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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 11.djvu/518

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sion des objets par des rayons qui viennent directement & immédiatement de ces objets à nos yeux sans être ni rompus, ni réfléchis par quelque corps. Voyez Division. Ce mot vient du grec ὄπτομαι, je vois.

Optique, se dit aussi dans un sens plus étendu de la science de la vision en général. Voyez Vision, &c.

L’Optique prise en ce dernier sens, renferme la Catoptrique & la Dioptrique, & même la Perspective. Barrow nous a donné un ouvrage intitulé lectiones opticæ, leçons optiques, dans lesquelles il ne traite que de la Catroptrique & de la Dioptrique. Voyez Catroptrique, Dioptrique, & Perspective.

On appelle aussi quelquefois Optique, la partie de la Physique qui traite des propriétés de la lumiere & des couleurs, sans aucun rapport à la vision ; c’est cette science que M. Newton a traitée dans son admirable optique, où il examine les différens phénomenes des rayons de différentes couleurs, & où il donne sur ce sujet une infinité d’expériences curieuses. On trouve dans le recueil des opuscules du même auteur, imprimé à Lausanne, en 3 vol. in-4°. un autre ouvrage intitulé lectiones opticæ, dans lequel il traite non seulement des propriétés générales de la lumiere & des couleurs, mais encore des lois générales de la Dioptrique. Voyez Lumiere & Couleur.

L’Optique prise dans le sens le plus particulier & le plus ordinaire qu’on donne à ce mot, est une partie des mathématiques mixtes, où l’on explique de quelle maniere la vision se fait, où l’on traite de la vûe en général, où l’on donne les raisons des différentes modifications ou altérations des rayons dans leur passage au-travers de l’œil, & où l’on enseigne pourquoi les objets paroissent quelquefois plus grands, quelquefois plus petits, quelquefois plus distincts, quelquefois plus confus, quelquefois plus proches, quelquefois plus éloignés, &c. Voyez Vision, Œil, Apparent, &c.

L’Optique est une branche considérable de la Philosophie naturelle, tant parce qu’elle explique les lois de la nature, suivant lesquelles la vision se fait, que parce qu’elle rend raison d’une infinité de phénomenes physiques qui seroient inexplicables sans son secours. En effet, n’est ce pas par les principes de l’Optique qu’on explique une infinité d’illusions & d’erreurs de la vûe, une grande quantité de phénomenes curieux, comme l’arc-en-ciel, les parhélies, l’augmentation des objets par le microscope & les lunettes ? Sans cette science, que pourroit-on dire de satisfaisant sur les mouvemens apparens des planetes, & en particulier sur leurs stations & rétrogradations, sur leurs éclipses, &c ?

On voit par conséquent que l’Optique fait une partie considérable de l’Astronomie, & de la Physique.

Mais cette partie si importante des mathématiques, est d’une difficulté qui égale au-moins son utilité. Cette difficulté vient de ce que les lois générales de la vision tiennent à une métaphysique fort élevée, dont il ne nous est permis d’appercevoir que quelques rayons. Aussi n’y a-t-il peut-être point de science sur laquelle les Philosophes soient tombés dans un plus grand nombre d’erreurs ; il s’en faut même beaucoup encore aujourd’hui, que les principes généraux de l’Optique & ses lois fondamentales, soient démontrées avec cette rigueur & cette clarté qu’on remarque dans les autres parties des Mathématiques. On ne viendra à bout de perfectionner cette science, que par un grand nombre d’expériences, & par les combinaisons qu’on fera de ces expériences entre elles, pour tâcher de découvrir d’une maniere sûre & invariable les lois de la vision, & les causes des différens jugemens, ou plutôt des

différentes erreurs de la vûe. Pour se convaincre de ce que nous venons d’avancer, comme aussi pour se mettre au fait des progrès de l’Optique, & du chemin qui lui reste encore à faire, il suffira de parcourir les principaux ouvrages qui en traitent.

Il est assez probable, selon M. de Montucla, dans son hist. des Mathématiques, que la propagation de la lumiere en ligne droite, & l’égalité des angles d’incidence & de réflexion (voyez Lumiere), fut connue des Platoniciens ; car bientôt après, on voit ces vérités admises pour principes. On attribue à Euclide deux livres d’Optique, que nous avons sous son nom, & dont le premier traite de l’Optique proprement dite, le second de la Catoptrique, la Dioptrique étant alors inconnue ; mais cet ouvrage est si plein d’erreurs, que M. Montucla doute avec raison s’il est de cet habile mathématicien, quoiqu’il soit certain qu’il avoit écrit sur l’Optique : d’ailleurs M. Montucla prouve invinciblement que cet ouvrage a du-moins été fort altéré dans les siecles suivans, & qu’ainsi il n’est pas au-moins tel qu’Euclide l’avoit fait.

Ptolomée, l’auteur de l’Almageste (voyez Almageste & Astronomie), nous avoit laissé une optique fort étendue qui n’existe plus. Dans cette optique, comme nous l’apprenons par Alhasen, & par le moine Bacon qui la citent, Ptolomée donnoit une assez bonne théorie pour son tems de la réfraction astronomique, & une assez bonne explication du phénomene de la lune vue à l’horison, explication à-peu-près conforme à celle que le pere Malebranche en a donné depuis. Voyez Vision & Apparente. On y trouvoit aussi la solution de ce beau problème de Catoptrique, qui consiste à trouver le point de réflexion sur un miroir sphérique, l’œil & l’objet étant donnés. Du reste, à en juger par l’optique d’Alhasen, qui paroît n’être qu’une copie de celle de Ptolomée, il y a lieu de croire que celle-ci contenoit beaucoup de mauvaise physique. Cet Alhasen étoit un auteur arabe, qui vivoit, à ce qu’on croit, vers le xij. siecle ; son optique, quoique très-imparfaite, même quant à la partie mathématique, est fort estimable pour son tems : Vitellion qui l’a suivi, n’a guere fait que le copier en le mettant dans un meilleur ordre.

Maurolicus de Messine, en 1575, commença à dévoiler l’usage du crystallin dans son livre de lumine & umbrâ, & il résolut très-bien le premier la question proposée par Aristote, pourquoi l’image du soleil reçue à-travers un trou quelconque, est semblable à ce trou à une petite distance, & circulaire, lorsqu’elle s’éloigne beaucoup du trou ?

Porta dans son livre de la Magie naturelle, donna les principes de la chambre obscure (voyez Chambre obscure) ; & cette découverte conduisit Kepler à la découverte de la maniere dont se fait la vision ; ce grand homme apperçut & démontra que l’œil étoit une chambre obscure, & expliqua en détail la maniere dont les objets venoient s’y peindre. (Voyez Vision & Œil articifiel.) C’est ce que Kepler a détaillé dans son Astronomiæ pars optica, seu paralypomena in Vitellionem ; ouvrage qui contient beaucoup d’autres remarques d’Optique très intéressantes. Antoine de Dominis, dans un ouvrage assez mauvais d’ailleurs, donna les premieres idées de l’explication de l’arc-en-ciel (voyez Arc-en-ciel), Descartes la perfectionna, & Newton y mit la derniere main. Jacques Gregori, dans son optica promota, proposa plusieurs vûes nouvelles & utiles pour la perfection des instrumens optiques, & sur les phénomenes de la vision, par les miroirs ou par les verres. Barrow, dans ses lectiones opticæ, ajouta de nouvelles vérités à celles qui avoient déja été découvertes. Voyez Dioptrique, Miroir, & Catoptrique ;