Aller au contenu

Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, IV.djvu/202

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’ils y remontent, tonnent, éclatent, font parler les oracles, et prononcent que la muselière est une machine infernale, et qu’il n’y a point de salut pour quiconque s’en servira. « Femmes mondaines, quittez vos muselières ; soumettez-vous, s’écrièrent-ils, à la volonté de Brama. Laissez à la voix de vos bijoux réveiller celle de vos consciences ; et ne rougissez point d’avouer des crimes que vous n’avez point eu honte de commettre. »

Mais ils eurent beau crier, il en fut des muselières comme il en avait été des robes sans manches, et des pelisses piquées. Pour cette fois on les laissa s’enrhumer dans leurs temples. On prit des bâillons, et on ne les quitta que quand on en eut reconnu l’inutilité, ou qu’on en fut las.

CHAPITRE XVIII[1]

des voyageurs.

Ce fut dans ces circonstances, qu’après une longue absence, des dépenses considérables, et des travaux inouïs, reparurent à la cour les voyageurs que Mangogul avait envoyés dans les contrées les plus éloignées pour en recueillir la sagesse ; il tenait à la main leur journal, et faisait à chaque ligne un éclat de rire.

« Que lisez-vous donc de si plaisant ? lui demanda Mirzoza.

— Si ceux-là, lui répondit Mangogul, sont aussi menteurs que les autres, du moins ils sont plus gais. Asseyez-vous sur ce sofa, et je vais vous régaler d’un usage des thermomètres dont vous n’avez pas la moindre idée.

« Je vous promis hier, me dit Cyclophile, un spectacle amusant…

mirzoza.

Et qui est ce Cyclophile ?

mangogul.

C’est un insulaire…

mirzoza.

Et de quelle île ?…

  1. Ce chapitre et le suivant ont paru pour la première fois dans l’édition de Naigeon. Ces digressions, que probablement Naigeon a retrouvées dans des papiers mis au rebut, ne nous paraissent être que des brouillons rejetés avec raison par l’auteur et que son éditeur aurait bien fait de laisser où il les avait trouvés.