Aller au contenu

Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, IV.djvu/408

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la sultane.

Car nos connaissances les plus certaines ne sont pas toujours les plus avantageuses.

la première femme.

… Le suivit de près, et l’atteignit au haut d’un observatoire, où il s’était reposé.

la sultane.

Et qui n’était pas celui de Paris.

la première femme.

Elle lui tendit le poing. L’oiseau ne balança pas à descendre ; et ils achevèrent ensemble le voyage.

la sultane.

À vous, madame seconde.

la seconde femme.

L’empereur japonais fut charmé de l’arrivée de la fée Vérité, qu’il avait perdue de vue depuis l’âge de quatorze ans. « Et qu’est-ce que cet oiseau ? lui demanda-t-il d’abord ; car il aimait les oiseaux a la folie : de tout temps il avait eu des volières ; et son plaisir, même à l’âge de quatre-vingts ans, était de faire couver des linottes.

— Cet oiseau, répondit Vérité, c’est votre fils.

— Mon fils ! s’écria le sultan ; mon fils, un gros pigeon pattu ! Ah ! fée divine, que vous ai-je fait pour l’avoir si platement métamorphosé ?

— Ce n’est rien, répondit la fée.

— Comment ? ventrebleu ! ce n’est rien ! reprit le sultan ; et que diable voulez-vous que je fasse d’un pigeon ? Encore s’il était d’une rare espèce, singulièrement panaché : mais point du tout, c’est un pigeon comme tous les pigeons du monde, un pigeon blanc. Ah ! fée merveilleuse, faites tout ce qu’il vous plaira des gens durs, savants, arrogants, caustiques et brutaux ; mais pour des pigeons, ne vous en mêlez pas.

— Ce n’est pas moi, dit la fée, qui ai joué ce tour à votre fils ; cependant je vais vous le restituer.

— Tant mieux, répondit le sultan : car, quoique mes sujets aient souvent obéi à des oisons, des paons, des vautours et des grues, je ne sais s’ils auraient accepté l’administration d’un pigeon. »

Tandis que le sultan faisait en quatre mots l’histoire du