revint avec la bougie à la main. Son premier soin fut de se mettre à genoux devant l’âtre et de souffler de tous ses poumons sur les charbons presque éteints. Vendale, qui le regardait, vit que ses lèvres étaient blêmes.

— Oui, — dit Obenreizer en se relevant, — c’était un mauvais rêve. Vous devez voir sur mon visage l’impression qu’il m’a laissée.

Ses pieds étaient nus, sa chemise de flanelle ouverte sur sa poitrine, ses manches relevées jusqu’au coude. Il n’avait d’autre vêtement qu’un caleçon trop juste pour lui. Son corps, serré dans cette gaine, avait un air de souplesse sauvage. Si ses lèvres étaient pâles, ses yeux brillaient d’un feu étrange.

— S’il y avait eu ici quelque lutte à soutenir avec un voleur, ainsi que me le disait mon rêve, — fit-il, — vous voyez que j’étais tout prêt.

— Et même armé, — dit Vendale, en lui indiquant du doigt sa ceinture.

— Un poignard de voyage que j’emporte toujours en route avec moi, — répliqua le Suisse d’un air insouciant en tirant à moitié le poignard de son fourreau. — Est-ce que vous n’avez pas aussi sur vous de quoi vous défendre ?