Page:Dickens - Les Grandes Espérances, Hachette, 1896, tome 2.djvu/310

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passé, arrivait à toute vapeur ; mais lorsque les deux steamers virent que la galiote était décidément arrêtée, ils s’éloignèrent de nous, et nous nous balançâmes dans leur sillage agité. On continua à chercher sur l’eau longtemps après que tout fut devenu calme et que les deux steamers eurent disparu ; mais chacun savait que c’était inutile, et qu’il n’y avait plus aucun espoir à conserver.

À la fin nous cessâmes nos recherches et nous gagnâmes le rivage à la hauteur de la taverne que nous avions quittée, et où l’on nous reçut avec assez de surprise. Là il me fut possible de procurer quelques soins à Magwitch (ce n’était plus Provis), qui avait reçu de très-fortes contusions sur la poitrine et une profonde blessure à la tête.

Il me dit qu’il croyait avoir passé sous la quille du steamer et s’être heurté la tête en remontant. Quand aux coups à la poitrine, qui rendaient sa respiration extrêmement pénible, il croyait les avoir reçus contre le bord de la galiote. Il ajouta qu’il ne prétendait pas dire ce qu’il pouvait avoir fait ou ne pas avoir fait à Compeyson, mais qu’au moment où il avait posé la main sur son manteau pour le reconnaître, ce coquin s’était reculé, et qu’ils étaient tombés tous les deux dans l’eau, quand l’homme qui l’avait arrêté, lui Magwitch, en le saisissant en dehors du bateau pour l’empêcher de se sauver, l’avait fait chavirer. Il me dit tout bas qu’ils étaient tombés en se serrant furieusement dans les bras l’un de l’autre, et qu’il y avait eu lutte sous l’eau, et qu’il était parvenu à se dégager, était remonté sur l’eau, et avait nagé jusqu’au moment où nous l’avions rattrapé.

Je n’eus jamais la moindre raison de douter de l’exacte vérité de ce qu’il me disait, l’officier qui diri-