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Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, II.djvu/368

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personne qui n’a pas l’autorité requise, ou qui l’ayant, n’a pas gardé les formalités essentielles. Il ne faut pas confondre la censure invalide & la censure injuste : la censure peut-être injuste sans être invalide. La déposition, la dégradation, ni même l’irrégularité ne sont point des censures. Un Ecclésiastique qui exerce les fonctions des Ordres majeurs étant lié par quelques censures, tombe dans l’irrégularité. On excepte l’excommunication mineure. Le pouvoir de porter des censures a été donné à l’Eglise en la personne des premiers Pasteurs. Il n’y a que ceux qui jouissent de la Juridiction extérieure, qui puissent porter des censures ; ainsi les Curés n’ont pas ce droit. L’Histoire Ecclésiastique fournit un grand nombre d’exemples de censures. Voyez les Conférences d’Angers.

CENSURER. v. a. Condamner un livre comme préjudiciable à la Religion ou à l’Etat. Censurer une proportion, c’est déclarer qu’elle contient quelque erreur. Dammare.

Censurer signifie aussi, critiquer, reprendre. Reprehendere ; Censoris virgulâ notare. Cet Auteur ne s’occupe qu’à censurer les ouvrages d’autrui. Cette femme est médisante & censure les actions de tout le monde. Ce n’est pas toujours par un véritable zèle qu’on censure ; c’est par chagrin, ou par la malignité de l’esprit humain. Bell.

Aimez qu’on vous censure. Boil,

Faites-vous des amis prêts à vous censurer. Id.

Tous les dévots de cœur sont aisés à connoître ;
Ils ne censurent point toutes nos actions ;
Ils trouvent trop d’orgueil dans ces corrections. Mol.

Censuré, ée, part. Censurâ notatus, damnatus. Livre censuré, proposition, doctrine, opinion censurée, condamnée.

☞ CENT. adj. numéral de t. g. & quelquefois substantif masculin. C’est le carré de dix, le produit de dix par dix ; un nombre qui contient dix fois dix, cinq fois vingt. Centum. C’est ce nombre qui commence la troisième colonne des chifres arabes, disposés en ordre d’Arithmétique. Il faut cent ans pour faire un siècle. Une compagnie de cent maîtres. Une Hydre à cent têtes. Cent hommes & cent femmes. Cent un, cent deux, cent trois. Cent un an, cent un chevaux. Cent mille. Cent millions. Au pluriel on dit & on écrit cents ou cens. Deux cens ans, deux cens hommes. Richelet écrit avec un t au pluriel, quand il suit une consonne, deux cens pistoles. Mais cette ortographe est mauvaise. Il faut une s au pluriel, parce qu’on la prononce nécessairement dans deux cens ans, deux cens hommes. Ainsi on ne doit pas moins écrire deux cens pistoles, quoique l’s ne s’y prononce pas, par la règle générale des pluriels. Quand on marque l’année courante depuis une époque, comme quand on dit l’an mil sept cent trente-deux depuis la naissance de J. C. Cent ne prend pas d’s, en cette occasion, quoique précédé de sept, parce que c’est un nombre absolu pour un nombre ordinal, & que l’on n’y parle que d’une année, comme s’il y avoit, l’an millième sept centième trente-deuxième. Restaut.

☞ Cent est aussi s. m. Un cent de pommes. Un cent de fagots. Un cent de marons. C’est en ce sens qu’on disoit dans la dernière édition de ce Dictionnaire, que cent étoit un terme numéral masculin. Mais on ne disoit pas un adjectif numéral seulement masculin. Ainsi la critique des Vocabulaires porte évidemment à faux, & fait dire à l’Editeur ce qu’il ne disoit point.

☞ On dit jouer un cent de piquet, jouer une partie de cent points au piquet.

Ce mot vient du latin centum, qui vient du grec κεντεῖν, pungere. À chaque cent on faisoit un point. Ce mot a été pris du celtique Cant. Pezron. Cant est-il celtique, & n’est-il point Roman ?

