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Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, XIX.djvu/371

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état de sentir combien ma réponse est bonne, il ne se serait pas mis dans le cas de l’entendre. Mon cher ami, si Sedaine ne recueille pas de son talent, cette fois-ci, tout l’honneur qui lui est dû, je connais quinze à dix-huit honnêtes gens qui en seront plus affligés que lui. Parmi ces honnêtes gens-là, il y a trois femmes très-aimables, très-jolies, qui veulent absolument l’embrasser ; il n’a qu’à dire quand il lui plaira de prêter ses joues. Je ne sais si jamais vous avez entendu nommer un M. de Saint-Lambert ; c’est un homme de mérite et qui veut vous connaître. Bonjour, mon ami. Si vous m’aimez bien comme je le désire et le crois, ne me dites plus que des choses que vous croyez et que je puisse croire. Je vous embrasse de tout mon cœur. Embrassez encore pour vous et pour moi l’ami Sedaine. C’est un furieux homme. Je ne sais s’il a des ennemis ; on a quelquefois comme cela plus qu’on ne mérite ; mais il les écrasera tous comme des chenilles. Bonjour.


III


Vous écrivez bien mal, monsieur et très-aimable abbé ; il faut que vous ayez bien peu de vanité pour négliger d’aussi jolis enfants que les vôtres. J’ai eu toutes les peines du monde à vous déchiffrer. Vous me direz à cela que je m’en suis donné tout le temps ; mille pardons. Je ne suis ni paresseux ni négligent, et je sens très-bien la marque d’estime que vous m’avez donnée. Mais c’est le diable qui se mêle de mes affaires, et qui ne laisse jamais faire que celles qui me désespèrent et qui m’ennuient. Enfin, voilà votre dialogue avec les misérables petites observations que vous me demandez[1]. Il ne tenait qu’à vous que je fisse mieux mon devoir d’Aristarque, vous n’aviez qu’à faire

  1. Le Monnier a publié en 1765 un Dialogue sur la raison humaine que nous n’avons pu nous procurer. Il le refit sur les conseils de Diderot et le replaça dans ses Fables, Contes et Épîtres, sous le titre de : Le Fils ingrat. La prose a disparu, et deux demoiselles de Saint-Cyr ont remplacé les deux enfants de chœur de la première version.