Aller au contenu

Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, II.djvu/706

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
698
COL

désséchée devient membraneuse, blanche & très-purgative. Elle sert de base à plusieurs compositions purgatives. On a donné aux trochisque de Coloquinte, le nom de Trochisque alhandal. Ces trochisques purgent en petite dose. Après l’Aloës, rien n’est d’une amertume si insupportable. On fait ces trochisques alhandal, en coupant la coloquinte fort menu, & en la broyant dans un mortier frotté d’huile d’amandes douces ; après quoi on y ajoute la gomme tragacant & le mastic.

Ce mot vient du grec κοθοκύνδη, qui lui a été donné, parce que la coloquinte κοιλίαν κινει, c’est-à-dire, remue le ventre.

☞ COLORAN. Petite ville de la presqu’Île de l’Inde, deçà le Gange, sur la côte de Coromandel, suivant M. Baudrand, qui est probablement le créateur de cette ville. Les Géographes & les Voyageurs ne parlent que d’une rivière de Coloran, dans la presqu’Île, en deçà du Gange. Elle sort des montagnes de Gate, dans la Royaume de Visapour, & se divise en plusieurs branches, dont la plus Septentrionale conserve le nom de Coloran, sépare le royaume de Gingi de celui de Tranjaour, & se perd dans le golfe de Bengale.

COLORANT, ANTE, adj. qui colore, qui donne la couleur. Colorans. Les parties colorantes d’une plante. Les Teinturiers distinguent toutes les drogues qu’ils emploient en colorantes & non colorantes. Colorem inducens. Les drogues colorantes du grand & du bon teint, dont les pastels de l’Autagais & Albigéois, vouede, indigo, pastel & graine d’écarlate, cochenille, mestèque & tesquale pour les étoffes de prix : cochenille campessiane ou silvestre pour les petites étoffes : garence, bourre ou poil de chèvre, terra mérita ou coucoume, gaude, sarrette, genestrolle & la suie. Les drogues non colorantes sont celles qui servent à disposer les étoffes, & à tirer la couleur de l’ingrédient colorant, comme l’alun, le sel ou cristal de tartre, l’arsenic, le réalgal, le salpêtre, le sel commun, le sel armoniac, le sel gomme ou minéral, l’agaric, l’esprit de vin, le son, la farine de pois & le froment, l’amidon, la chaux, la cendre commune, ou recuite, ou gravelée.

La distribution égale des arômes colorans sur tout le sujet, dépend & de l’uniformité d’action que pourra prendre par elle-même la matiere colorante mise en mouvement, & d’une certaine justesse d’opération que l’expérience enseigne. Hist. de l’Ac. des Sc.

COLORATION. s. f. Voyez COLORISATION. C’est la même chose.

COLORBASIENS. Nom d’une branche de Gnostiques. Ils furent ainsi appelés de Colorbasus, lequel avoit enrichi par dessus les visions des Gnostiques qui l’avoient précédé. S. Epiphane a apporté & réfuté ses erreurs. Hær. 35.

COLORER, v. a. donner de la couleur. Colorare. Le soleil commençoit à colorer le sommet des montagnes. Le rôt commence à se colorer. Les Taverniers savent bien colorer leur vin. La chaleur du Soleil colore les fruits.

Colorer, terme de Marqueterie & de Menuiserie de placage. C’est donner de la couleur aux pierres & aux bois qu’on emploie dans ces sortes d’ouvrages, suivant les teintes dont l’Ouvrier a besoin, ou pour ses clairs, ou pour ses ombres.

Colorer se dit au figuré pour, donner une belle apparence à quelque chose de mauvais. Colorare. Il n’y a point de si méchante action, qu’un flatteur, qu’un Sophiste, ne sache colorer. Je ne sai pas ce que l’on peut dire pour colorer tant de violences. Pat. Si vous me trahissez, ne vous attendez pas que je sois assez bonne pour me payer des excuses dont on colore d’ordinaire ces sortes de légéretés. Vill. Valentinien I n’autorisa la polygamie par un Edit, que pour colorer son double mariage. S. Evr. Si l’on considère toutes les Comédies, l’on n’y trouvera autre chose que des passions vicieuses, embellies, & colorées d’un certain fard qui les rend agréables. Nicol. Vous nous payez ici d’excuses colorées. Mol.

