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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 16.djvu/411

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plir un vaisseau percé, pour consommer tant d’eau. En un mot, ce châtiment fabuleux doit vraissemblablement son origine à quelque fait historique de cette nature. (D. J.)

TONNÉES, s. f. pl. (Mytholog.) fêtes qui se célébroient à Argos, selon Athénée. Elles consistoient en ce qu’on rapportoit en grande pompe la statue de Junon, en mémoire de ce qu’on l’avoit recouvrée sur les Thyrréniens, qui après l’avoir enlevée, l’avoient abandonnée sur le rivage. La statue dans cette solemnité, étoit environnée & comme garrotée de liens bien tendus, qu’on nommoit en grec τόνος du verbe τείνω, tendre, d’où cette fête a pris sa dénomination.

TONNEINS, (Géog. mod.) petite ville de France, dans l’Agénois, au diocèse d’Agen, à une lieue au-dessus de l’embouchure du Lot, dans la Garonne.

TONNELAGE, s. m. (Commerce.) les marchandises de tonnelage, sont les marchandises liquides qui s’entonnent dans des pipes, bariques, & autres telles futailles, comme les vins, les eaux-de-vie, les huiles, &c. ou qu’on encaisse dans les tonnes, tonneaux, ou autres caisses faites de douves, comme les sucres, les drogues, &c. (D. J.)

TONNELET, s. m. terme de Modes, c’est la partie inférieure d’un habit à la romaine, qui contient les lambrequins, ou pour m’expliquer plus clairement, ce sont 4, 6, 8, ou 12 lambrequins, à la maniere des anciens Romains : on s’en servoit dans les ballets, les opéras, & dans de certaines tragédies & comédies. Le tonnelet étoit de toile d’argent, couvert de dix grandes bandes de broderie d’or, & les manches de cet habit finissoient en campane. Ce mot s’est dit aussi dans les carrousels d’un bas de soie ou pourpoint plissé, enflé, & tourné en rond, avec un bas d’attache qui alloit jusque sous l’habit de fête. (D. J.)

TONNELIER, artisan qui fait, relie, & vend des tonneaux, c’est-à-dire toutes sortes de vaisseaux de bois, reliés de cerceaux avec de l’osier, & propres à contenir des liqueurs ou marchandises ; tels sont les tonnes, cuves, cuviers, muids, futailles, barrils, &c. Les tonneliers montent aussi & relient toutes sortes de cuves & autres vaisseaux reliés de cerceaux de fer. Ce sont encore eux qui descendent les vins, cidres, bieres, &c. dans les caves des bourgeois & des marchands de vin. Enfin il n’y a qu’eux qui aient droit de décharger sur les ports les vins qui arrivent par eau, & de les sortir des bateaux.

Les tonneliers forment à Paris une communauté nombreuse, & prennent la qualité de maîtres tonneliers déchargeurs de vins.

Leurs statuts sont fort anciens, & leur furent donnés sous le regne de Charles VII. Charles VIII. les augmenta, & François I. les confirma en 1538.

Ces statuts furent augmentés & dressés de nouveau en vingt-un articles, & confirmés en 1566, par Charles IX. on en ajouta deux autres sous Henri III. qui furent enregistrés en parlement en 1577.

Henri IV. en 1599, Louis XIII. en 1637, & Louis XIV. en 1651, leur donnerent aussi des lettres de confirmation, qui furent enregistrées au parlement, au châtelet, & à l’hôtel-de-ville.

Suivant ces statuts, la communauté doit être régie par quatre jurés, dont on en élit deux tous les ans ; ce sont eux qui font les visites, enregistrent les brevets, donnent le chef d’œuvre, & reçoivent les maîtres.

L’apprentissage est de six ans, après lequel l’aspirant doit faire chef-d’œuvre, pour être admis à la maîtrise.

Les tonneliers ne peuvent entreprendre aucun ouvrage de tonnellerie chez les bourgeois, que ce ne soit pour mettre le vin de leur cru.

