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Page:Dickens - Les Grandes Espérances, Hachette, 1896, tome 2.djvu/284

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éprouvé, lorsqu’il a entendu dire que ton oncle Provis avait probablement traîné le fer que le vieil Orlick avait ramassé, limé en deux dans ces marais, il y a tant d’années, et qu’il a gardé jusqu’au jour où il s’en est servi pour assommer ta sœur comme un bœuf, et comme il entend t’assommer… Hein !… quand il a entendu cela… Hein ?… »

Dans sa sauvage raillerie, il approcha la chandelle si près de moi, que je tournai la tête de côté pour me garantir de la flamme.

« Ah ! s’écria-t-il en riant, après avoir recommencé cette cruelle plaisanterie, les enfants brûlés craignent le feu. Le vieil Orlick a su que tu avais été brûlé. Le vieil Orlick a appris que tu voulais faire partir ton oncle Provis en contrebande, et le vieil Orlick, qui est un second toi-même, a su que tu viendrais ce soir ! Maintenant je vais te dire quelque chose de plus, loup ! et ce sera tout. Il y a des gens qui ont été pour ton oncle Provis ce que le vieil Orlick a été pour toi. Qu’ils prennent donc garde à eux, quand il aura perdu son neveu, quand personne ne pourra trouver une seule loque des vêtements de son cher parent, ni un seul os de son corps ! Il y en a qui ne veulent pas et ne peuvent pas souffrir que Magwitch — oui, je sais son nom — vive sur la même terre qu’eux, et qui l’ont connu quand il vivait dans un autre pays, qu’il ne devait pas et ne pouvait pas quitter à leur insu sans les mettre en danger. Peut-être ce sont eux qui écrivent cinquante écritures. Ce n’est pas comme ton faquin d’individu, qui n’en écrit qu’une ! Oui, nous connaissons Compeyson, Magwitch et les galères ! »

Il approcha encore une fois la chandelle sur moi, enfuma mon visage et mes cheveux, et, pendant un instant, m’aveugla ; puis il me tourna son large dos, et