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Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, II.djvu/65

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BRE

tannia. On l’appelle aussi Estotilande, ou terre de Labrador, ou de Corta-real.

BRETAGNE. Armorica, Britannia minor. Petite Bretagne. Province de France qui a titre de Duché. C’est une grande presqu’Île baignée au nord par la mer de Bretagne, au couchant par l’Océan, au midi par la mer de Gascogne, & du côté de la terre elle est bornée par le Poitou, l’Anjou, le Maine, & une petite partie de la Normandie. C’est une des plus grandes Provinces de France, qui s’étend depuis environ le 12e degré 50 minutes de longitude jusqu’au 16d 30’, selon les cartes de M. de l’Isle, faites sur les observations de l’Académie des Sciences, & qui est entre le 47e & le 49e de latitude septentrionale. La capitale de Bretagne est Rennes. Cette province Ce divise en Haute-Bretagne, & en Basse-Bretagne. La Haute-Bretagne comprend les Evêchés de Rennes, de S. Brieu, de S. Malo, de Dol & de Nantes. On trouve dans la Basse-Bretagne les Diocèses de Vannes, de Cornouailles, de Léon & de Tréguier. Ces neuf Evêchés sont suffragans de Tours. On ne dit guère la Haute-Bretagne, mais on dit souvent Basse-Bretagne.

Le Phaéton d’une voiture à foin
Vit son char embourbé. La pauvre homme étoit loin
De tout humain secours : c’étoit à la campagne,
Près d’un certain canton de la Basse-Bretagne
Appelle Quimper-Corentin :
On sait assez que le destin
Adresse-là les gens, quand il veut qu’on enrage :
Dieu nous préserve du voyage.

La Bretagne s’appeloit Armorique du temps des Romains. On convient assez qu’elle a reçu le nom de Bretagne des habitans de la Grande-Bretagne qui s’y sont établis, mais on ne convient pas du temps où cela s’est fait. Il y a des Auteurs, qui fondés sur quelques endroits de Pline & de Bède, prétendent que dès les premiers siècles de l’Eglise, des Bretons avoient passé la mer, & conduit des colonies dans l’Armorique. Ils ne disent pas cependant que dès-lors elle prit le nom de ces nouveaux hôtes. D’autres soutiennent qu’au quatrième siècle l’Empereur Maxime s’étant rendu maître de cette province, il la donna aux Bretons qui l’avoient suivi dans ses expéditions ; d’autres que Vortiger, ou Vortigem, que les Bretons avoient appelé à leur secours contre les Ecossois, peuple d’Hibernie ou d’Irlande, qui vouloit envahir la Grande-Bretagne ; que ce Vortiger, dis-je, après avoir repoussé les Ecossois, se rendit maître de la Bretagne ; qu’un grand nombre de Bretons, pour éviter sa tyrannie, passerent en Armorique, & s’y étant établis, donnerent leur nom à cette partie de la Gaule. D’autres écrivent que ceux qui s’y retirerent, & lui donnerent ce nom, sont les Bretons chassés de leur Île par les Anglois-Saxons, qui y entrerent sous la conduite de Hengist en 446. La Chronique Bretonne, ou Britannique de l’Eglise de Nantes, que le P. Lobineau a imprimée dans le IIe Tome de l’Hist. de Bret. p. 3, dit p. 31, que ce fut en 513, sous le règne de Clotaire fils de Clovis, que ces Bretons passerent dans l’Armorique. Clotaire II vaincu par Théodebert & Théodoric, fils de Childebert, céda à Théodoric tous les pays renfermés entre la Seine, la Loire & l’Océan, jusqu’à la frontière des Bretons, mots, dit le P. Lobineau, qui font voir que nos premiers Rois n’avoient aucun droit de souveraineté sur la Bretagne. Le même Auteur dit que son gouvernement étoit aristocratique, T.I, p. 73.

