Aller au contenu

Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 12.djvu/954

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Quintilien, liv. IX. ch. iij. comprend cette figure au nombre de celles qu’il appelle per iterationem, & dit qu’elle se fait en plusieurs manieres. La chose n’est pas assez importante pour nous arrêter long-tems. J’observerai seulement qu’il parle d’une espece de polyptotes que Cécilius appelloit métabole, & qu’il appelle rerum conjunctarum diversitatem. C’est une figure qui paroît consister dans l’union de différentes choses, qui tendent toutes au même but, & qui malgré leur variété, servent à faire naître la même idée. Si l’on jette les yeux sur l’endroit de Quintilien, auquel je renvoie le lecteur, on verra que différentes figures portent le nom de polyptotes, & que les unes appartiennent aux pensées, les autres aux mots. On ne peut pas douter que les polyptotes lorsqu’ils sont figures de pensées, ne puissent contribuer au pathétique, puisqu’ils offrent la même idée sous différens points de vue, & l’on sent que la grande éloquence peut souvent en avoir besoin.

Pour les polyptotes qui ne sont que figures de mots, & qui font l’emploi d’un nom dans ses différens cas, ou d’un verbe dans les différens tems, à-moins qu’on ne s’en serve bien à-propos, & qu’ils ne soient soutenus du fond même des choses, je ne vois pas qu’ils puissent être d’un grand secours pour le pathétique. L’auteur de la Rhétorique à Hérennius, liv. IV. ch. xxiij. dit avec raison qu’ils diminuent la sévérité, la gravité, l’autorité du discours oratoire. D’où l’on peut conclure que l’usage de la plupart des figures de mots ne doit pas être fréquent. On va voir cependant par un seul exemple de Virgile, Enéid. liv. X. v. 355. que les polyptotes de ce genre ajoutent quelquefois à la force du discours, & servent même à faire image.

Expellere tendunt
Nunc hi, nunc illi : certatur limine in ipso
Ausoniæ. Magno discordes æthere venti
Prælia seu tollunt, animis & viribus æquis :
Nonipsi inter se, non nubila, non mare cedunt,
Anceps pugna diù : stant obnixu omnia contra.
Haud aliter trojanæ acies, aciesque latinæ
Concurrunt : hæret pede pes, densu sque viro vir
.

Voilà des polyptotes de mots heureusement mis en usage. Nunc hi, nunc illi ; trojanæ acies, aciesque latinæ ; pede pes, viro vir. (D. J.)

POLYREN, (Géog. anc.) ville de l’île de Crete, selon Etienne le géographe. Polybe, liv. IV. n°. 53. & 61. appelle les habitans Polyrrhenii. C’est la même ville qui est appellée Polyrrhenium par Pline, liv. IV. ch. xij. & Polyrrhenia par Ptolomée, liv. IV. ch. xvij.

POLYSPASTON, s. m. (Méch.) est le nom que Vitruve a donné à une machine composée de plusieurs poulies : on l’appelle aujourd’hui poulie multiple, ou mouffle. Voyez Poulie & Mouffle. Ce mot est formé des deux mots grecs πολὺ, beaucoup, & σπάω, je tire, parce que la poulie sert à tirer ; & que le polyspaston est un assemblage de plusieurs poulies.

Au reste, on appelle ainsi une machine composée de plus de quatre poulies ; car celles qui ont trois poulies s’appellent trispaston, celles de quatre tetraspaston, &c. (O)

POLYSCOPE, s. m. (Optiq.) verre qui multiplie les objets, c’est-à-dire, qui représente un objet aux yeux comme s’il y en avoit plusieurs. Il est aussi appellé verre à facettes & polyhedre. Voyez Polyhedre.

Ce mot vient des mots grecs σκέπτομαι, je vois, & πολὺ, beaucoup. Voyez aussi Polyoptre. Chambers.

POLYSPERMATIQUE, en Botanique, se dit de ces plantes qui ont plus de quatre semences qui viennent après que la fleur est passée, sans aucun ordre ou nombre certain. Voyez Plante. Ce mot vient du grec πολὺ & σπέρμα, semence.

