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Page:Dictionnaire pratique et historique de la musique.pdf/346

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à pas glissés. Introduite à la cour de France à la fin du xvie s. Encore en grande faveur, sous Louis xiv et Louis xv, mais devenue ternaire et plus vive. Espèce de menuet vif où est admise la syncope que refuse le menuet. On distinguait au milieu du xviie s., plusieurs manières de danser le P., dont la plus répandue était appelée « le vieux P. ». On trouve quelques P. notés à 3/4 et même à 6/8, par exception. La véritable mesure était 3/8. (Voy. Bourrée.)

Passion, n. f. L’histoire de la Passion de J.-C. est chantée, dans la liturgie catholique romaine, pendant quatre jours de la semaine sainte, dans le texte successif des quatre évangiles. Le chant, depuis le xiiie ou le xive s., en est distribué entre trois chantres ou groupes de chantres, un diacre remplissant le rôle du récitant ou de l’histoire et interprétant la partie de l’évangéliste, un diacre ou un prêtre chantant les paroles de Jésus, et un troisième chanteur, ou le chœur des chanteurs, les paroles du peuple et des interlocuteurs divers du récit. Cette dernière partie est appelée les Turbae de la Passion et a été autrefois souvent mise en musique à plusieurs voix, depuis que Binchois à la chapelle de Bruges, en donna le modèle, en 1437. Le recueil des Motetti de Passione, que publia l’imprimeur Petrucci en 1503, contenait des pièces détachées, dont quelques-unes de Josquin Després et G. van Werbeke, sur des textes tirés des récits évangéliques de la Passion. La plus ancienne Passion complète en musique, aujourd’hui connue, est celle de Jacques Hobrecht († 1505). On n’a plus que la mention des Passions en nouvelle manière composées en 1437 par Binchois pour le duc de Bourgogne. Après Hobrecht et jusqu’à Schütz (1631), plus de 50 compositions de la Passion ont été écrites par des maîtres de toutes nations, en latin ou en langue vulgaire. La Passion de Hobrecht est composée sur un texte latin formé de versets rapportés des quatre Évangiles, de manière à contenir les « Sept Paroles » du Christ, qui, on le sait, ne se trouvent toutes réunies dans aucun des Évangiles pris séparément. Ce texte fut suivi par plusieurs des successeurs de Hobrecht, travaillant, comme lui, dans les pays du Nord, comme Galliculus, Handl dit Gallus, Jac. Regnart, etc. D’autres maîtres, vivant en Italie, C. de Rore, Ruffo, Jhan Gero, adoptèrent un texte plus rapproché de l’Évangile selon saint Jean. La composition de Claudin de Sermisy, Passion selon saint Matthieu, se distingue par un caractère plus spécialement liturgique, qui se révèle par l’emploi exclusif des voix d’hommes et par le maintien dans tous les morceaux de la formule du chant grégorien affectée à la foule (turba). Les premières Passions en langue vulgaire furent celles que Joh. Walther composa en 1530 sur la traduction allemande ds Évangiles par Luther. Elles furent imitées par plusieurs maîtres allemands ou travaillant en Allemagne, depuis l’Italien Scandellus, Italien d’origine, qui vivait encore Allemagne en 1593, jusqu’à H. Schütz (1645). Les huguenots français ne firent aucune tentative pour s’approprier la forme de la Passion. Peu après Walther, la composition de la Passion bifurqua définitivement : d’une part, subsista la composition liturgique latine, pour le culte catholique ; d’autre part, se développa la composition mélangée de pièces lyriques, sortes de méditations pieuses, à l’usage du culte protestant allemand, faisant présager le Choral de Bach et de ses contemporains.

Aux Passions se rattachent dans le xviie s., les histoires telles que l’Histoire de la Résurrection de Schütz, (1623), et les compositions sur les Sept Paroles du Christ sur la croix, pour servir d’intermèdes à un sermon sur la Passion. Schütz a traité ce texte.

Au xviie s. seulement, la Passion quitta sa forme et sa destination liturgiques et entra dans la catégorie de l’oratorio. À partir de Schütz, les Passions allemandes, agrandies, deviennent une grande cantate religieuse ou un oratorio, dont le point culminant est atteint par les deux immortelles Passions selon saint Jean et selon saint Matthieu, de Bach. Le « récitant » y conserve le rôle de l’évangéliste, mais les airs, les chœurs se développent librement sur des textes seulement imités du Nouveau Testament, et le choral y mêle les effusions lyriques et religieuses de la communauté des fidèles. Les Passions devinrent une branche spéciale de la musique religieuse de concert.

Le passage de la Passion à l’oratorio devient visible dès 1704 avec l’œuvre de R. Keiser, Der blutige und sterbende Jesus, sur un texte de Hunold qui abandonne la Bible, qui versifie toutes les paroles sacrées, et qui se dirige vers le style dramatique. Le même compositeur, Keiser, traita en 1712 le texte du poète Brockes sur la Passion, texte franchement rapproché de l’opéra, et que plusieurs autres compositeurs adoptèrent en-