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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 16.djvu/452

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Bunel (Pierre), l’un des plus polis écrivains du seizieme siecle, se distingua par sa vertu, son desintéressement & sa science. Il mourut à Turin en 1545 à l’âge de 47 ans. On a des lettres latines de cet honnête homme, qui sont écrites avec la derniere pureté. Charles Etienne les imprima en 1551, & Henri Etienne, fort correctement, en 1581. L’édition de Toulouse 1687 est estimable par les notes de Graverol : mais le texte est rempli de fautes. On trouve à la bibliotheque du roi quelques lettres de Bunel, qui n’ont pas encore été imprimées.

Catel (Guillaume), conseiller au parlement de Toulouse, mort en 1726, s’est fait connoître par une histoire des comtes de Toulouse, & des mémoires du Languedoc.

Caseneuve (Pierre de), né en 1591, mort en 1652, a donné les origines ou étymologies françoises, qui sont à la suite du dictionnaire de Menage. Ses autres petits ouvrages sont dans l’oubli ; le P. Niceron a mis l’auteur parmi les hommes illustres ; mais le suivant Cujas étoit digne de ce titre.

Cujas (Jacques) Cujacius, le plus célebre jurisconsulte du xvj. siecle, naquit à Toulouse en 1520 de parens obscurs ; c’étoit un de ces génies rares & heureux, qui apprennent tout d’eux-mêmes, & qui l’enseignent merveilleusement aux autres. Toulouse ne connut point son mérite, elle lui préféra un indigne compétiteur pour la chaire de droit ; il se retira à Bourges, se fit adorer des étudians, & mourut dans cette ville en 1590, à l’âge de 70 ans. La meilleure édition des œuvres de ce grand jurisconsulte est celle de Fabrot, en 10 vol. in-fol. Papyre Masson a écrit sa vie.

Duranti (Jean Etienne), premier président au parlement de Toulouse, & l’un des plus savans magistrats de son siecle, est auteur de l’excellent livre intitulé de ritibus ecclesiæ. Il soutint avec zèle le parti de son roi contre la ligue, & fut tué d’un coup d’arquebuse dans une émeute populaire après la nouvelle de la mort du duc de Guise, le 10 Février 1589 à cinquante-cinq ans.

Faur, seigneur de Pibrac (Gui du), est trop connu par les charges qu’il a exercées avec gloire, pour donner ici sa vie. Il devint chancelier de la reine Marguerite de Navarre, femme d’Henri IV. & mourut à Paris le 27 Mai 1584, à 56 ans. On a de lui des plaidoyers, des harangues & des quatrains dont j’ai parlé ailleurs.

Faur (Pierre du), premier président au parlement de Toulouse, cultiva les lettres avec éclat, & mit au jour des ouvrages pleins d’érudition ; tels sont trois livres des semestres, celui des agonistiques, c’est-à-dire, des exercices & des jeux des anciens, & son traité des magistrats romains. Il mourut en 1600 d’apoplexie, en prononçant un arrêt à l’âge de soixante ans.

Ferrier (Arnould du), président au parlement de Paris, ensuite maître des requêtes, fut employé par Charles IX. à diverses ambassades, mourut en 1585 à 79 ans, & en faisant profession ouverte du protestantisme. Il harangua dans le concile de Trente, & s’exprima d’une maniere vigoureuse sur les abus de la cour de Rome. Il est très-vraissemblable que zélé pour la grandeur de la monarchie françoise, il forma le projet conjointement avec le chancelier de l’Hôpital, de couper le nœud qui attachoit le roi très-chrétien au saint siége, & d’assembler un concile national où le roi de France à l’imitation de celui d’Angleterre, fût déclaré chef de l’Eglise gallicane, & indépendant à tous égards du pontife romain.

Gouduli (Pierre), fit dans une langue provinciale qui n’eut jamais d’écrivains, en langage gascon, des vers où regne beaucoup de douceur, d’agrément, & qui ne sont dépourvus ni d’élégance, ni quelquefois

de fictions heureuses ; on les a imprimés plusieurs fois à Toulouse, & même en Hollande. Il mourut en 1649 à l’âge de 70 ans.

Maignan (Emmanuel), minime très-célebre. Il apprit les mathématiques sans maître, & devint professeur à Rome, où il y a toujours eu depuis en cette science un professeur minime françois. Ses ouvrages philosophiques n’ont plus de cours, mais son traité sur les horloges & les cadrans solaires, intitulé perspectiva horaria, Romæ 1648 in-fol. montre beaucoup d’habileté. Il inventa plusieurs machines qu’il avoit travaillées de ses propres mains. Il mourut dans son couvent de Toulouse en 1676, à 75 ans.

Maynard (François), poëte, disciple de Malherbe, & secrétaire de la reine Marguerite, naquit en 1582, & mourut en 1646.

« On peut le compter, dit M. de Voltaire, parmi ceux qui ont annoncé le siecle de Louis XIV. Il reste de lui un assez grand nombre de vers heureux, purement écrits. C’est un des auteurs qui s’est plaint le plus de la mauvaise fortune attachée aux talens. Il ignoroit que le succès d’un bon ouvrage, est la seule récompense digne d’un artiste ; que si les princes & les ministres veulent se faire honneur en récompensant cette espece de mérite, il y a plus d’honneur encore d’attendre ces faveurs sans les demander ; & que si un bon écrivain ambitionne la fortune, il doit la faire soi-même.

» Rien n’est plus connu que son beau sonnet pour le cardinal de Richelieu ; & cette réponse dure du ministre, ce mot cruel, rien. Le président Maynard retiré enfin à Aurillac, fit ces vers qui méritent autant d’être connus que son sonnet.

Par votre humeur le monde est gouverné,
Vos volontés font le calme & l’orage,
Vous vous riez de me voir confiné
Loin de la cour dans mon petit ménage :
Mais, n’est-ce rien que d’être tout à soi,
De n’avoir point le fardeau d’un emploi,
D’avoir dompté la crainte & l’espérance ?
Ah ! si le ciel, qui me traite si bien,
Avoit pitié de vous & de la France,
Votre bonheur seroit égal au mien.

» Depuis la mort du cardinal, il dit dans d’autres vers que le tyran est mort, & qu’il n’en est pas plus heureux. Si le cardinal lui avoit fait du bien, ce ministre eût été un dieu pour lui. Il n’est un tyran que parce qu’il ne lui donne rien. C’est trop ressembler à ces mendians qui appellent les passans, monseigneur, & qui les maudissent s’ils n’en reçoivent point d’aumône. Les vers de Maynard étoient fort beaux. Il eût été plus beau de passer sa vie sans demander & sans murmurer. L’épitaphe qu’il fit pour lui-même est dans la bouche de tout le monde ».

Las d’esperer & de me plaindre
Des muses, des grands & du sort,
C’est ici que j’attends la mort,
Sans la desirer, sans la craindre.

Les deux derniers vers sont la traduction de cet ancien vers latin,

Summum nec metuas diem, nec optes.

« La plûpart des beaux vers de morale sont des traductions. Il est bien commun de ne pas desirer la mort : il est bien rare de ne la pas craindre ; & il eût été grand de ne pas seulement songer s’il y a des grands au monde ».

Pin (Jean du), en latin Pinus, mourut vers l’an 1536. Il alla chercher en Italie la culture de l’éloquence, fut ensuite conseiller au parlement de Toulouse, & enfin évêque de Rieux. Il fit un traité de vitâ aulicâ, & un livre de claris fæminis, des femmes il-