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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 2.djvu/553

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fait près de la queue un trou d’une grandeur convenable, par lequel on verse de l’eau bouillante dans la calebasse pour macérer plus promptement la moelle ou pulpe dont elle est remplie.

Usages de la coque de ce fruit. Après que cette pulpe est bien macérée, on introduit dans la calebasse un petit bâton, pour rompre entierement cette pulpe & la faire sortir : ensuite on y met encore de l’eau chaude avec du gros sable, que l’on remue fortement pour achever de détacher ce qui peut rester de la calebasse, & en polir le dedans. Quand les calebasses sont ainsi nettoyées & séchées, le vin & les autres liqueurs qu’on y met s’y conservent parfaitement, & ne contractent point de mauvais goût. Lorsqu’on veut séparer une calebasse en deux parties pour en faire deux couis, qui sont propres à une infinité d’usages, on l’environne avec une petite corde que l’on serre fortement à l’endroit où on veut couper la calebasse ; & de cette maniere on la sépare en deux : mais il faut pour cela qu’elle ne soit ni trop seche, ni trop fraîchement cueillie. Etant ouverte, on la vuide facilement, on en gratte le dedans avec une coquille de moule ou autre, pour le polir.

Les Indiens polissent l’écorce du coui en-dedans & en-dehors, l’émaillent si agréablement avec du roucou, de l’indigo, & autres belles couleurs, que les délicats même peuvent boire & manger sans dégoût dans les divers vaisseaux qu’ils en forment. Ils dessinent & gravent sur la convexité, des compartimens & des grotesques à leur maniere. Ils remplissent les hachures de couleurs assorties, & leurs desseins sont aussi justes qu’on peut l’attendre de gens qui ne se servent ni de regle, ni de compas. Il y a des curieux qui recherchent ces sortes d’ouvrages, & qui ne les estiment pas indignes d’une place entre les raretés de leurs cabinets.

Ces couis sont d’un usage très-diversifié ; & quoiqu’ils ne soient que de bois, on ne laisse pas que de les employer à y faire chauffer de l’eau. Lorsqu’ils sont rompus, leurs pieces servent à faire des cuillieres : on en fait des écumoires & des passoires, en les perçant avec un petit fer rouge. C’est la vaisselle ordinaire & la batterie de cuisine, tant des Caraïbes que de nos Negres. En un mot le calebassier fournit tout seul la plus grande partie des petits meubles du ménage des Indiens & des habitans étrangers qui demeurent aux îles.

Usages de la pulpe. Mais la pulpe de la calebasse leur est encore plus précieuse que la coque : c’est-là leur grande panacée pour une infinité de maladies ou d’accidens. Dans toute espece de brûlure, ils en font une espece de cataplasme, qu’ils appliquent sur la partie brûlée ou échaudée ; ils renouvellent de tems en tems ce cataplasme, & le maintiennent par un bandage : ils suivent la même méthode pour guérir les maux de tête causés par des coups de soleil. Ils cuisent cette pulpe, ou la macerent dans des cendres chaudes ; & du suc qu’elle fournit, ils en composent des lavemens pour la colique. Ils l’employent encore comme un préservatif contre tout accident dans les chûtes considérables : pour cet effet, ils vont cueillir une calebasse presque mûre, la cuisent sous des cendres chaudes, l’ouvrent ensuite, expriment le suc de la moelle dans un vase, & le donnent à boire au malade. Ne nous moquons point ici de cette pratique ; cette boisson rafraîchissante vaut mieux en pareil cas que celle de l’infusion des herbes vulnéraires, que plusieurs de nos Medecins ordonnent, & que je trouve recommandées dans les Mémoires de l’Académie des Sciences.

Enfin les habitans de l’Amérique regardent la pulpe du coui comme souveraine pour arrêter les hémorrhagies causées par des blessures, pour prévenir des abcès, pour resoudre des tumeurs par contusion, pour empêcher les défaillances, &c. Les pauvres

gens sont excusables de croire à ce prétendu remede :

mais nos voyageurs Oviedo, Rochefort, du Tertre, Labat, & tant d’autres, ne se moquent-ils pas de nous quand ils nous vantent les merveilleux effets opérés par la moelle de calebasse dans les derniers cas dont nous venons de parler ?

Culture du calebassier en Europe. Quoique la pulpe de calebasse ni sa coque ne nous touchent guere en Europe par le peu d’utilité que nous en pouvons tirer, nous avons cependant poussé la curiosité jusqu’à chercher à élever dans nos climats le calebassier d’Amérique, & nous y avons réussi. En voici la méthode enseignée par Miller, & que tout le monde ne connoît pas.

Il faut tenir cet arbre dans un endroit de la serre dont le degré de chaleur soit modéré, par le moyen du thermometre. Il sembleroit qu’étant originaire des pays chauds, il auroit besoin d’une très-forte chaleur : mais on a trouvé par expérience, que la chaleur tempérée lui est beaucoup plus avantageuse. Il demande une terre légere, sablonneuse, de fréquens arrosemens, & beaucoup d’air en été ; autrement il arrive que ses feuilles sont mangées d’insectes, ce qui le défigure étrangement & retarde sa pousse. Il n’y a d’autres moyens de prevenir ce mal ou d’y remédier, que de nettoyer soigneusement les feuilles avec une guenille de laine, de mettre l’arbre en été à un plus grand air, & en hyver dans un endroit plus frais.

On multipliera le calebassier en plantant pendant l’été de ses rejettons dans des pots garnis de bonne terre, & en plongeant ces pots dans un lit de tan d’une chaleur modérée, observant de les arroser & de les abrier pendant le chaud du jour, jusqu’à ce que les rejettons ayent pris racine. Les graines de cet arbre, si on les apporte fraîches dans le fruit même, viendront à merveille en les semant sur des couches chaudes, & en les cultivant comme des ananas. Le calebassier vient mieux de bouture que de graine, & porte bien plûtôt. On en transplante même en Amérique de très-grands & gros, d’un lieu à un autre, avec succès, sans qu’ils en reçoivent le moindre dommage.

De la calebasse d’herbe d’Amérique. Je n’entrerai dans aucun détail sur une autre espece de calebasse commune en Amérique, très-grosse, longue, qu’on seme chaque année, & que les François de nos îles nomment calebasse d’herbe. Ces sortes de calebasses ne sont autre chose que la gourde européenne, plante cucurbitacée dont la racine branchue périt toutes les années, & dont la graine a été portée de l’Europe dans le nouveau monde. Leur écorce ou coque est beaucoup plus épaisse que celle des calebasses d’arbres, mais beaucoup moins durable, parce qu’elle est molle & spongieuse : ce qui fait encore qu’elles contractent aisément un mauvais goût, & qu’elles gâtent ce qu’on y met.

Les curieux trouveront toutes sortes de détails sur le calebassier d’Amérique dans le recueil général des voyages, Oviedo, Marcgrave, du Tertre, Rochefort, Labat, Plumier, & Miller. Cet article est de M. le Chevalier de Jaucourt.

CALEBEG ou KILBEG, (Géog.) petite ville d’Irlande dans la province d’Ulster, au comté de Dunnegal.

CALEÇONNIER, s. m. Les maîtres Peaussiers-Teinturiers en cuir prennent la qualité de Caleçonniers, parce que leurs statuts leur donnent pouvoir de passer les cuirs propres à faire des caleçons, qu’ils peuvent aussi fabriquer & vendre dans leurs boutiques. Voyez Peaussier.

CALECOULON, (Géog.) petit royaume d’Asie dans l’Inde, sur la côte de Malabar.

CALEDONIEN, (Océan) Géog. anc. & mod.