Pour colorer mieux le mensonge, on marquoit le lieu, le temps, & toutes les circonstances de la bataille. Bouh. Xav. L. IV.

Colorer, v. n. terme de Jardinage. Prendre du coloris, & mieux de colorer. La Blancheur d’Andilly colore fort vif au Soleil. La Quint.

☞ COLORÉ, ÉE. part. Voyez le verbe. Il est aussi adj.

☞ En Jurisprudence, on appelle titre coloré, ou titre apparent, un titre qui paroissoit valable, & qui par l’événement ne l’est pas. Il faut avoir un titre coloré pour se mettre en possession d’un Bénéfice : autrement il y a intrusion.

On appelle du vin qui est plus rouge que paillet, du vin coloré. On dit aussi d’un homme qui est rouge de visage, qu’il a le teint coloré.

COLORIER. v. a. Employer des couleurs, les mêler agréablement pour exécuter un dessein de tableau. Colorare, colores inducere.

☞ Ce terme est particulièrement affecté à la Peinture. Ce n’est pas seulement distinguer les traits & former l’image visible des objets par les variétés de la couleur ; c’est imiter les couleurs des objets naturels, relativement à leur position ; donner aux objets qu’on peint, les lumières, les ombres & les couleurs de ceux que la nature nous présente, suivant leur position & le degré de leur éloignement. Il y a des couleurs amies, qui semblent se rechercher pour s’embellir mutuellement : & des couleurs ennemies, qui semblent se fuir, qui seroient effacées ou obscurcies les unes par les autres. Mais il n’y a point de couleurs si amies, qui, étant assemblées sur le même fonds, n’aient besoin de quelqu’autre couleur moyenne qui les sépare un peu, pour empêcher que leur union ne paroisse trop brusque : Il n’y a point de couleurs si ennemies, qu’on ne puisse les réconcilier par la médiation que quelqu’autre : deux points essentiels que les habiles Peintres ont toujours en vue, comme la perfection de leur Art.

☞ Les Peintres veulent, dit Félib. Dial. des Peint. que parmi les lumières & les ombres bien ménagées, on voie dans un tableau les vraies teintes du naturel ; qu’on apperçoive des masses de couleurs, où l’on observe soigneusement cette amitié, ou cet accord qui se doit trouver entr’elles ; qu’on assortisse habilement les chairs avec les draperies, les draperies les unes avec les autres, les personnages entr’eux, les paysages, les lointains ; en sorte que tout y paroisse à l’œil si artistement lié, que le tableau semble avoir été peint tout d’une suite, &, pour ainsi dire, d’une même palette de couleurs.

☞ Les grandes idées de colorisation parfaite que nous voyons dans les Livres des Peintres, plus que dans leurs tableaux, & qu’on peut appeler le Roman de la Peinture, nous les trouvons réalisées dans un million d’objets que la nature offre à nos regards ; dans les couleurs de l’arc-en-ciel, dans celles d’un paon qui fait la roue, dans celles d’un papillon éployé aux rayons du soleil, dans les parterres de nos jardins, souvent dans une simple fleur.

COLORIÉ, ÉE, part. Dans la description du Labyrinthe de Versailles, on dit : les Animaux de bronze colorié selon le naturel, sont si bien désignés, qu’ils semblent être dans l’action même qu’ils représentent.

COLORIS, s. m. Manière d’appliquer, de mêler, & de bien placer les couleurs d’un tableau. Colorum ratio. ☞ C’est l’art d’imiter les couleurs des objets naturels, relativement à leur position. Le coloris est ce qui donne les lumières & les ombres convenables aux parties des objets qu’on veut représenter. Il faut, pour faire un beau coloris, que le clair ne précipite pas dans le brun, ni le brun dans le clair, & que deux couleurs ennemies ne se touchent pas immédiatement. Le coloris est une partie essentielle de la Peinture, par laquelle le Peintre sait imiter