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Page:Dickens - Les Grandes Espérances, Hachette, 1896, tome 2.djvu/261

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savoir pour régler la latitude de sa défense, tout, même ce qui concerne l’enfance ; supposez qu’à la même époque le conseil ait eu mission de trouver un enfant qu’une dame riche et excentrique voulait adopter et élever…

— Je vous suis, monsieur.

— Supposez que le conseil vécût dans une atmosphère de mal et que tous les enfants qu’il voyait étaient destinés, en grand nombre, à une perte certaine… Supposez qu’il voyait souvent des enfants jugés solennellement par une cour criminelle où il fallait les soulever pour qu’on les aperçût… Supposez qu’il en vît habituellement un grand nombre emprisonnés, fouettés, transportés, négligés, repoussés, ayant toutes les qualités requises par le bourreau, et grandissant pour la potence… Supposez qu’il avait raison de regarder presque tous les enfants qu’il voyait dans sa vie d’affaires comme autant de frai qui devait éclore en poissons destinés à venir dans ses filets pour être poursuivis et défendus : parjures, orphelins, endiablés d’une manière ou d’une autre…

— Je vous écoute, monsieur.

— Supposez, Pip, que dans le nombre il y avait une jolie petite fille qu’on pouvait sauver, que son père croyait morte et pour laquelle il n’osait faire aucune démarche, et à la mère de laquelle le conseil légal avait le droit de dire : « Je sais ce que vous avez fait et comment vous l’avez fait ; vous êtes arrivée de telle ou telle manière ; voilà comment vous avez attaqué, voilà comment on s’est défendu. Vous avez été çà et là. Vous avez fait telle et telle chose pour détourner les soupçons. Je vous ai suivie à la piste partout, et je puis le dire à vous et à tous, séparez-vous de l’enfant, à moins qu’il ne soit nécessaire de la pro-