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Page:Dickens - Magasin d Antiquités, trad Des Essarts, Hachette, 1876, tome 1.djvu/233

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« Et le vieux monsieur aussi, dit mistress Jarley, car j’ai besoin de m’entendre avec lui. Maître, voudriez-vous d’une bonne position pour votre petite-fille ? Si cela vous est agréable, je puis la mettre à même d’en trouver une. Qu’est-ce que vous dites de çà ?

— Je ne puis la quitter, répondit le vieillard. Nous ne pouvons nous séparer. Que deviendrais-je, sans elle ?

— J’aurais cru que vous étiez en âge de prendre soin de vous-même, maintenant ou jamais, dit aigrement la dame.

— Il ne le peut plus, dit tout bas l’enfant ; je crains qu’il ne le puisse plus jamais… Je vous en prie, ne lui parlez pas durement. »

Puis elle ajouta à haute voix :

« Nous vous sommes très-reconnaissants ; mais nous ne nous séparerions pas l’un de l’autre, quand on nous donnerait à nous partager toutes les richesses du monde. »

L’accueil fait à sa proposition déconcerta un peu Mme Jarley. Le vieillard avait pris tendrement la main de Nelly et la tenait dans les siennes. Mme Jarley le regarda d’un air qui signifiait qu’elle se fût parfaitement passée de sa compagnie et qu’elle se souciait même très-peu de son existence. Après une pause pénible pour tous, elle mit encore une fois sa tête à la fenêtre et eut avec Georges une conférence sur un point pour lequel ils parurent moins facilement s’entendre que pour le premier ; mais ils finirent par tomber d’accord, et Mme Jarley s’adressa de nouveau en ces termes au vieillard :

« Si vous êtes réellement disposé à travailler, on trouverait aisément à vous employer à épousseter les figures, à recevoir les contre-marques, et ainsi de suite. Ce que je demande à votre petite-fille, c’est de montrer les figures au public ; elle ne tardera pas à les connaître. Elle a des manières qui ne seront pas désagréables, bien qu’elle ait le désavantage de venir après moi ; car j’ai toujours conduit moi-même les visiteurs, et je continuerais de le faire si mes faiblesses d’estomac ne m’obligeaient à prendre un peu de repos qui m’est absolument nécessaire. Ce n’est pas là une proposition ordinaire, soyez-en persuadé, ajouta la dame, prenant le ton élevé et le geste dont elle se servait habituellement vis-à-vis du public ; il s’agit des figures de cire de Jarley, n’oubliez pas cela. La besogne est d’ailleurs très-facile et même agréable ; la compagnie choisie ; l’exposition a lieu