Il n’y a que les tonneliers qui aient le droit de fabri-

quer & de louer des cuves à baigner, ou des cuviers

à faire lessive.

Les compagnons ne peuvent entrer chez aucun maître, qu’ils n’aient fini leur tems chez l’ancien maître.

Il est défendu aux tonneliers de faire aucune futailles, qu’elle ne soit de la jauge prescrite par l’ordonnance, suivant la qualité de la piece.

Les matieres que les tonneliers emploient dans les ouvrages de leur métier, sont des planches de chêne & de sapin pour les grandes cuves & les cuviers ; le mairrain pour les futailles ; les cerceaux, qui sont ordinairement de châtaigner, de fresne, ou de bouleau ; & enfin l’osier pour lier & arrêter les cerceaux.

Les outils dont se servent les tonneliers sont la jabloire, les planes plates, courbes, & rondes ; la bondonniere, le compas, la doloire, le barroir, le tiretoir, le maillet, la colombe, le chevalet, l’essette, le tranchet, le sergent ou le chien, la chienne, la serpe, le paroir, l’utinet, le bastissoir, la scie ordinaire, la scie à main, le rabot, le clouet, le compas ordinaire, & le barril à scier. Ils ont aussi le hacquet, le moulinet, & deux sortes de poulains pour descendre les vins en cave. Voyez tous ces différens instrumens, chacun à leurs articles.

Voici la maniere dont les tonneliers s’y prennent pour monter une futaille neuve. Quand leurs douves sont préparées, ils prennent le bâtissoir, y posent une douve en dedans qu’ils y assujettissent, en les serrant l’un & l’autre avec un compas ordinaire ; ensuite ils placent toutes les douves les unes après les autres, jusqu’à ce qu’ils aient garni tout le tour du bâtissoir ; cela fait, ils passent un cerceau qu’ils font glisser depuis le haut jusqu’en-bas des douves ; & si les douves ont trop de peine à se joindre par en-bas, ils font un feu de copeau par terre, en-dedans du tonneau, ce qui resserre le dedans des douves, & les dispose à se rapprocher ; dans cet état on glisse un cerceau jusqu’en-bas, pour contenir les douves & les empêcher de se désassembler : ensuite on en fait passer un autre plus serré afin de les approcher de plus en plus, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus aucun jour entre les douves ; cela fait, on fait entrer sur les douves une plus grande quantité de cerceaux, pour assujettir entierement la futaille : après quoi on fait avec la bondonniere le trou destiné à recevoir le bondon. La futaille ainsi montée, on plane & on pare avec les planes courbes & rondes, & avec le paroir, le dedans des douves, & on égalise des deux côtés les bords de ces douves avec l’Essette : cela fait on forme avec la jabloire une rainure appellée le jable, dans laquelle doivent entrer les pieces du fond : lorsque le jable est formé, on prend le compas de bois que l’on ouvre de six points, c’est-à-dire d’une ouverture qui répétée six fois, équivaudroit à la circonférence de l’ouverture du tonneau, à l’endroit du jable. Cette opération faite, on arrange les unes auprès des autres les douves destinées à faire le fond, & fixant une des pointes du compas à-peu-près au milieu, on trace un cercle avec l’autre pointe : cette ligne que trace le compas, marque la forme que doivent avoir ces douves : pour lors on les dégrossit avec la serpe, c’est-à-dire on en ôte le bois superflu ; mais comme il faut que les pieces du fond entrent dans le jable de plus d’une ligne, on diminue avec la plane le bord des douves du fond qui doit entrer dans le jable ; dans cet état, on met le fond au tonneau, en commençant par une des plus petites douves, & continuant de suite jusqu’à la derniere ; ensuite pour unir & arranger bien ces douves les unes auprès des autres, on frappe dessus avec l’utinet : cela fait, on acheve de garnir le tonneau de tous les cerceaux qu’il doit avoir. Il faut remarquer par rapport aux cer-