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Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, II.djvu/940

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COR

Emendatè. Ecrire, parler, dessiner correctement, sans faute.

CORRECTEUR, s. m. qui corrige. Corrector, emendator. Les Magistrats de Police sont établis pour être les correcteurs & réformateurs des abus de la Police, des mœurs dépravées des habitans.

Correcteur, nom de charge & de dignité chez les Romains. C’étoit un Magistrat que les Empereurs envoyoient dans les Provinces, & dont parle Treb. Pollion, dans la vie de Testrique pere, c. 23. Vopiscus, dans celle d’Aurélien, c. 39, Europe, L. IX, c. 9. Voyez encore Saumaise sur Solin, p. 806. M. de Tillemont remarque, Hist. des Emp. T. V, p. 363, qu’ils étoient Juges ordinaires avec les Consulaires & les Présidens. L. Celius Rufus avoit été correcteur de la Toscane & de l’Ombrie. De Tillem.

Correcteurs des Comptes, sont des Officiers de la Chambre des Comptes qui marchent entre les maîtres & les auditeurs, & qui sont rétablis pour réformer les erreurs qui se sont glissées dans les comptes, lors de leur premier examen. Regiarum rationum cognitores. La correction des comptes se faisoient ordinairement par des clercs, avant que les correcteurs fussent érigés en titre d’office. Charles VI, par son édit de l’an 1410, créa deux correcteurs, pour la révision & correction des comptes. On en a depuis fort augmenté le nombre. Voyez le Guidon des financiers, & les Annotations du correcteur Gelée. L’emploi de correcteur des comptes n’étoit d’abord qu’une commission. Ensuite il a été érigé en titre d’office.

Correcteur d’Imprimerie est celui qui relit & qui corrige les épreuves des livres qu’on imprime. Corrector, emendator. L’avantage d’un livre est de passer par les mains d’un bon correcteur.

Correcteur, en termes de collège, est celui qui châtie & qui fouette les écoliers par l’ordre du Régent ou du Préfet.

Correcteur est aussi dans plusieurs couvens, le supérieur qui régit, & qui gouverne le couvent, & qui est maître de la discipline des religieux : tel est le correcteur des Minimes, auquel néanmoins, depuis quelque temps les Minimes eux-mêmes commencent à donner le nom de supérieur. Dans l’ordre de Grandmont, on donnoit aussi au treizième siècle, le nom de correcteur au supérieur de la maison,

S. Etienne de Grandmont recevoit les disciples qui venoient à lui, à condition qu’ils ne lui donneroient jamais le nom de maître ni d’Abbé ; mais seulement l’humble titre de correcteur. P. Hélyot, T. VII, p. 411.

A l’exemple de ce saint, les supérieurs du même ordre ont aussi porté le nom de correcteur. Le correcteur du monastère de Vincennes près Paris, étoit le premier visiteur de l’abbaye de Grandmont, chef d’ordre, & confirmoit aussi l’élection de l’Abbé avec les Prieurs de Bois Rayer, du Puits Chévrier, & de Deffends, P. Hélyot, Ib. p. 414. Guillaume Treynac, VIe Prieur de Grandmont, réduisit si bien les convers qui exerçoient l’office de correcteurs aussi bien que les clercs, qu’il leur donna l’exclusion pour toutes les supériorités des maisons de l’ordre. Id. p. 416.

CORRECTIF ; s. m. ☞ ce qui a la propriété de corriger, de tempérer. Corrigens, emendans.

☞ On le dit figurément en grammaire de tout ce qui réduit un mot à sa propre signification, une pensée à son vrai sens, comme les adverbes, les propositions, les épithètes qui servent à modifier & tempérer l’acception, & généralement de tout ce qu’on emploie dans le discours pour faire passer favorablement quelque proposition ou quelque expression trop forte & trop hardie. Par exemple, s’il est permis de parler ainsi, pour ainsi dire, & autres semblables expressions. Cette proposition a besoin de quelque correctif. Un orateur ne doit point hasarder un mot barbare, ou nouveau, sans quelque correctif, ou adoucissement.

☞ On le dit aussi en Morale de ce qui réduit une action à l’équité ou à l’honnêteté.

Vous sçavez le correctif important & nécessaire, dont on a eu soin de nous prémunir, pour ne pas abuser de cette maxime. Bourd Exhort. T. I, p. 207. La honte du Fils de Dieu est comme le modèle ou le correctif de la nôtre. Id. II, p. 75.

Correctif se dit aussi en Médecine, de ce qui tempère & adoucit les humeurs & les médicamens. Temperamentum. La graisse est le correctif des sels âcres qui s’engendrent dans le sang. L’esprit de vin est le correctif de l’esprit de sel. L’anis est le correctif du séné, il dissipe les flatuosités qui donnent des tranchées.

CORRECTION. s. f. action par laquelle en corrige. Correctio, emendatio. Les Magistrats sont établis, les loix sont faites pour la correction des mœurs. Les États, les Conciles s’assemblent pour la correction des abus, le rétablissement de la discipline.

Correction, pureté de la langue. Observation scrupuleuse des règles de la Grammaire. L’exactitude tombe sur les faits & sur les choses ; la correction sur les mots. ☞ Il se pique d’une grande correction. Son style est d’une grande correction. Les Anglois n’étoient pas encore parvenus du temps de Waller à écrire avec correction. Voltaire. Ce qui constitue une lettre bien écrite, ne consiste pas seulement dans la correction du style, &c. Montcrif.

Correction se dit aussi de ce que l’on fait pour rectifier un défaut. Dans ce sens, le mot de correction regarde toutes sortes de fautes, soit en fait de mœurs, soit en fait d’esprit ou de langage. On dit qu’un ouvrage, soit de l’esprit, soit de l’art, a besoin de correction ; qu’il y a des choses qui demandent correction ; qu’une correction est bonne. Un censeur cherche à s’élever au dessus de celui qu’il censure par la supériorité de sa correction. S. Evr. On dit en ce sens, correction, en matière d’Imprimerie, & l’on entend par ce mot, les fautes corrigées sur une épreuve. Voilà la seconde correction de cette épreuve.

Dans l’Imprimerie, on appelle aussi corrections, ce que l’on écrit à la marge, ou à l’interligne d’une épreuve ou d’un manuscrit pour les corriger. Acad. Fr.

Correction se dit aussi d’une simple admonition, d’un avertissement de charité ou d’amitié. Admonitio, animadversio. La correction fraternelle est condamnée par l’Évangile ; mais elle doit être faite avec prudence & modestie. Les Supérieurs quelquefois convertissent la correction chrétienne qu’ils ont droit d’exercer en une domination mondaine, qui fait perdre le respect qu’on avoit pour eux. Des corrections indiscrètes font quelquefois plus de mal, que le vice même qu’on veut corriger. Vill.

Il faut mettre le poids d’une vie exemplaire
A ces corrections qu’aux autres on veut faire. Mol.

Tous les dévots de cœur sont aisés à connaître ;
Ils ne censurent point toutes nos actions,
Ils trouvent trop d’orgueil dans ces corrections. Id.

Correction signifie encore amendement, changement de mal en bien de la disposition du cœur ou de l’esprit. Morum mutatio in melius. On a beau faire des prédications, on ne voit point de correction, le peuple n’en profite point.

Correction se prend encore pour châtiment, punition, & pour le pouvoir de reprendre & de punir. Animadversio, castigatio. Ainsi l’on dit qu’un pere use de correction envers ses enfans, un maître envers ses domestiques, & que les enfans sont