Aller au contenu

Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 11.djvu/648

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

verses opinions erronées ou singulieres, de la lecture d’un traité d’Origenes intitulé, des principes. On peut compter parmi ces opinions bisarres que le soleil, la lune, les étoiles & les eaux, qui sont au-dessus du firmament, ont des ames, & qu’à la résurrection tous les corps auront une forme ronde. Les livres d’Origenes furent condamnés, & la lecture en fut défendue dans le cinquieme concile général, qui est le deuxieme de Constantinople, tenu en 553. Divers auteurs se sont attachés depuis à justifier la doctrine d’Origenes, & d’autres à prouver la réalité de ses erreurs ; mais on ne peut disconvenir qu’il ne se soit égaré sur bien des chefs.

ORIGINAIRE, adj. (Gramm.) qui a pris son origine en quelque endroit. Exemple, c’est une famille originaire de Flandres. Il se dit aussi de ce qui nous vient d’origine ; c’est un vice originaire dans cette maison.

Originaire, quelques marchands appellent marchandise originaire, celle qui croît ou qui se fabrique dans un pays avec des matieres mêmes du pays ; mais ce terme est peu usité. Dictionn. de Com. tom. III. pag. 644.

ORIGINAL, s. m. est le premier dessein, ou instrument authentique de quelque chose, & qui doit servir comme de modele ou d’exemple à être copié ou imité. Voyez Dessein, modele, &c.

Aujourd’hui l’on trouve à peine aucun titre ancien de possession, inféodation, &c. qui soit original ; ce ne sont que des vidimus, ou copies collationnées sur les originaux.

Original, s. m. (Gramm.) Voyez Originalité.

ORIGINAUX, écrits ; ce terme peut se prendre en différens sens. 1°. Pour le manuscrit authentique d’un ouvrage, tel qu’il est sorti des mains de son auteur. Ainsi, quoique nous ayons plusieurs manuscrits de la bible, on ne peut pas assurer que nous en ayons les originaux : pour faire une copie exacte, il faut la collationner sur les originaux.

2°. On peut appeller écrits originaux ceux mêmes qui ayant été transcrits ou imprimés, l’ont été avec tant de fidélité qu’ils n’ont souffert aucune altération, changement, addition ou suppression de quelque partie. Pouvons-nous nous flatter d’avoir les originaux de Cicéron, de Tite-Live, après que d’habiles commentateurs ont tenté de restituer les leçons fautives, & d’éclaircir les passages obscurs, qu’il y reste encore beaucoup de lacunes ?

3°. On appelle écrits originaux, des pieces uniques dont on n’a jamais tiré de copies. Ainsi l’on rapporte que les originaux du procès de Ravaillac furent brûlés avec ce régicide, par des raisons d’état sur lesquelles on a débité bien de fausses conjectures.

Original, se dit en Peinture, des choses d’après lesquelles on copie : on dit la nature est mon original, ce dessein, ce tableau, quoique copie, est mon original.

Original se dit encore d’un dessein, d’un tableau qu’un peintre fait d’imagination, de génie, quoique chacune de leurs parties soient copiées d’après nature. Peinture, tableau original, se prend en bonne & en mauvaise part ; en bonne, lorsque dans un tableau tout y est grand, singulierement nouveau ; & en mauvaise, lorsqu’on n’y rencontre qu’une singularité bisarrement grotesque. Les Peintres répétent quelquefois les mêmes sujets, & à peu près de la même façon, sans qu’aucune de ces répétitions soient appellées copies. On appelle encore original les estampes faites d’après des desseins ou des tableaux originaux. Il est très-difficile de distinguer les tableaux originaux d’avec de bonnes copies. Voyez Copies.

Originaux, en termes de l’Echiquier, signifient

les mémoires ou extraits que l’on envoie au bureau des secrétaires de la chancellerie.

Ils sont différens des actes enregistrés, qui contiennent les jugemens & plaidoyers des procès jugés par les barons.

ORIGINALITÉ, s. f. (Gramm.) maniere d’exécuter une chose commune, d’une maniere singuliere & distinguée : l’originalité est très-rare. La plupart des hommes ne sont en tous genres, que des copies les uns des autres. Le titre d’original se donne en bonne & en mauvaise part.

ORIGINE, s. f. (Gramm.) commencement, naissance, germe, principe de quelque chose. L’origine des plus grandes maisons a d’abord été fort obscure. Les pratiques religieuses de nos jours ont presque toutes leur origine dans le paganisme. Une mauvaise plaisanterie a été l’origine d’un traité fatal à la nation, & d’une guerre sanglante où plusieurs milliers d’hommes ont perdu la vie. Menage a écrit des origines de notre langue.

Origine, en Géométrie, se dit du point par lequel on commence à décrire une courbe, lorsqu’on la décrit par un mouvement continu. Voyez Décrire & Engendrer.

On appelle aussi assez souvent origine de la courbe son sommet, c’est à-dire le point A (fig. 11. analys.) où l’on suppose que commencent les ordonnées & les abscisses. Voyez Abscisse, Ordonnée, &c. (O)

ORIGINEL, adj. qu’on a d’origine : péché originel, est le crime qui nous rend coupables dès le moment de notre naissance, par imputation de la désobéissance d’Adam. Voyez Péché & Imputation.

La nature du péché originel est aussi difficile à sonder que son existence est facile à établir, selon la remarque de S. Augustin : eo nihil ad prædicandum notius, nihil ad intelligendum secretius. Aussi est il peu de questions sur laquelle les Théologiens aient été plus partagés.

Illyricus, un des centuriateurs de Magdebourg, a prétendu que le péché originel est une substance produite par le démon, & qui est imprimée à l’ame de chaque homme, à cause de la désobéissance du premier homme : sentiment qui approche du Manichéisme, & que d’ailleurs Illyricus ne prouve nullement.

On lit dans la confession d’Ausbourg, que le péché originel n’est autre chose que la corruption de notre nature, répandue dans toutes les parties de notre ame ; & que cette corruption qui exclut toute justice intérieure, se réduit à la concupiscence habituelle, qui se révolte sans cesse contre l’esprit, & qui sollicite continuellement au mal. Mais cette concupiscence est l’effet du péché d’Adam, & non pas le péché même d’Adam. Quoique mauvaise en elle-même, elle n’est criminelle aux yeux de Dieu que quand on acquiesce aux mauvais desirs qu’elle suggere, & qu’on en suit les impressions déréglées. Mais où est ce consentement libre & cet acquiescement dans les enfans ?

Henri de Gand, & Grégoire de Rimini, regardent le péché originel comme une qualité maladive qui a infecté la chair d’Adam en mangeant du fruit défendu, & qu’il a communiquée à ses descendans par la voie de la génération. Ce sentiment péche par les mêmes raisons que le précédent, & n’a d’ailleurs aucun fondement dans l’écriture ou dans les peres.

Saint Anselme a avancé que le péché originel est la privation de la justice qu’Adam avoit reçue de Dieu en sortant de ses mains, ou au moins quelques momens avant sa chute ; mais cette privation est la peine de la désobéissance d’Adam, elle en est la sui-