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Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, II.djvu/450

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grains : ils n’emploient pas néanmoins plus de temps que nous à le réciter ; au contraire ils ont plutôt fait, parce qu’ils ne disent à chaque grain pour toute prière, que ces paroles, Louange à Dieu, ou celles-ci, Gloire à Dieu.

Comme ce Jésuite n’est pas tout-à-fait exact dans la description des chapelets des Turcs, M. Simon, qui a traduit ce Voyage d’italien en francois, a ajoûté cette remarque. Il est vrai que les grains de leurs chapelets ne sont pas inégaux à la façon des nôtres ; aussi ne récitent-ils pas dessus deux différences prières. Ils ont néanmoins quelque distinction dans leurs chapelets de cent grains : ils les divisent en trois parties, & ils disent sur une de ces parties trente-trois fois soubhan lallah, c’est à-dire, que Dieu est louable ? sur la seconde Ellamd lallah, gloire à Dieu ; & sur la troisième, Alla echer, Dieu est grand. Ces trois fois trente-trois fois ne faisant que quatre-vingt-dix-neuf, ils ont ajoûté une autre prière sur la tête du chapelet, pour faire le nombre de cent ; & c’est en quoi leurs chapelets sont semblables aux nôtres, parce qu’outre la couronne & le rond de leur chapelet, il y a encore au bout quelque chose qui tient la place de ce que nous appelons la croix du chapelet.

M. Simon croit que ce chapelet des Mahométans tire son origine de Mea beracoth, ou cent bénédictions, que les Juifs sont obligés de réciter tous les jours, & qu’on trouve dans leurs Livres de prières. Les Juifs & les Mahométans, dit-il dans cette même note, ont cela de commun, qu’ils ne font presque rien sans prononcer quelque louange ou bénédiction ; mais comme les Mahométans ont réduit ces cent bénédictions à trois sortes d’actions de grâces, cela les a obligés d’inventer ce chapelet, divisé en trois, comme nous avons divisé les nôtres en dizaines, pour marquer le nombre des Pater & des Ave : outre qu’ils récitent le chapelet en particulier, ils ont des chantres qui le récitent tout haut dans leurs mosquées.

Chapelet de chevalerie, étoit autrefois une guirlande de roses qui arrêtoit les cheveux, & qui étoit fort usitée, & connue dans les vieux Romans sous le nom de chapelet.

Chapelet, en termes d’Hydraulique, ☞ se dit d’une pompe qui va par le moyen d’une chaîne sans fin, à laquelle sont attachés de suite plusieurs godets ou seaux, servant à élever les eaux, dessécher des marais, &c.

Chapelet en termes de Fonderie, morceau de fer rond & plat, avec trois tenons, qui se met à l’extrémité de l’ame d’une pièce de canon, lorsqu’on en fait le moule, pour assembler la pièce avec la culasse.

En terme de Chirurgie, chapelet est un rang de certaines pustules malignes qui viennent au front, & que l’on ne manque jamais de prendre pour un mauvais signe. Pustularum in fronte series.

Chapelet en termes de Manège, est une paire d’étrivieres garnies de leurs étriers, & ajustées au point du cavalier, qu’il attache au pommeau de la selle par une espèce de boucle de cuir qui les joint en haut. Cela lui épargne la peine de les alonger ou de les accourcir, quand il veut monter à cheval, ou en changer. Lora subicibus pedaneis instructa ad commodum equitantis.

Chapelet en termes d’Architecture, est un petit ornement ☞ en forme de petits grains sphériques ou elliptiques que l’on taille ordinairement sur les baguettes des architraves. Tæniola globulis incisa. Il y en a de plusieurs sortes, de fleurons, de grelots, d’olives, de patenôtres.

Chapelet, terme de Pêcheur. On appelle ainsi les balles de plomb que l’on met au bas de certains filets pour les faire aller au fond. Le haut de la seine demeure sur la surface de l’eau, sur les patenotres de liège. Le bas, appesanti par un long chapelet de plomb, gagne le fond de l’eau. Pluche.

Chapelet se dit plus particulièrement des balles de plomb qu’on met au bas de la circonférence du filet appelé épervier. Il représente en effet la couronne d’un chapelet.