Cent, signifie un nombre grand, incertain, indéterminé. Je lui ai dit cent & cent fois. Sæpius. Cet homme a cent défauts, cent perfections. Multus, plurimus. Je remarquois en elle cent attraits. Voit. On fit encore cent réflexions dans lesquelles on s’empressa de rendre justice au mérite de ce savant homme. (M. Perrault) {{Mlle l’Héritier.

Cent en terme de commerce, sert à régler la proportion du profit de l’intérêt qu’on fait dans le négoce. On demande deux & demi pour cent pour remettre de l’argent en une telle ville. L’intérêt ordinaire de la place est de huit pour cent, ou le denier douze. Les Hollandois qui trafiquent aux Indes gagnent cent pour cent, c’est-à-dire, le double. Centesimum fructum afferre. Rapporter cent pour cent.

Cent est encore un terme de commerce, qui sert à exprimer certaine quantité des choses dont on trafique. Un cent de sel à Amsterdam, c’est-à-dire quatorze tonneaux.

Un cent de sel de Marenne, de brouage, de l’Île de Ré, &c. c’est-à-dire, vingt-huit muits ras, à vingt quatre boisseaux par muid.

Cent de bois. C’est la mésure des bois de charpente en œuvre de différentes longueurs & grosseurs. Cent fois la quantité de douze pieds de longs sur six pouces de gros, qui font cent pièces de bois, à quoi on les réduit pour les estimer.

☞ CENTAINE. s. f. Nombre collectif, qui renferme cent unités. Centum, centenarius, centenus numerus. Une centaine d’années. Une centaine d’écus. Une centaine d’hommes. Nombre, dixaine centaine, mille, &c, C’est l’ordre des nombres en Arithmétique.

☞ On dit adverbialement à centaines, par centaines, pour dire en grande quantité. Je reçois des lettres par centaines, à centaines.

Centaine, se dit aussi du brin de fil ou de soie par où tous les fils d’un écheveau sont liés ensemble, & par où on doit commenter à le dévider. Fili in spiram convoluti initium. Vous mêlerez cette soie, si vous ne trouvez la centaine.

☞ CENTAL. Petite ville des Etats de Savoie, dans le Marquisat de Saluces, sur la rivière de Malia.

☞ CENTAURE. s. m. Terme de Mythologie. Animal fabuleux, moitié homme, moitié cheval. Centaurus. Le Centaure Chiron eut soin de l’éducation d’Achille. Le combat des Centaures contre les Lapithes. Les Centaures y périrent presque tous, par la valeur de Thesée & de Pirithoüs ; le reste se sauva dans les montagnes d’Arcadie, de manière qu’on n’en entendit presque plus parler.

Les Poëtes ont feint que les Centaures étoient fils d’Ixion & d’une Nuée. Le château où ils se retiroient, s’appeloit Νεφέλη, qui signifie Nuée ; c’est ce qui a donné occasion à ce que l’on a dit de leur mère. Il est souvent parlé des Centaures dans les Lettres d’Ovide. M. de Méziriac en traite fort au long dans son Commentaire sur la lettre de Philis à Démophon, où il dit : les Centaures étoient demi-hommes & demi-chevaux : ils avoient la tête d’un homme & les bras ; & peu-à-peu, descendant vers la poitrine, ils commençoient d’être chevaux, ayant quatre pieds comme un cheval, & tout le reste du corps & même le cri de cheval, comme les décrivent Lucien, au Dialogue intitulé Antiochus ; & Philostrate au Tableau des Centaurelles. Quant à leur origine, Diodore de Sicile, Liv. IV, en a le mieux parlé de tous ; les principaux Auteurs qui en ont traité, sont Eustathius sur le premier de l’Iliade, Tzetzès Chiliade 7, Hist. 99, & Palæphate en ses Histoires Incroyables. Consultez Vigenère sur les Centaurelles de Philostrate ; il rapporte tout ce qu’en ont dit Tzetzès Si Palæphate. Les Centaures dont parle les Poëtes, sont Chiron, Eurytus, Amycus, Grynæus, Rhoëtus, Arneus,