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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 11.djvu/171

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se partagent noblement, même pour les biens roturiers.

13°. Quelques coutumes n’établissent le douaire légal qu’entre nobles ; d’autres accordent entre nobles un douaire plus fort qu’entre roturiers.

14°. La plûpart des coutumes accordent au survivant de deux conjoints nobles un préciput légal qui consiste en une certaine partie des meubles de la communauté.

15°. Les nobles ne sont pas sujets à la milice, parce qu’ils sont obligés de marcher lorsque le roi convoque le ban & l’arriere-ban.

16°. Ils ne sont point sujets au logement des gens de guerre, sinon en cas de nécessité.

17°. En cas de délit, les nobles sont exempts d’être fustigés, on leur inflige d’autres peines moins ignominieuses, & s’ils méritent la mort on les condamne à être décolés, à moins que ce ne soit pour trahison, larcin, parjure, ou pour avoir corrompu des témoins, car l’attrocité de ces délits leur fait perdre le privilege de noblesse.

18°. La femme noble de son chef qui épouse un roturier, après la mort de son mari, rentre dans son droit de noblesse.

19°. Les nobles comme les roturiers ne peuvent présentement chasser que sur les terres dont ils ont la seigneurie directe ou la haute justice ; tout ce que les nobles ont de plus à cet égard que les roturiers, c’est que l’ordonnance des eaux & forêts permet aux nobles de chasser sur les étangs, marne & rivieres du roi : en Dauphiné les nobles, par un droit particulier à cette province, ont le droit de chasser tant sur leurs terres que sur celles de leurs voisins.

20°. Les nobles peuvent assigner leurs débiteurs nobles au tribunal du point d’honneur qui se tient chez le doyen des maréchaux de France.

21°. Ils peuvent porter leurs causes directement aux baillis & sénéchaux au préjudice des premiers juges royaux ; leurs veuves jouissent du même privilege, mais les nobles & leurs veuves sont sujets à la jurisdiction des seigneurs.

22°. Ils ne sont sujets en aucun cas, ni pour quelque crime que ce puisse être, à la jurisdiction des prevôts des maréchaux, ni des juges présidiaux en dernier ressort.

23°. En matiere criminelle, lorsque leur procès est pendant en la tournelle, ils peuvent demander en tout état de cause d’être jugés, la grand chambre assemblée, pourvû que les opinions ne soient pas commencées.

Au reste, nous ne prétendons pas que les privileges des nobles soient limités à ce qui vient d’être dit, il peut y en avoir encore d’autres qui nous soient échappés, nous donnons seulement ceux-ci comme les plus ordinaires & les plus connus.

La noblesse se perd par des actes de dérogeance, savoir par le commerce, l’exercice des arts méchaniques, l’exploitation des fermes d’autrui, l’exercice de certaines charges viles & abjectes, comme de sergent, &c.

Mais le commerce maritime ni le commerce en gros ne dérogent pas.

Lorsque le pere & l’ayeul, ou tous les deux, ont dérogé à la noblesse, les enfans ou les petits-enfans doivent obtenir des lettres de réhabilitation qui les remettent dans le même état que s’il n’y avoit point eu de dérogeance.

Mais s’il y avoit plus de deux ancêtres qui eussent dérogé, il faudroit de nouvelles lettres de noblesse.

Le crime de leze-majesté fait aussi perdre la noblesse à l’accusé & à ses descendans ; à l’égard des autres crimes quoique suivis de condamnations infa-

mantes, ils ne font perdre la noblesse qu’à l’accusé &

non pas à ses enfans.

Sur la noblesse, voyez Balde, Bartole, Agrippa, Landuiphus, Miraeus, Terriat, Bacquet, le Bret, Pasquier, Thomas Miles, Tiraqueau, la Colombiere, Laroque. (A)

Noblesse accidentelle, est celle qui ne vient pas d’ancienne extraction, mais qui est survenue par quelque office ou par lettres du prince. Voyez Laroque, en sa Préface, & Hennequin dans son Guidon des finances.

Noblesse actuelle, est celle qui est déjà pleinement acquise, à la différence de la noblesse graduelle qui n’est acquise qu’au bout d’un certain tems, qui est communément après 20 ans de service, ou après un certain nombre de degrés, comme quand le pere & le fils ont rempli successivement jusqu’à leur mort ou pendant 20 ans chacun une charge qui donne commencement à la noblesse, les petits-enfans sont pleinement nobles. Voyez Laroque, chap. 1. & l’édit du mois de Mai 1711, portant création d’un commissaire des grenadiers à cheval, qui lui donne la noblesse graduelle.

Noblesse d’adoption ; on appelle ainsi l’état de celui qui entre dans une famille noble, ou qui est institué héritier, à la charge d’en porter le nom & les armes : cette espece de noblesse n’en a que le nom, & n’en produit point les effets ; car celui qui prend ainsi le nom & les armes d’une autre famille que la sienne, ne jouiroit pas des titres & privileges de noblesse, s’il ne les avoit déja d’ailleurs.

Un enfant adoptif dans les pays où les adoptions ont lieu, ne participe pas non plus à la noblesse de celui qui l’adopte ; néanmoins, dans la république de Genes, quand celui qui adoptoit étoit de la faction des nobles, la famille adoptée le devenoit aussi. Voyez Laroque, c. viij. & clxvj. & ci-après Noblesse d’aggrégation.

Noblesse d’aggrégation, est celle d’une famille qui a été adoptée par quelque maison d’ancienne noblesse.

Dans l’état de Florence, la noblesse d’aggrégation y a commencé depuis l’extinction de la république ; quand on y étoit aggrégé, on y changeoit de nom comme de famille, & on y prenoit le nom & les armes de celui qui adoptoit.

L’aggrégation a commencé à Naples, l’an 1300.

Il y a dans Genes 28 anciennes maisons & 432 autres d’aggrégation : on a commencé à y aggréger en 1528.

Dans toute l’Italie, les nobles des villes aggrégent des familles pour entrer dans leur corps.

La maison de Gonzague a aggrégé plusieurs familles, qui en ont pris le nom & les armes, & cette coutume est ordinaire à Mantoue.

Lucan dit que la noblesse de Raguze aggrege, & que les comtes de Blagean & de Cathata y furent aggrégés. L’aggrégation de George Bogstimonite, comte de Biageay, se fit le 22 Juillet de l’an 1464. Voyez Laroque, c. clxvj. & ci devant. Noblesse d’adoption. (A)

Noblesse ancienne, ou du sang, qu’on appelle aussi noblesse de race ou d’extraction, est celle que la personne tient de ses ancêtres, & non pas d’un office ou de lettres du prince ; on ne regarde comme ancienne noblesse que celle dont les preuves remontent à plus de cent ans, & dont on ne voit pas l’origine.

La déclaration du 8 Février 1661 porte que ceux qui se prétendent nobles d’extraction, doivent justifier par titres autentiques la possession de leur noblesse & leur filiation depuis l’année 1550, & que ceux qui n’ont des titres & contrats que depuis, & au-dessous de l’année 1560, doivent être décla-