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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 1.djvu/685

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il la rend comme un verre noir assez beau ; & si on tire avec une tenaille une partie de l’ardoise lorsqu’elle est blanchie, elle se change en filets de verre.

6°. Il change les tuiles en verre jaune, & les écailles en verre d’un jaune noirâtre.

7°. Il fond en verre blanc une pierre ponce, tirée d’un volcan.

8°. Il vitrifie en huit minutes un morceau de creuset.

9°. Il change promptement des os en un verre opaque, & de la terre en verre noir.

Ce miroir avoit près de 3 aunes de Leipsic de large ; son foyer étoit à deux aunes de distance de lui : il étoit de cuivre ; & sa substance n’avoit pas plus d’épaisseur que deux fois le dos d’un canif.

Un ouvrier de Dresde, appellé Gœrtner, a fait, à l’imitation du miroir de Tschirnausen, de grands miroirs ardens de bois, qui, au grand étonnement de tout le monde, produisoient les mêmes effets.

Villette, ouvrier François, de Lyon, a fait un grand miroir que Tavernier emporta & présenta au roi de Perse ; il en fit un second pour le roi de Danemarc ; un troisieme, que le roi de France donna à l’Académie royale des Sciences ; & un quatrieme, qui a été exposé publiquement en Angleterre. Les effets de ce dernier, selon le rapport des docteurs Harris & Desaguliers, sont de fondre une piece de six sous d’argent en sept minutes ; de fondre l’étain en trois minutes, le fer en seize, l’ardoise en 3 ; de calciner une écaille fossile en sept. Ce miroir a vitrifié un morceau de la colonne alexandrine de Pompée en parties noires, dans l’espace de 50 minutes, & en parties blanches dans l’espace de 54 : il fond le cuivre en 8 minutes ; il calcine les os en 4, & les vitrifie en 33 ; il fond & change une émeraude en une substance semblable à celle d’une turquoise : il vitrifie des corps extrèmement durs, si on les tient assez long-tems au foyer ; entr’autres l’asbeste, sorte de pierre qui résiste à l’action du feu terrestre : mais quand ces corps sont une fois vitrifiés, le miroir n’a plus d’effet sur eux. Ce miroir a 47 pouces de large, & il fait portion d’une sphere de 76 pouces de rayon ; de sorte que son foyer est à environ 38 pouces du sommet. Sa substance est une composition d’étain, de cuivre, & de vif-argent. Wolf. Catopt.

Voici les effets du miroir ardent de l’Académie, rapportés dans le Journal des Savans de 1679, au mois de Décem. p. 322. Le bois verd y prend feu dans l’instant ; une piece de 15 sous est troüée en 24 secondes, & un petit morceau de léton en 6/10 de seconde ; un morceau de carreau d’une chambre s’y vitrifie en 45 secondes ; l’acier est troüé en 9/10 de seconde ; la pierre à fusil s’y vitrifie en une minute ; & un morceau de ciment en 52 secondes.

Ce miroir a environ 36 pouces de largeur ; son foyer occupe un espace rond, dont le diametre est à peu près égal à celui d’un demi-loüis, & il est éloigné du centre d’environ un pié & demi. Ibid.

Toute lentille convexe, ou plane-convexe, rassemble par réfraction en un point les rayons du soleil dispersés sur sa convexité, & par conséquent ces sortes de lentilles sont des verres ardens. Le verre le plus considérable de cette sorte, étoit celui de M. Tschirnhausen : la largeur de la lentille étoit de 3 à 4 piés ; le foyer étoit éloigné de 12 piés, & il avoit un pouce & demi de diametre : de plus, afin de rendre le foyer plus vif, on rassembloit les rayons une seconde fois par une seconde lentille parallele à la premiere, qui étoit placée dans l’endroit où le diametre du cone des rayons formés par la premiere lentille étoit égal à la largeur de la seconde ; de sorte qu’elle les recevoit tous : le foyer qui étoit d’un pouce & demi, étoit resserré par ce moyen dans l’espace de 8 lignes ; & par conséquent sa force étoit augmentée dans la même proportion.

