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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 3.djvu/417

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au haut de la partie circulaire d’une des planches A, sert à fixer la machine fermée ; l’autre, placé sous l’arrête du prolongement de la même planche A, sert à fixer la machine ouverte.

Deux petits pitons I, faits avec du fil-d’archal, placés au même endroit de l’autre planche A, servent à recevoir les crochets H.

Enfin quatre petites plaques de cuivre mince L, d’environ deux lignes de large sur sept à huit de long, servent à attacher librement les deux moitiés de cette machine.

Construction de la machine. Les deux planches A, posées de champ, reçoivent dans leurs mortaises les tenons de la planche B, qui est posée horisontalement, & arrêtée avec de la colle forte.

Des trous pratiqués dans les planches A, au haut de la partie circulaire, sur la même ligne que les mortaises, reçoivent les pointes de l’axe du rouleau C, qui se trouve ainsi place à côté de la planche B, à deux lignes de distance, & excédant son niveau d’une ligne.

Un autre trou pratiqué au milieu de la partie circulaire de l’une des planches A, reçoit la pointe de l’axe du rouleau D ; & un pareil trou, semblablement pratiqué au centre de l’autre planche A, est traversé par le bout du fil d’archal F, qui fait l’axe de la manivelle, & termine celui du même rouleau D, ce qui forme la moitié de la machine : l’autre se construit de la même maniere, & tous deux sont assemblés par le moyen des plaques L, clouées deux-à-deux, l’une en-dedans, & l’autre en-dehors du bord supérieur du prolongement des planches A, avec deux petits clous qui traversent les planches, & sont rivés des deux côtés, de maniere cependant que ces petites plaques puissent se mouvoir sur ces clous qui leur servent d’axes. On a arrondi l’angle supérieur des planches A, pour que les deux moitiés puissent se plier l’une sur l’autre, quand on veut fermer la machine.

Les deux extrémités de la carte chronographique sont collées sur les rouleaux D, autour desquels elles forment leurs circonvolutions, de sorte qu’en tournant une des manivelles, on a toute la facilité possible de faire passer alternativement la carte entiere d’un rouleau sur l’autre. Les rouleaux C, en tournant sur leurs axes, diminuent le frottement de la carte, & en facilitent le jeu. Les planches B servent de table pour étaler sous les yeux une portion de la carte comprenant au moins cent quarante ans. Un carton de grandeur convenable, attaché tout-autour de la bordure de la partie circulaire des planches A, forme à chacun des rouleaux D, une enveloppe cylindrique qui sert à conserver la carte ; & ce carton, replié sur lui-même à son extrémité supérieure, à un pouce de distance des rouleaux C, renferme une petite verge de fer clouée par ses deux bouts sur le bord des planches A, & lui donne de la solidité.

Cette machine étant pliée sur elle-même & fermée, la carte se trouve à couvert de toutes parts, & fort en sureté.

L’auteur de cette machine est M. Barbeu du Bourg, docteur en Medecine, & professeur de Pharmacie dans l’université de Paris. On verra bien par le prix qu’il a mis à son invention, que l’utilité publique a été son principal motif. La carte est de trente-cinq feuilles gravées. Afin d’encourager les gens de lettres à l’aider dans le degré de perfection auquel il se propose de porter sa carte, il offre de donner un exemplaire gratis à toutes personnes tenant un rang dans la république des lettres, tels qu’auteurs, académiciens, docteurs, journalistes, professeurs, bibliothéquaires, principaux de collége, préfets, &c. qui daigneront lui en rendre un premier avec les remar-

ques, avis, corrections, observations, & autres ratures

dont ils l’auront chargé.

CHRONOMETRE, s. m. (Musique.) nom générique pour marquer les instrumens qui servent à mesurer le tems. Ce mot est composé de χρόνος, tems, & de μέτρον, mesure.

On dit en ce sens que les montres, les horloges, &c. sont des chronometres. Voyez plus bas.

Il y a néanmoins quelques instrumens qu’on a appellés en particulier chronometres, & nommément un que M. Sauveur décrit dans ses principes d’Acoustique. C’étoit un pendule particulier qu’il destinoit à déterminer exactement les mouvemens en Musique. Laffilard, dans ses principes dédies aux Dames religieuses, avoit mis à la tête de tous les airs des chiffres qui exprimoient le nombre des vibrations de ce pendule pendant la durée de chaque mesure.

Il y a une douzaine d’années qu’on vit reparoître le projet d’un instrument semblable, sous le nom de métrometre, qui battoit la mesure tout seul ; mais tout cela n’a pas réussi. Plusieurs prétendent cependant qu’il seroit fort à souhaiter qu’on eût un tel instrument pour déterminer le tems de chaque mesure dans une piece de Musique. On conserveroit par ce moyen plus facilement le vrai mouvement des airs, sans lequel ils perdent toûjours de leur prix, & qu’on ne peut connoître après la mort des auteurs que par une espece de tradition fort sujette à s’effacer. On se plaint déjà que nous avons oublié le mouvement d’un grand nombre d’airs de Lulli. Si l’on eût pris la précaution dont je parle, & à laquelle on ne voit pas d’inconvéniens, on entendroit aujourd’hui ces mêmes airs tels que l’auteur les faisoit exécuter.

A cela, les connoisseurs en Musique ne demeurent pas sans réponse, Ils objecteront, dit M. Diderot (Mémoires sur différens sujets de Math.) qu’il n’y a peut-être pas dans un air quatre mesures qui soient exactement de la même durée, deux choses contribuant nécessairement à ralentir les unes & à précipiter les autres, le goût & l’harmonie dans les pieces à plusieurs parties, le goût & le pressentiment de l’harmonie dans les solo. Un musicien qui sait son art, n’a pas joüé quatre mesures d’un air, qu’il en saisit le caractere & qu’il s’y abandonne. Il n’y a que le plaisir de l’harmonie qui le suspend ; il veut ici que les accords soient frappés ; là qu’ils soient dérobés, c’est-à-dire qu’il chante ou joue plus ou moins lentement d’une mesure à une autre, & même d’un tems & d’un quart de tems à celui qui le suit.

A la vérité cette objection qui est d’une grande force pour la Musique Françoise, n’en auroit aucune pour la Musique Italienne, soûmise irrémissiblement à la plus exacte mesure : rien même ne montre mieux l’opposition parfaite de ces deux sortes de Musiques ; car si la Musique Italienne tire son énergie de cet asservissement à la rigueur de la mesure, la Françoise met toute la sienne à maîtriser à son gré cette même mesure, à la presser & à la ralentir selon que l’exige le goût du chant, ou le dégré de flexibilité des organes du chanteur.

Mais quand on admettroit l’utilité d’un chronometre, il faut toûjours, continue M. Diderot, commencer par rejetter tous ceux qu’on a proposés jusqu’à présent, parce qu’on y a fait du Musicien & du chronemetre deux machines distinctes, dont l’une ne peut jamais assujettir l’autre. Cela n’a presque pas besoin d’être démontré : il n’est pas possible que le musicien ait pendant toute sa piece l’œil au mouvement ou l’oreille au bruit du pendule ; & s’il s’oublie un moment, adieu le frein qu’on a prétendu lui donner.

J’ajoûterai que quelque instrument qu’on pût trouver pour regler la durée de la mesure, il seroit impossible, quand même l’exécution en seroit de la derniere facilité, qu’il fût admis dans la pratique. Les