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Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, II.djvu/447

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CHA

remment lui a donné le commencement ; car lorsque l’Archevêque de Bourges met pour la première fois le pied dans la Cathédrale, pour en prendre possession, le peuple qui est à la porte se jette sur la chape dont le Prélat est revêtu, & qui ne tient qu’à un fil de soie ; & on la met en pièces, chacun se battant à qui en aura un morceau, & à qui en emportera davantage. On dit aussi, qu’un homme cherche chape-chute ; pour dire, qu’il cherche, ou qu’il trouve quelque occasion, quelque hazard, quelque rencontre avantageuse, parce qu’autrefois chape signifioit un manteau. ☞ Mais aujourd’hui on dit plus communément, chercher & trouver chape-chute, pour dire, quelque chose de desagréable, à la place de ce qu’on cherchoit d’avantageux.

Je lui dis que ce n’est point là la vie d’un honnête homme, qu’il trouvera quelque chape-chute, & qu’à force de s’exposer, il aura son fait. Mde de Sev.

CHAPÉ, adj. En termes de Blason, se dit d’une pièce faite en figure de chevron, mais qui est pleine au-dedans & massive, en sorte que le champ de dehors qui est dans l’écu semble lui servir de chape, ou de manteau : & en ce cas on l’appelle écu chapé, parce qu’il s’ouvre en chape ou en pavillon, depuis le milieu du chef jusqu’au milieu des flancs. Trabeatus. Telles sont les armoiries des Dominicains & des Carmes ; & c’est l’image de leurs robes & de leurs chapes. Il s’en trouve de plusieurs sortes, un écu chapé losangé, un écu chapé enté, un écu chapé crénelé, un écu chapé écartellé, suivant les figures ou les ornemens qu’on met en ces chapes. Son oppose est chausse.

Chapé. adj. m. Revêtu d’une chape. L’Evêque va se revêtir des ornemens pontificaux dans la Chapelle paroissiale qui est au bas de la nef, où le chœur tout chapé le va querir. Voyages Liturgiques de France. Ce mot n’est pas d’usage dans cette acception.

CHAPEAU. s. m. Habillement ou couverture de tête, ☞ qui est ordinairement d’étoffe foulée, de laine ou de poil, & qui a une forme avec des bords. Petasus, causia. On met des bords au chapeau pour garantir le haut du corps de la pluie. Un chapeau de laine. Petasus laneus. Un chapeau de castor, de vigogne. Fibrinus. Un chapeau des sept sortes. Un chapeau de paille. Stramineus. La forme, les bords d’un chapeau. Testudo, cavum pilei, pilei margines. On a dit autrefois, un chapel orfroifié de bisettes d’or & de grosses perles, c’est à-dire, bordé de passemens & de perles. On a appelé aussi un heaume, chapel de fer à visière. Naudé appelle, dans son Mascurat, les anciens chapeaux des Espagnols, des chapeaux en pot à beurre.

On ne voit point de chapeau avant le règne de Charles VI. On commença de son temps à en porter à la campagne : on en porta sous Charles VII dans les villes en temps de pluie, & sous Louis XI en tous temps. Louis XII reprit le mortier. François I s’en dégoûta, & porta toujours un chapeau. Le Gendre. Quand Charles VII fit son entrée dans Rouen le 10 Novembre 1449, il avoit un chapeau de castor doublé de velours rouge surmonté d’une houpe de fil d’or. C’est dans cette entrée, ou du moins sous ce règne, qu’on commença à voir en France l’usage des chapeaux & des bonnets, qui s’introduisit depuis peu-à-peu, à la place des chaperons, desquels on s’étoit servi de tout temps P. Daniel, Tom. II, p. 1204.