Parmi plusieurs de ses effets qui sont rapportés dans les Acta eruditorum de Leipsic, se trouvent ceux-ci.

1°. Il allume dans un instant du bois dur, même trempé dans l’eau.

2°. Il fait bouillir promptement de l’eau mise dans un petit vaisseau ; il fond toutes sortes de métaux ; il vitrifie la brique, la pierre-ponce, la fayence ; il fait fondre dans l’eau le soufre, la poix, &c. il vitrifie les cendres des végétaux, les bois, & les autres matieres ; en un mot il fait fondre ou change en fumée, ou calcine tout ce qu’on présente à son foyer ; & il change les couleurs de tous les corps, à l’exception des métaux. On remarque que son effet est plus vif si on met la matiere sur laquelle on veut l’essayer sur un gros charbon bien brûlé. Ibid.

Quoique la force des rayons du soleil fasse de si grands effets dans le verre ardent, cependant les rayons de la pleine lune ramassés par le même verre, ou par un miroir concave, ne donnent pas le moindre degré de chaleur.

Comme les effets du verre ardent dépendent entierement de sa convexité, il n’est pas étonnant que même des lentilles faites avec de l’eau glacée produisent du feu, &c.

On peut aisément préparer une lentille de cette sorte, en mettant un morceau de glace dans une petite écuelle, ou dans le segment creux d’une sphere, & en le faisant fondre sur le feu jusqu’à ce qu’il prenne de lui-même la forme d’un segment.

M. Mariote fit bouillir pendant une demi-heure environ de l’eau nette, pour en faire sortir l’air, puis l’ayant fait glacer, & lui ayant fait prendre la forme convexe, il en fit un verre ardent qui alluma de la poudre fine.

Ceux qui ignorent la dioptrique, ne doivent pas être moins surpris de voir le feu, & les autres effets qui sont produits par le moyen de la réfraction de la lumiere dans une bouteille de verre remplie d’eau. Voyez Lentille.

Un phénomene assez singulier du miroir ardent de M. Tschirnausen, & probablement de tous les miroirs ardens, c’est que ce miroir ardent a moins d’efficace dans les grandes chaleurs que dans les chaleurs ordinaires. Il n’avoit presque aucune force dans le chaud extrème de 1705, & quelquefois à peine a-t-il huit jours pleinement favorables dans tout un été. Peut-être les exhalaisons qui s’élevent abondamment de la terre dans les grandes chaleurs, & qui causent dans l’air & dans la lumiere ce tremblement & ces especes d’ondulations qu’on y remarque de tems en tems, interceptent une grande partie des rayons, & les empêchent de tomber sur le miroir, enveloppent les rayons qui traversent le miroir, vont se réunir dans le foyer, & leur ôtent leur extrème subtilité nécessaire pour pénétrer un corps dur. Cet excès d’affoiblissement surpasse l’excès de force qui peut venir des grandes chaleurs. Cette conjecture est confirmée par deux observations de M. Homberg. Dans des chaleurs même ordinaires, lorsque le tems a été serain plusieurs jours de suite, l’effet du miroir n’est pas si grand que quand le soleil se découvre immédiatement après une grande pluie. Pourquoi ? c’est que la pluie précipite les exhalaisons. Ainsi mettez entre le miroir & le foyer un réchaut plein de charbon allumé, sous les rayons qui vont du miroir au foyer, & vous verrez que l’efficace des rayons sera considérablement affoiblie. Où s’affoiblit-elle, sinon en traversant les exhalaisons qui s’élevent du charbon ? Nous avons tiré cette derniere remarque de M. Formey.

Traberus a enseigné comment on faisoit un miroir ardent avec des feuilles d’or ; savoir, en faisant tourner un miroir de bois concave, & enduisant également ses côtés intérieurs avec de la poix ; on