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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 16.djvu/851

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Vase, s. f. (Archit. hydraul.) terrein marécageux & sans consistence. On ne peut fonder sur la vase sans pilorage ni grille.

Vase, (Orfévrerie.) les Orfevres travaillent à toutes sortes de vases, soit pour les églises, soit pour les particuliers ; il faut ici leur faire connoître le livre d’un italien fort curieux sur leur art, c’est celui de Jean Giadini ; il a publié à Rome en 1750, in-folio, des modeles de pieces d’orfévrerie propres à fournir des idées pour inventer, & faire toutes sortes de vases élégans, d’or, d’argent ou autre métal. Cet ouvrage contient cent planches gravées sur cuivre, & qui sont d’un fort beau dessein. (D. J.)

Vase, s. m. (Sculpt.) ornement de sculpture, isolé & creux, qui, posé sur un socle ou piédestal, sert pour décorer les bâtimens & les jardins. Il y en a de pierre, de fer, de plomb, de marbre, de bronze, &c. Les premiers servent d’amortissement. Les vases de fer sont employés pour décorer les jardins, de même que les vases de fayence. On peint les premiers d’une couleur à l’huile. On orne les parcs avec des vases de marbre, placés dans les endroits les plus apparens, & on réserve les vases de marbre précieux, tels que ceux de porphyre, d’agate, d’albâtre, &c. pour la décoration du-dedans. Enfin l’usage des vases de bronze, qui sont toujours de moyenne grandeur, est d’embellir les tablettes des terrasses.

Une figure gracieuse & variée, constitue la beauté des vases. On en trouvera des modeles dans l’essai d’Architecture historique de Fischer, l. IV. (D. J.)

Vase d’albatre, (Critique sacrée.) il est dit dans l’Evangile, Marth. xxvj. vers. 6 & 7. que Jesus-Christ étant à table à Béthanie, dans la maison de Simon le lépreux, Marie, sœur de Marthe & de Lazare, y oignit & répandit sur les piés du Sauveur un vase d’albâtre, plein d’un nard d’épic très-précieux. Ce vase d’albâtre étoit d’une sorte de marbre blanc, dans lequel on conservoit les essences. Pline, l. XXXVI. c. viij. dit que l’on trouvoit ces especes de pierres ou de marbres dans des carrieres aux environs de Thèbes, d’Egypte & de Damas, de Syrie ; on les façonnoit autour avec assez de facilité, parce que cette pierre n’étoit ni dure, ni cassante. On donna néanmoins le nom d’albâtre en général à tous les vases propres à contenir des liqueurs, de quelque matiere que ces vases fussent composés.

Quelques savans croient que le vase dont il est question dans l’Evangile, étoit de verre, parce que S. Marc dit que la femme qui répandit le parfum sur le Sauveur, brisa ce vase d’albatre ; mais cela ne prouve rien, parce qu’on peut casser un vase de pierre, comme un vase de verre : enfin, selon d’autres critiques, le mot alabastrum marque plutôt la forme que la matiere du vase, car souvent ce mot signifie un vase qui n’a point d’anse. (D. J.)

Vase de treillage, (Décorat. de jardin.) ornement à jour fait de verges de fer & de bois de boisseau, contourné selon un profil qui sert d’amortissement sur les portiques & cabinets de treillage. Les vases de cette espece les plus riches sont remplis de fleurs & de fruits qui imitent le naturel, & ont des ornemens pareils à ceux de sculpture. (D. J.)

Vases antiques, (Arts, Littérat. antiq.) les vases antiques peuvent se diviser en vases de sacrifices, vases funéraires, vases d’ornemens, d’architecture, vases de buffets & coupes, ou vases à boire : nous avons parlé de presque tous ces vases en particulier.

On commença par les faire de corne, de bois, de terre cuite, de pierre, de marbre, d’ivoire ; enfin on les fit de pierres précieuses, d’agate, de crystal, de porcelaine, on les incrusta d’or & d’argent, on y représenta toutes sortes de figures, & la beauté de l’exécution surpassa le prix de la matiere ; on en changea les formes à l’infini, & leurs formes se per-

fectionnerent au point que ces monumens nous donnent

aujourd’hui la plus grande idée du travail des anciens.