Chapelet se dit aussi de cette verroterie ou rassade, dont il se fait un si grand commerce avec les Nègres de la Guinée, & les Sauvages de l’Amérique ; parce que ces grains de verre sont enfilés comme des chapelets, pour la facilité du négoce.

Chapelet. C’est encore un ouvrage de Serrurerie, qui est du nombre de ces sortes de pentures, que l’on appelle des fiches.

Les Marchands d’eau-de-vie appellent aussi le chapelet, une petite mousse blanche qui se forme en rond sur la surface de l’eau-de-vie, lorsqu’on la verse dans un verre. Ce cercle marque la bonté de cette liqueur,

Chapelet, machine d’Opéra. On appelle ainsi plusieurs petits chassis de formes différences, peints en nuages, & enfilés à des cordes les uns après les autres, qu’on descend & qu’on remonte par le moyen d’un contre-poids.

Chapelet, en termes de Fauconnerie, se dit pour chaperon.

Chapelet, en Jurisprudence coutumière, est une marque d’honneur & de distinction que les Seigneurs des Comtés & Baronnies ont droit de faire mettre aux fourches patibulaires de leurs Seigneuries. Vigier sur Angoumois, art. 1.

On dit en proverbe, lorsqu’il meurt coup sur coup plusieurs personnes d’une même famille, ou qu’elles se détachent d’une cabale, que le chapelet se défile. On dit quand quelqu’un est puni de quelque faute, qu’il n’a pas gagné cela en disant son chapelet.

CHAPELEURE de pain. Voyez Chapelure.

CHAPELIER, s. m. Marchand qui vend des chapeaux, ou l’Artisan qui les fabrique. Petasorum Mercator, vel Opifex.

CHAPELIÈRE. s. f. Celle qui vend des chapeaux, ou la femme du Chapelier.

CHAPELLE. s. f. Ce terme a plusieurs acceptions, même en matière ecclésiastique. Il signifie quelquefois une petite Eglise particulière, qui n’est ni Paroisse, ni Cathédrale, ni Prieuré, qui subsiste d’elle-même, & que les Canonistes appellent sub dio. C’est-à-dire détachée & séparée d’une autre Eglise. Sacrarium, sacellum.

Il y a plusieurs Eglises Collégiales qu’on appelle saintes Chapelles, comme celles de Paris, de Dijon, de Bourges, de Bourbon, de Vincennes, à cause qu’on y gardoit les reliques, &c. Celle de Bourges est appelée sainte Chapelle dans la Pragmatique-sanction ; mais celle de Dijon fut d’abord nommée Chapelle Palatine, ou du Palais, par Hugues III, Duc de Bourgogne, qui la fonda en 1172. L’an 1175 Philippe le Hardi ayant fait couronner la Reine Marie, sœur de Jean Duc de Brabant, qu’il avoit épousée en secondes noces l’année précédente, & la cérémonie s’étant faite par l’Archevêque de Reims dans la Sainte Chapelle de Paris, l’Archevêque de Sens, en qualité de Métropolitain de Paris, en fit grand bruit, & en porta ses plaintes au Légat ; mais le Roi fit cesser les murmures, en lui déclarant que sa Chapelle étoit un lieu exemt, sur lequel il ne pouvoit prétendre de Juridiction.

Ce mot vient, selon quelques-uns, du grec καπελεῖα, qui signifioit de petites tentes, que dressoient les Marchands dans les Foires pour se mettre à couvert. Papias le fait venir du mot grec λαὸς & du latin capio quasi capiens λαὸν, ou populum vel laudem ; ce qui est une étymologie de Jurisconsulte impertinente. D’autres le dérivent de cape & chape, qui servoit à se couvrir le corps, comme si la chapelle n’étoit autre chose qu’un lieu couvert : & c’est ainsi qu’on disoit la chape de saint Martin, qui étoit une espèce de manteau, ou d’étendard, dont les Ducs d’Anjou étoient gardiens, comme Grands-Sénéchaux de France, & qu’on portoit à l’armée comme un étendard. D’autres le tirent à pellibus caprarum, parce que ces lieux se couvroient de peaux de chèvres. On a aussi appelé au-