M. Rai en fait une espece distincte d’herbes, & il

les appelle herbæ semine nudo polyspermæ ; où il entend par les mots semine nudo, des semences qui ne se dépouillent pas d’elles-mêmes des tégumens ou des enveloppes qu’elles ont, ou qu’elles paroissent avoir, mais qui tombent de la même plante toutes couvertes. Voyez Semence.

On subdivise les herbes polyspermatiques, 1°. en celles qui ont un calice ou périanthium, qui consiste premierement en trois feuilles & une fleur tripétale, tel que le plantain aquatique & la sagittaire, qui sont toutes deux des plantes aquatiques ; ou en fleur polypétale, & le calice qui tombe avec elle, comme la petite chélidoine ; ou qui reste après que la fleur est passée, comme dans l’hépatique mobile. Secondement, de cinq feuilles, qui dans quelques-unes tombent avec la feuille, comme dans la renoncule ; & dans d’autres sont permanentes, comme dans l’ellébore noire ferulacée ; ou annuelles, comme dans la fleur adonis. Troisiemement, de huit feuilles, comme la mauve & l’alcée. Quatriemement, de dix feuilles, comme la caryophille, la fragaria, le pentapsillum, la tormentille, l’argentine, la guimauve & la pentaphilloide.

2°. Celles qui n’ont point de calice ou de périanthium, comme la clematitis, la filipendule, l’ulmaire, l’anémone des forêts, la pulsatille, &c.

POLYSYLLABIQUES, adj. (Phys.) sont ceux qui répetent plusieurs syllabes ou plusieurs mots. Voyez Echo.

POLYSYNDETON, (Belles-Lettres.) figure de Rhétorique qui consiste à multiplier dans une même phrase les conjonctions copulatives ; comme dans celle-ci : me præ cæteris, & colit, & observat, & diligit. L’asyndeton est opposée à cette figure. Voyez Asyndeton.

POLYTHÉISME, s. m. (Métaphysiq.) le polythéisme est une opinion qui suppose la pluralité des dieux. Il est étonnant dans quels excès l’idolâtrie a précipité ses sectateurs. Lisez-en la description dans le discours de M. de Meaux sur l’Histoire universelle. « Tout étoit dieu, dit ce grand prélat, excepté Dieu lui-même, & le monde que Dieu avoit fait pour manifester sa puissance, sembloit être devenu un temple d’idoles. Le genre humain s’égara jusqu’à adorer ses vices & ses passions ; & il ne faut pas s’en étonner, il n’y avoit point de puissance plus inévitable ni plus tyrannique que la leur. L’homme accoutumé à croire divin tout ce qui étoit puissant, comme il se sentoit entraîné au vice par une force invincible, crut aisément que cette force étoit hors de lui, il s’en fit bien-tôt un dieu. C’est par-là que l’amour impudique eut tant d’autels, & que des impuretés qui font horreur, commencerent à être mêlées dans les sacrifices. La cruauté y entra en même tems. L’homme coupable qui étoit troublé par le sentiment de son crime, & regardoit la divinité comme ennemie, crut ne pouvoir l’appaiser par les victimes ordinaires. Il fallut verser le sang humain avec celui des bêtes. Une aveugle fureur poussoit les peres à immoler leurs enfans, & à les brûler à leurs dieux au lieu d’encens. Ces sacrifices étoient communs dès le tems de Moïse, & ne faisoient qu’une partie de ces horribles iniquités des Amorrhéens dont Dieu commit la vengeance aux Israélites. Mais ils n’étoient pas particuliers à ces peuples. On sait que dans tous les peuples du monde, sans en excepter aucun, les hommes ont sacrifié leurs semblables ; & il n’y a point eu d’endroits sur la terre où l’on n’en ait servi à ces tristes & affreuses divinités, dont la haine implacable pour le genre humain exigeoit de telles victimes. Au milieu de tant d’ignorances l’homme vint à adorer jusqu’à l’œuvre de ses mains. Il crut pouvoir renfermer l’esprit divin dans ses statues ; & il oublia si