Athénée parle d’un vase sur lequel la prise de Troie étoit gravée, c’est-à-dire formoit un ornement en relief. On y lisoit le nom de l’artiste, il se nommoit Mus ; le nom de Parhasius, auteur de l’inscription qui s’y lisoit aussi, prouve que ce Parhasius comptoit vivre dans les tems à venir, en s’associant à un ouvrage estimé. Cicéron, dans la sixieme harangue contre Verrès, dit qu’un des fils d’Antiochus, dixieme roi de Syrie, aborda en Sicile, & que Verrès, qui en étoit préteur, trouva moyen de lui dérober plusieurs vases d’or enrichis de pierres précieuses, dont les rois, & principalement ceux de Syrie, étoient dans l’habitude de se servir ; mais, selon le même auteur, on en distinguoit un qui étoit d’une seule pierre, & qui avoit une anse d’or.

Un fragment d’Athénée nous apprend que Parménion mandoit à Alexandre, qu’il s’étoit trouvé parmi les dépouilles de Darius pour soixante-treize talens babyloniens & douze mines de vases d’or, & pour cinquante-six talens trente-six mines de vases enrichis de pierreries.

On sait que les poids babyloniens étoient d’un cinquieme plus forts que ceux de l’Attique ; ainsi en évaluant le talent attique à 4500 liv. de notre monnoie ou environ, le talent babylonien reviendroit à 5400 livres. Quelqu’étonnant que soit une pareille somme, qui doit monter à un peu plus de sept cens mille francs de notre monnoie, on ne seroit point étonné que cette somme fût peu forte, avec les idées que l’on a des richesses & du luxe des rois de Perse. Mais il en résulte toujours une preuve de la considération que l’on avoit pour ce genre d’ouvrage ; car il n’est pas douteux que les princes n’ont jamais rassemblé que les choses qui peuvent flatter leur vanité, & faire impression tout-à-la-fois sur leurs peuples & sur leurs voisins.

Quand Pline ne nous apprendroit pas en quel tems le goût des vases s’accrédita dans Rome, je ne crois pas qu’on eût été feuilleter les auteurs pour trouver de curiosités de ce genre dans le tems de la république. Entre le nombre des richesses dont Pompée embellit son troisieme triomphe, on voyoit des vases d’or en assez grande quantité pour en garnir neuf buffets. Je ne parlerai point ici des vases myrrhins qui ornoient le triomphe du même Pompée, & qu’il consacra à Jupiter capitolin, je réserve à ces vases un petit article à part.

M. de la Chausse, Pietro Santo-Bartoli, & autres antiquaires nous ont donné le dessein d’un grand nombre de vases, qui ont échappé aux outrages des tems. Le trésor de l’abbaye de S. Denis conserve en particulier trois vases antiques d’agate orientale, qui sont dignes de notre attention.

Le premier est une coupe ronde en forme de gobelet, évidée avec la plus grande exactitude, mais dont la cannelure qui fait l’ornement extérieur est exactement partagée & travaillée avec un soin qui sait admirer, malgré son apparente simplicité, la justesse & la précision de l’ouvrier.

Le second forme une coupe ovale, dont les bords sont très-peu relevés, & qui peut avoir sept à huit pouces dans sa longueur ; elle est admirable par le rapport que les cannelures tenues fort larges & d’un bon goût, dans leur proportion, ont de l’extérieur à l’intérieur : la dureté de la matiere, les outils que l’on peut employer, enfin la difficulté du travail donnent un grand prix à de pareils morceaux.

Mais le plus beau de tous, & peut-être un des plus singuliers qu’il y ait en Europe, est une coupe remarquable, sur-tout par le tems qu’il a fallu pour exécuter ses ances, & la quantité de ses ornemens en