Quelques-uns prétendent que la Bretagne a eu titre de Royaume ; que Conan, le chef des Bretons, que Maxime mit dans l’Armorique, la reçut de cet Empereur à titre de Royaume ; que ce Royaume, après avoir duré jusqu’à Charlemagne, fut rendu feudataire par cet Empereur, & changé en Comté. D’autres disent qu’il ne dura que jusqu’à Clovis & Chilperic, qui obligerent ces petits Rois de se contenter de la qualité de Comte ; qu’ensuite cependant, s’étant remis en liberté, ils furent rendus tributaires par Dagobert II jusqu’à Charlemagne, qui les subjugua & les réduisit à la qualité de Comtes ; depuis, la Bretagne fut érigée en Duché, & a eu long-temps ses Ducs particuliers. C’est Philippe le Bel, qui étant à Courtray en 1247, au mois de Septembre, en considération des grands services que le Duc de Bretagne Jean II lui avoit rendus, le créa Pair de France, avec les mêmes prérogatives dont jouissoit le Duc de Bourgogne, déclarant que la Pairie seroit attachée au Duché de Bretagne, & que le Duc qui n’avoit été jufques-là nommé que Comte dans les Lettres Royaux, seroit désormais appellé Duc. Lobineau. Le dernier Duc de Bretagne fut François II, qui n’eut qu’une fille, Anne de Bretagne, qui apporta la Bretagne à la France par son mariage avec Charles VIII, & puis avec Louis XII.

La Bretagne relevoit de Richard troisième Duc de Normandie, & dès le temps du premier Duc (Rolon, Fondateur de ce Duché) elle étoit devenue comme un arrière fief de la Couronne, par le consentement de Charles le Simple. Au commencement de la troisième race on vit les Bretons se relever, & donner de l’inquiétude aux Ducs de Normandie. P. Dan. Il fut réglé par le traité de Guérande, conclu le 12 d’Avril de l’an 1365, que désormais les femmes ne pourroient prétendre au Duché de Bretagne qu’au défaut de tous les mâles légitimes de la Maison de Bretagne. Id. Tom. II, pag. 628. La Bretagne est un pays d’Etats. Les Etats de Bretagne se tiennent de deux ans en deux ans dans le lieu de la Province que le Roi désigne. Voyez encore le mot Armorique. Il y a des Chroniques Annales de Bretagne, par Me Alain Bouchard, Avocat au Parlement ; l'Histoire de Bretagne par Bertrand d’Argentré ; une autre par d’Hosier, avec les Chroniques des Maisons de Vitré & de Laval ; & enfin la dernière en deux tomes, dont le second contient les preuves données par D. Alexis Lobineau, Bénédictin. Il y a des Dissertations sur la mouvance de la Bretagne, de M. l’Abbé de Vertot & d’un Anonyme. Voyez encore de Hauteserre, Notæ in Greg. Tur. L. IV, p. 114.

La mer de Bretagne, autrement la Manche, ou le Canal. C’est un grand détroit de l’Océan Atlantique, qui s’étend entre les côtes de France au midi, & celles d’Angleterre au nord.

Il y a une contrée en Canada, à la pointe du golfe de Saint Laurent, à laquelle on a donné le nom de Nouvelle-Bretagne. On écrivoit autrefois Bretaigne.

BRETAILLER, v. n. Tirer souvent l’épée & fréquenter les salles d’armes. Ce terme est méprisant, & ne convient qu’à de jeunes étourdis qui veulent faire les bravaches. Les honnêtes gens ne s’amusent point à bretailler. Ce mot vient de brette, qui signifie une longue épée. Il n’est que du style familier.

BRETAILLEUR. s. m. Jeune fanfaron qui met l’épée à la main pour la moindre bagatelle. Thraso. Les brétailleurs sont bannis de la société des honnêtes gens. Il se dit aussi de ceux qui fréquentent souvent les salles d’armes.

BRETANNION. s. m. Nom d’homme. Bretannio, ou Vetrannio. D’autres disent Vetrannion. L’un peut s’être formé de l’autre. S. Bretannion, Evêque de Tomes, dans la petite Scythie, près du Pont-Euxin, parla hautement à Valens pour la défense de la foi de Nicée, & ne voulut point communiquer avec lui.

☞ BRETAUDER. Vieux verbe qui signifioit autrefois tondre inégalement. Inæqualiter tondere.

Il a conservé cette signification chez les tondeurs de drap : il s’emploie aussi activement en maréchallerie. Brétauder un cheval, c’est lui couper les oreilles. Aures resecare, truncare.

☞ Quelques-uns s’en servent aussi pour châtrer. En style comique & burlesque, bretauder quelqu’un, c’est lui couper les cheveux plus courts qu’il n’a coutume de les porter.

BRÉTÈCHE. s. f. Vieux mot, qui signifie une forteresse