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Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, II.djvu/138

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CAB

cabinet, curiosités, pièces antiques, médailles, tableaux, ciquilles, & autres rareté de la nature & de l’art. Le Cabinet d’un tel curieux vaut cent mille francs.

On dit chez le Roi, & chez quelques Grands Seigneurs, le cabinet des livres, des armes, des médailles, pour signifier les lieux où ces choses sont rangées, & les choses mêmes qui y sont conservées. Armarium, cimelium. J’ai en main une médaille du cabinet du Roi, &c. P. Souc. On dit aussi des cabinets des Particuliers ; le cabinet de Sainte Géneviève, des Jésuites du Collège de Paris, de M. Foucault, de M, de Wilde, du Comte de Pembtoch, &c. Idem.

Cabinet, est aussi un buffet où il y a plusieurs volets & tiroirs pour y enfermer les choses les plus précieuses, ou pour servir simplement d’ornement dans une chambre, dans une galerie. Un cabinet d’Allemagne, Armarium Germanicum ; d’ébène, ex ebeno. Il y a de magnifiques cabinets dans la Galerie du Roi. Cabinet de marqueterie, est un cabinet dont les ornemens sont de bois de diverses couleurs, ou de pièces de rapport.

Cabinet d’orgues, est une petite orgue portative, qui est une espèce de positif compose d’un plus grand ou d’un plus petit nombre de jeux, selon la volonté du maître. Organi musici Armarium. Dans des cabinets d’orgues on ajoute quelquefois un jeu d’épinette, où le même clavier fait parler en même tems les tuyaux & les cordes qui sont accordées à l’unisson, ou à l’octave.

Cabinet d’Histoire-Naturelle, appartement d’une ou de plusieurs pièces propres à contenir des collections en tout genre, des différentes productions de la nature dans le règne animal, végétal & minéral, rangées par ordre méthodique, & distribuées de la façon la plus convenable à l’étude de l’histoire-naturelle.

☞ Celui du jardin du Roi est un des plus riches de l’Europe.

Cabinets Secrets, en physique, sont des cabinets dont la construction est telle, que la voix de celui qui parle à un bout de la voute, est entendue à l’autre bout.

Cabinet, signifie figurément ce qui se passe, ce qui le dit dans un cabinet, soit à l’égard des Princes pour le Conseil qui s’y tient, soit pour l’étude qu’y font les Particuliers. Ainsi quand il s’agit de la Cour & du Roi, le mot de cabinet signifie le Conseil particulier du Roi, & les secrets les plus cachés. Secreta, arcana consilia. Régenter le Cabinet. La Rochef. Justinien fut un Empereur de cabinet, & propre seulement à faire la guerre de loin ; mais qui en récompense prétendoit exceller dans les combats de doctrine, & entendre mieux que personne les controverses de ce temps-là. P. Doucin. Charles V, Empereur n’étoit pas grand Capitaine, mais c’étoit un grand homme de cabinet. Ce courtisan sait tous les secrets du cabinet. Ce Jurisconsulte ne sait pas plaider ; mais il est très-habile dans le cabinet, c’est-à-dire, pour la consultation.

On dit aussi qu’un homme tient cabinet ; pour dire, qu’il reçoit chez lui les honnêtes gens qui s’y veulent assembler, pour faire une conversation savante & agréable. Meilleurs du Puy ont long-tems tenu cabinet dans la bibliothèque de M. de Thou. M. Ménage tenoit souvent cabinet chez lui.

Cabinet de Treillage, est un lieu couvert au bout des allées d’un jardin, où l’on se repose, composé seulement de verdure soutenue par des barreaux de fer ou des perches. Pergula, trichila. Un cabinet de chèvrefeuille, de filaria, &c. Cabinet de verdure, est aussi une espèce de berceau, fait par l’entrelacement de branches d’arbres.

Cabinet de Jardin, Petit bâtiment isolé en manière de pavillon, ouvert de tous côtés, qui sert de retraite contre les ardeurs du Soleil pour y prendre le frais. Umbraculum, curta pergula, trichila, nubilarium, suffugium imbris & solis.. Le nom de salons convient mieux à ces espèces de cabinets. Lorsqu’ils sont accompagnés de quelques autres pièces, on les nomme belvedères.

