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Page:Dickens - L’Abîme, 1918.djvu/167

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Il y avait là une prodigieuse agglomération de neige ; d’énormes fantômes blancs se balançaient au-dessus du pont, les rochers formaient des saillies effrayantes, et nos voyageurs se frayaient le passage comme à travers les lourdes nuées d’un ciel d’orage. Obenreizer se servait de son bâton avec une adresse extrême, sondant le terrain à mesure qu’il avançait, regardant sans cesse en l’air, et le dos tendu comme s’il se garait de la seule idée d’une avalanche. Il marchait avec une grande lenteur, Vendale le suivait de près, et ils avaient déjà parcouru la moitié de ce chemin périlleux, quand ils éprouvèrent une secousse violente aussitôt suivie d’un coup de tonnerre.

Obenreizer se retourna, mit la main sur la bouche de Vendale, et lui montra le sentier qu’ils venaient de traverser. Il n’y en avait plus de trace. L’avalanche avait tout recouvert et roulait vers le torrent, au fond de l’abîme.

Leur apparition à l’Auberge isolée, située non loin de ce lieu redoutable, arracha des exclamations de surprise aux gens de la maison.

— Bon ! — s’écria Obenreizer, — nous ne sommes ici que pour nous reposer.

Il secouait en même temps devant le feu ses habits.

— Monsieur que voici a des raisons puissantes pour traverser la passe au plus vite. Dites-le-leur donc, Vendale, dites-le-leur vous-même.

— En effet, j’ai un motif des plus pressants, — fit Vendale. — Il faut que je traverse la passe.

— Vous entendez, vous tous. Mon ami a un motif des plus pressants, et nous n’avons besoin ni d’avis