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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 2.djvu/432

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la méthode qu’il faut suivre pour fabriquer des fonds d’or & d’argent qui soient parfaits. Reprenons maintenant les brocards.

La chaîne des brocards est de quarante-cinq portées doubles, & quinze portées de poil sur un peigne de quinze. L’armure pour le fond est la même que celle du gros de Tours, ainsi que pour le poil. On passe le premier coup de navette en faisant lever le poil & la chaîne en taffetas ou gros de Tours ; après quoi, on broche la dorure & la soie, en faisant baisser de suite une des deux lisses de poil qui aura baissé au coup du fond, & l’on continue de la premiere à la quatrieme ; d’où il arrive que le course des marches du fond n’étant composé que de deux grandes marches, il faut le répéter pour être d’accord avec les quatre de liage.

La dorure des brocards est presque toute liée par les découpures de la corde, afin d’imiter la broderie. Je dis toute : mais il en faut excepter le frisé, le clinquant, & la cannetille qui l’est même quelquefois.

On a imaginé depuis peu la façon de relever la principale dorure en bosse, tel que l’or lisse : on passe sous le lacs tiré de la dorure qu’on veut relever, une duite de quinze à vingt brins de soie de la couleur de la dorure, en faisant baisser les quatre lisses de poil pour la tenir arrêtée ; après quoi on laisse aller la marche, & on broche la dorure sans lier ; voilà pour le premier lacs. Au second lacs, on broche de même une grosse duite qui est la suite de la premiere, & on baisse les quatre lisses de poil. Comme cette duite est une espece d’accompagnage, on fait baisser toutes les lisses de liage, afin que la soie brochée ne transpire pas au-travers de la dorure, & qu’elle puisse former un grain assez gros pour faire relever la dorure, comme si elle étoit soûtenue par une cartisanne. Lorsque tout le broché est lié par la corde ou par la découpure, il ne faut plus que quatre marches ; savoir deux pour le coup de fond, & deux pour lier la soie qui releve la dorure ; & quand il y a du broché, il faut quatre marches de liage de plus.

Démonstration de l’armure d’un brocard, dont la dorure est relevée, sans liage ou liée par la corde.

Il faut observer 1.o que l’accompagnage étant gros, il ne se passe point avec la navette comme dans

les autres étoffes : mais on le broche en faisant baisser deux marches armées en taffetas, comme il est indiqué ici.

2.o Que toutes les étoffes dont la dorure est relevée, doivent être roulées sur des molletons, à mesure qu’elles viennent sur l’ensuple, afin que la dorure ne soit pas écrasée, & qu’elle fasse toûjours saillie ou relief : il faut autant de molleton que d’étoffe fabriquée.

Il se fait des brocards dont le poil est de quarante portées simples, pour l’accompagnage desquels on fait baisser tout le poil qui est de la couleur de la dorure : pour lors on peut brocher toutes sortes de couleurs pour relever ; parce que la quantité du poil baissé garnissant suffisamment, elle empêche la soie de couleur qui releve, de transpirer ou percer au-travers du poil.

Démonstration de l’armure d’un brocard, dont la dorure est relevée, & tous les lacs liés, excepté celui de la dorure relevée, qui ne l’est jamais.

Les marches d’accompagnage ne levent point de lisses, parce que l’accompagnage est broché, & non passé avec la navette, comme dans les autres étoffes où il n’a que trois ou quatre bouts très-fins, au lieu qu’ici il a dix-huit à vingt bouts de grosse soie.

On pourroit dans la derniere armure éviter les quatre marches qui font baisser tout le poil, en pressant les quatre de liage à la fois : mais l’embarras de trouver à chaque coup la marche qui doit lier à son tour, feroit commettre des fautes à l’ouvrier qui ne suivroit pas exactement son liage.

* BROCATELLE, s. f. (manufacture de soie.) étoffe composée d’une chaîne de soixante portées, & d’un poil de dix portées, avec cinq lisses de chaîne & trois lisses de poil : on employe la brocatelle en tapisserie. Le fond est tramé de fil, & le coup de tire, de soie : c’est la trame qui fait le fond, & c’est la chaîne qui fait la figure.

Brocatelle, (en Architecture.) Voyez Marbre de Brocatelle.

BROCHANT, adj. (terme de Blason.) il se dit des pieces qui passent sur d’autres, comme une face ou un chevron qui broche sur un lion : les chevrons de la Rochefoucault brochent sur des burelles.

La Rochefoucault en Angoumois, burelé d’argent & d’azur, à trois chevrons de gueules brochant sur le tout. (V)