CABIRES. Terme de l’ancienne Théologie des Païens, qui signifie, selon son étymologie qui est Phénicienne, puissans Dieux. C’étoit le nom qu’on donnoit aux Dieux des Samothraciens. Ils étoient aussi adorés en quelques lieux de la Grèce, comme à Lemnos & à Thebes, où l’on célébroit les Cabiries en leur honneur. Sanchoniaton dit que les Phéniciens les honoroient aussi. Euseb. Præp. Lib. I. Diodore de Sicile dit, Liv. V, qu’ils passoient pour avoir trouvé l’usage du feu, & l’art de faire des ouvrages de fer. C’est pour cela que sur une médaille de Gordien III, & sur une de Furia Sabinia Tranquillina, toutes deux de la ville de Carrhes, où les Cabires étoient adorés, il y a un Cabire sur une colonne, tenant de la main droite un marteau. Vaillant, Num. Imper.p. 205 & 223,& Hérodote remarque dans son III Liv., que les Cabires étoient représentés semblables à Vulcain. Une inscription grecque qui est à Venise les appelle grands Dieux & Dioscoures, qui est un nom affecté à Castor & à Pollux, comme si ces Dieux avoient été du nombre des Cabires. Elle porte,

ΓΑΙΟΣ ΓΑΙΥ
ΑΧΑΡΝΕΥΣ ΙΕ
ΡΕΥΣ ΓΕΝΟΜΕ
ΝΟΣ ΘΕΟΝ ΜΕ
ΓΑΛΟΝ ΔΙΟΣ
ΚΟΡΩΝ ΚΑΒΕΙΡΩΝ

Vossius a parlé des Cabires dans son Liv. II des Idol, c. 31, p. 235, 236. C. 53, p. 302, & C. 57, p. 311.

De Méziriac, dans son Commentaire sur l’Epître de Didon à Enée, après avoir rapporté sur ce sujet un long passage de Varron, pris de Servius, ajoute ces paroles : on peut tirer de ce passage avec Scaliger, que ces Dieux Samothraciens, qui étoient nommés puissans, sont les mêmes qu’on appeloit Cabires, d’autant que Caber, en langue Phénicienne ou Syriaque, signifie puissant. Nonnus, Liv. XIV, des Dionysiaques, fait mention de deux Cabires. nommés Aleon & Eurymédon, & dit qu’ils étoient fils de Vulcain & d’une Nymphe Thracienne, appelée Cabire ou Cabre. Il fait néanmoins dans ses Livres XXVII, XXIX & XXX, cette Nymphe mere des Cabires.

De Méziriac rapporte encore au même endroit cette remarque du Scholiaste d’Apollonius, sur le premier livre des Argonautes, touchant les Cabires. En l’Île de Samothrace on s’initie aux Cabires, & Mnaseas rapporte même leurs noms. Ils sont au nombre de quatre, savoir, Axierus, Axiocersa, Aciocersus : Axierus, c’est Cérès ; Axiocersa, c’est Proserpine ; Axiocersus, c’est Pluton. La quatrième qu’on ajoute, nommé Casmilus, c’est Mercure, au rapport de Dionysodorus. Athenée dit que Jason & Dardanus furent engendrés de Jupiter & d’Electra, & qu’il lui semble qu’ils furent appelés Cabires, dont le plus ancien, c’est Jupiter, le plus jeune, c’est Bacchus. Voilà ce que le Scholiaste d’Apollonius a remarqué touchant les Cabires, dont il est aussi parlé dans Strabon. Hésychius dit que ces Cabires, qui sont fils de Vulcain, étoient fort honorés dans l’Île de Lemnos. Hérodote, Liv. III, les fait aussi fils de Vulcain. Voyez de Méziriac, qui s’étend fort au long sur les Cabires. Bochart en parle presque de la même manière dans la seconde partie de sa Géographie sacrée, Liv. I, ch. 12, & selon sa méthode ordinaire, il remonte jusqu’à la langue Phénicienne, d’où les Grecs ont formé les noms des Dieux Cabires, en les accommodant au génie de leur langue.

Le mot de Cabires a un autre sens dans Origène contre Celse, où il se prend pour les anciens Persans. M. Hyde, qui a donné depuis peu une histoire de la Religion des anciens Persans, tirée de leurs écrits en leur langue, a remarqué que le mot de