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Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, V.djvu/425

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lui.

Ah ! nous y revoilà. Et ces maîtres, vous espérez qu’ils sauront la grammaire, la fable, l’histoire, la géographie, la morale, dont ils lui donneront des leçons ? Chansons, mon cher maître, chansons ; s’ils possédaient ces choses assez pour les montrer, ils ne les montreraient pas.

moi.

Et pourquoi ?

lui.

C’est qu’ils auraient passé leur vie à les étudier. Il faut être profond dans l’art ou dans la science pour en bien posséder les éléments. Les ouvrages classiques ne peuvent être bien faits que par ceux qui ont blanchi sous le harnais ; c’est le milieu et la fin qui éclaircissent les ténèbres du commencement ; demandez à votre ami, M. D’Alembert, le coryphée de la science mathématique, s’il serait trop bon pour en faire des éléments. Ce n’est qu’après trente ou quarante ans d’exercice que mon oncle a entrevu les premières lueurs de la théorie musicale.

moi.

Ô fou, archifou ! m’écriai-je, comment se fait-il que dans ta mauvaise tête il se trouve des idées si justes pêle-mêle avec tant d’extravagances ?

lui.

Qui diable sait cela ? C’est le hasard qui vous les jette, et elles demeurent. Tant y a que quand on ne sait pas tout, on ne sait rien de bien ; on ignore où une chose va, d’où une autre vient, où celle-ci et celle-là veulent être placées ; laquelle doit passer la première, où sera mieux la seconde. Montre-t-on bien sans la méthode ? et la méthode, d’où naît-elle ? Tenez, mon cher philosophe, j’ai dans la tête que la physique sera toujours une pauvre science, une goutte d’eau prise avec la pointe d’une aiguille dans le vaste océan, un grain détaché de la chaîne des Alpes ! Et les raisons des phénomènes ? En vérité, il vaudrait autant ignorer que de savoir si peu et si mal ; et c’était précisément où j’en étais, lorsque je me fis maître d’accompagnement. À quoi rêvez-vous ?

moi.

Je rêve que tout ce que vous venez de me dire est plus