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Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, II.djvu/1003

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& ne le vouloir pas écouter long-temps. Loquentem aliquem occupare, interpellare. On dit aussi : je reviens tout court ; pour dire, je ne m’arrêterai point au lieu où je vais. Il tourna court sur l’Infanterie. Ablanc. Statim, repente. Quand nous disons en France, le Roi, tout court, nous entendons parler du Roi qui regne. Vaug. Nouv. Rem. On dit aussi, Monsieur, tout court, sans ajoûter de nom ni de qualité, comme quand on parle du Frère du Roi, ou du Maître de la maison. Nullo adjecto vocabulo.

Court se dit proverbialement en ces phrases. Les plus courtes folies sont les meilleures ; pour dire, que c’est une sagesse de se retirer d’une mauvaise affaire où l’on s’est engagé. On dit aussi : savoir le court & le long d’une affaire ; pour dire, en avoir découvert toutes les particularités. On dit aussi d’un homme qui est peu dévot, qu’il fait courte Messe & long dîner. On dit aussi d’un homme qui n’a pas assez de force pour achever une affaire, une entreprise, que son épée est courte pour y atteindre ; qu’il a les bras trop courts, qu’il s’est trouvé trop court d’un point. On dit aussi d’un homme a donné à ses plaisirs, qu’il veut mener bonne vie & courte. On dit aussi, tirer au court-bâton, tirer à la courte-paille. Voyez plus bas ce que c’est. On dit d’un homme qui n’a pas réussi en quelque négociation, qu’il s’en est retourné avec sa courte honte. On dit aussi qu’un homme a été pendu haut & court ; pour dire, que son procès lui a été bientôt fait, qu’on l’a pendu au premier arbre, ainsi qu’on fait à l’armée. On dit encore, à vaillant homme courte épée. On dit d’un homme adroit & industrieux, que l’herbe sera bien courte, s’il ne trouve à brouter ; pour dire, qu’il trouvera à vivre partout.

COURTAGE. s. m. profession de celui qui s’entremet de faire vendre, acheter, échanger des marchandises, ou de faire prêter de l’argent. Ars proxenetica. Voyez Courtier.

Ce mot vient de courre ou courir, parce que le courtage se fait par plusieurs allées & venues.

Courtage signifie aussi le droit, le salaire qu’on donne à ceux qui exercent le courtage. Jus proxenetorum, ou proxeneticum. Les Marchands donnent un quart pour cent à ceux qui leur négotient leurs lettres sur la place.

Courtage, droit d’aides qui se paye aux Officiers Jaujeurs & Courtiers à chaque fois que le vin est vendu, ou qu’il change de main.

COURTAGE de Bourdeaux, droit qui se perçoit par mer sur toutes sortes de marchandises. La recette du droit de courtage appartenoit originairement à la ville de Bourdeaux, qui vendit ce droit à quarante particuliers qui élisoient entr’eux un Receveur pour en faire la perception. Mais en 1680, Louis XIV fit la réunion de ce droit au Bureau de Convoi & Comptablie de Bourdeaux ; & pour dédommager les particuliers qui en jouissoient, il leur accorda des provisions de Courtiers Royaux, & en rendit les offices héréditaires. C’est pour cette raison qu’en supprimant les charges des Agens de change & Courtiers dans tout le Royaume, on en excepta celles de la ville de Bourdeaux. Edit de 1705.

COURTAUD, AUDE. adj. & s. m. ce qui est court & racourci. Celui ou celle qui est d’une taille courte, grosse & entassée : il est du style familier. Gros courtaud, grosse courtaude.

En termes de Manège, on appelle courtaud un cheval de moyenne taille à qui on a coupé la queue & les oreilles. Equus caudâ auribusque mutilus. Il étoit monté sur un courtaud. On appelle aussi chien courtaud, celui à qui on a coupé la queue.

On appelle proverbialement courtaud de boutique, un garçon marchand, un artisan, un homme du peuple qui travaille en boutique : ce qui vient de ce qu’autrefois tous les gens considérables de la ville portoient des habits longs ; il n’y avoit que le peuple & les artisans qui fussent habillés d’une robe qui ne descendoit point plus bas que le genou : & on les appeloit ainsi, à cause que leurs habits étoient courtauds. Tabernarius administer.

O Paris ! ô ville superbe !
O qu’il m’est doux de te quitter !
J’aime bien mieux marcher sur l’herbe,
Que sur ton pavé me crotter.
Lorsqu’un vilain courtaud me pousse
Et me jette vers le ruisseau ;
Ou qu’un carrosse m’éclabousse,
Chargeant de mouches mon manteau. P. du Cerc.

On dit aussi qu’on a étrillé quelqu’un en chien courtaud, qu’on l’a frotté en chien courtaud, pour dire qu’il a été battu outrageusement.

Coquillard dans le monologue des perruques dit :

Paveurs & revendeurs de pommes,
Ont longues robes de cinq aunes,
Aussi-bien que les Gentilshommes.

Ce qui confirme l’étimologie du mot courtaud rapporté ci-dessus. Quelques-uns écrivent courtaut, mais on ne dit point courtaute au féminin.

Courtaud est aussi un instrument de Musique, & une espèce de fagot ou basson racourci, qui sert de basse aux musettes. C’est un gros morceau de bois cylindrique, dont quelques-uns sont de grands bourdons de Pèlerins. Il est percé de tout son long par deux trous qui se communiquent, par lesquels le vent descend d’abord, & puis remonte, à cause qu’il est bouché par en bas.

COURTAUDER, v. a. couper la queue. Il n’est en usage qu’en parlant des chevaux, & on dit, faire courtauder son cheval.

Courtaudé ée, part.

COURT-BÂTON. Ce mot ne se dit qu’en cette phrase, tirer au court-bâton, qui veut dire, disputer avec chaleur quelque chose à quelqu’un. Litigare, contendere cum aliquo, on peut ajouter acriter, ou quelque mot semblable.

COURT-BOUILLON. s. m. manière de faire cuire certains poissons, comme les carpes, les saumons, les brochets : ce qui se fait avec du vin, du laurier, du romarin, du sel & des épices ; après quoi on les sert à sec dans une serviette, ou on les mange à la sauce à l’huile, au vinaigre & au sel. Modus coquendi piscos in vino cum aromatis.

On appelle demi-court-bouillon la même manière de les apprêter, mais on les sert avec un peu de la sauce où ils ont été cuits.

Ces bonnes filles si vantées,
Qui d’un pareil espoir flattées,
Mirent leur père au court-bouillon,
Pour lui rendre son vermillon,
Se trouvèrent bien attrapées. P. du Cerc.

COURT-BOUTON. s. m. cheville de bois à demi-équerre, qui sert à lier les bœufs avec un omblet ou anneau de bois tortillé au bout du timon.

☞ COURTE-BOTTE. s. m. terme populaire & de mépris ; pour dire, petit homme. Brevioris staturæ homo, homunculus. On se moque du courte-botte, la queue lui pend au petit courte-botte, Caudam trahit homuncio. On attachoit une queue par-derrière à ceux dont on vouloit se moquer.

COURTE-BOULE. s. f. C’est ainsi qu’on appelle un jeu de boule, dans lequel il faut pousser la boule avec un peu de force & beaucoup d’adresse, parce que l’espace en est fort court & fort limité. Globulorum ludus angusto spatio circumscriptus. Jouer à la courte-boule.

COURTE-HALEINE, s. m. maladie qu’on nomme