On regardoit comme un très-grand désordre en 1495, que les Ecclésiastiques commençassent, à la manière des séculiers, de porter des chapeaux sans cornettes. Il fut ordonné qu’ils auroient des chaperons de drap noir avec des cornettes honnêtes ; & que s’ils étoient pauvres, ils auroient du moins des cornettes attachées à leurs chapeaux, & cela sous peine de suspension, d’excommunication, & de payer cent fois d’amende. L’usage des chapeaux étoit plus ancien en Bretagne de plus de deux cents ans parmi les Ecclésiastiques, principalement parmi les Chanoines : mais ces chapeaux étoient comme des bonnets, & c’est d’où sont venus les bonnets carrés des Ecclésiastiques. Un Evêque de Dol, du XIIe siècle, zélé pour le bon ordre, permit aux Chanoines seulement de porter de ces sortes de chapeaux, & voulut que si d’autres en portoient dans l’Eglise, l’Office divin cessât aussitôt. Lobineau, Tome I, p. 845.

Ce mot vient de cape & de capellum, selon Ménage, ou de capellut, que l’on trouve dans la basse latinité, synonyme de caputium, capuce, habillement de tête. Voyez Act. SS. April. T. II, p. 51. On a dit autrefois capel, que l’on dit même quelquefois encore en badinant, & dans le style burlesque :

Mais je jugeai portant sous mon capel,
Tout bien compté, qu’il étoit bon d’attendre.

D’autres le dérivent de l’allemand, schapel, signifiant un chapeau de fleurs. Joannes de Janua, dit que c’est parva capa, eò quod capillos tegat, & est quasi capitis pellis.

On dit, mettre la main au chapeau. Pasquier remarque en ses Recherches, qu’en beaucoup d’Universités d’Allemagne, lorsque les Professeurs nomment Turnèbe ou Cujas, tous les Auditeurs ne manquent jamais de mettre la main au chapeau ; tant est grand l’honneur & le respect qu’ils portent à leur mémoire. J’ai oui dire que dans l’Université de Bourges on fait la même chose pour Cujas. Donner un coup de chapeau, ôter le chapeau à quelqu’un, être devant lui chapeau bas. Caput aperire, petasum ponere ; pour dire, se découvrir, être tête nue devant lui, pour le saluer, ou lui témoigner du respect. Esse aperto capite.

On dit, mettre chapeau bas, pour dire, ôter son chapeau, & absolument, chapeau bas, pour dire, découvrez-vous, ôtez votre chapeau. Oter son chapeau à quelqu’un, pour dire, le saluer, en se découvrant la tête. Acad. Fr.

On dit d’une querelle qui s’est passée sans beaucoup de désordre : tant de tués que de blessés, il n’y a qu’un chapeau de perdu.

On dit familièrement & populairement que le père d’un enfant nouveau né va tourner son chapeau, pour prier un parrein & une marreine.

Les Chapeliers appellent chapeau en blanc, un chapeau qui n’est pas encore teint. Petasus nullo coloro imbutus, tinctus.

Chapeau, signifie quelquefois un homme. Il y avoit plusieurs femmes à cette assemblée, mais il n’y avoit pas un chapeau. Cela est du style familier.

On appelle chapeau de fleurs, une couronne de fleurs qu’on met sur la tête des filles, lorsqu’on les épouse. Florea corolla.

Chapeau de roses, ou chapel de roses, signifie aussi un léger don que les peres & meres font à leur fille, quand ils la marient ; de manière qu’ils ne lui donnent pas tout son advenant & légitime portion.

☞ Il y a quelques coutumes où la fille mariée par ses pere & mère avec un chapeau de roses, ne peut plus venir à leur succession. Voyez la Coutume de Tours & celle d’Auvergne. C’est une disposition introduite en faveur des mâles, pour leur conserver les biens des familles. La Coutume de Normandie a une disposition semblable. Si rien n’a été promis à la fille, rien n’aura.

Cette disposition a aussi lieu entre nobles dans la Coutume de Touraine. Suivant toutes ces Coutumes, les filles doivent se contenter de ce qui leur a été donné en mariage par leurs peres & meres, fussent-elles mariées avec des chapeaux de roses ; en sorte qu’étant une fois mariées, elles ne peuvent plus prétendre à leurs successions.

Chapeau de fleurs, se dit aussi pour la couronne de fleurs que le Clergé porte sur la tête aux pro-