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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 3.djvu/528

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trouver quelque expédient qui liât les couleurs, & les rendît continues pour l’œil ; sinon, dans les airs d’un mouvement extrèmement vif, l’œil ne sachant quel intervalle de couleurs on va faire, ignorera, après avoir vû un ton, où il doit se porter pour appercevoir le ton suivant, & ne saisira dans une batterie de couleurs que quelques notes éparses de tout un air coloré ; ou se tourmentera si fort pour les saisir toutes, qu’il en aura bien-tôt la brelue ; & adieu la mélodie & l’harmonie. On pourroit encore ajoûter que quand on les saisiroit, il ne seroit pas possible qu’on les retînt jamais, & qu’on eût la mémoire d’un air de couleurs, comme on a celle d’un air de sons.

Il semble que les couleurs d’un clavecin oculaire devroient être placées sur une seule bande étroite, verticale, & parallele à la hauteur du corps du musicien ; au lieu que les cordes d’un clavecin auriculaire sont placées dans un plan horisontal & parallele à la largeur du corps du musicien auriculaire.

Au reste, je ne prétens point donner à cette objection plus de valeur qu’elle n’en a : pour la résoudre, il ne faut que la plus petite partie de la sagacité que l’invention du clavecin oculaire suppose.

On ne peut imaginer une pareille machine sans être très-versé en Musique & en Optique ; on ne peut l’exécuter avec succès sans être un rare machiniste.

Le célebre P. Castel Jésuite en est l’inventeur ; il l’annonça en 1725. La facture de cet instrument est si extraordinaire, qu’il n’y a que le public peu éclairé qui puisse se plaindre qu’il se fasse toûjours & qu’il ne s’acheve point.

* CLAVETTE, s. f. (Arts méch.) c’est communément un morceau de fer plat, plus large par un bout que par l’autre, en forme de coin, que l’on insere dans l’ouverture d’un boulon en cheville de fer pour le fixer. Il arrive quelquefois à la clavette d’être fendue en deux par son bout étroit ; alors on écarte ces deux parties dont la divergence empêche la clavette de sortir de l’ouverture du boulon : quelquefois ce coin plat étant fait d’un morceau de fer mince, replié en double sur lui-même, le bout étroit n’a pas besoin d’être fendu pour arrêter la clavette ; il suffit d’écarter par le petit bout les deux lames de fer, qui appliquées l’une sur l’autre forment le corps même de la clavette. Les clavettes sont employées dans une infinité d’occasions : les Tourneurs en fer donnent ce nom, & aux coins de fer qui servent à serrer les poupées & les supports sur les jumelles du tour, & aux chevilles de fer qui fixent les canons sur la verge quarrée de l’arbre du tour en ovale, & aux chevilles en bois ou aux fiches de fer qu’ils placent de distance en distance sur la barre d’appui. V. Tour. Les clavettes étant des parties de machines en fer, c’est un ouvrage de Serrurerie : on en trouvera dans nos Planches, tant de Serrurerie que d’autres Arts. Voyez ces Planches & leur explication.

CLAVICULE, s. f. terme d’Anatomie, est le nom de deux os situés à la base du cou & au haut de la poitrine. Voyez les Pl. d’Anat. (Ostéol.) voyez aussi les articles Cou, Thorax, &c.

Elles sont un peu courbées à chaque bout, mais en sens opposés, en sorte qu’elles ressemblent à-peu-près à une S qui seroit couchée. On les a appellées clavicules, parce qu’elles sont comme les clés du thorax.

Leur substance interne est spongieuse, ce qui fait qu’elles cassent aisément. Elles se joignent d’un bout par synchondrose à l’apophyse acromion de l’omoplate, & de l’autre par arthrodie à un sinus situé à droite & à gauche de la partie supérieure du sternum.

Leur usage est de tenir les omoplates fixes & arrêtées dans le même endroit, & d’empêcher qu’elles ne glissent trop en-devant vers la poitrine.

On a remarqué depuis long-tems que dans les hommes les clavicules sont communément plus courbées que dans les femmes, c’est pourquoi ils ont le mouvement des bras plus libre ; les femmes au contraire en qui ces os sont plus droits, ont la gorge plus belle, plus élevée, & moins remplie de fosses.

Toute sortes d’animaux n’ont pas des clavicules ; il n’y a que ceux qui se servent de leurs piés de devant comme nous faisons de nos mains, qui en aient : tels sont les singes, les rats, les écureuils, & autres.

L’usage des clavicules est d’affermir les omoplates dans leur situation naturelle, & par conséquent de tenir les bras écartés : elles empêchent donc que les omoplates ne tombent trop en devant avec les bras ; de-là vient que la poitrine est plus large dans l’homme que dans les autres animaux.

Comme les clavicules ne sont recouvertes que de simples tégumens, elles sont fort sujettes à se fracturer par la violente impression des causes extérieures ; & après la réduction faite, il est très-difficile que les pieces de l’os réduit demeurent dans la situation où on les a mises, le moindre mouvement du bras étant capable de les déranger : il reste toûjours à l’endroit de la fracture un calus plus ou moins difforme, malgré toutes les machines qu’ont pû inventer les plus habiles chirurgiens pour tenir ces os fracturés dans un parfait repos après leur réduction. Quand donc cette fracture arrive à des femmes curieuses de la beauté de leur gorge, cette réduction n’est presque jamais trop honorable au chirurgien : aussi ne néglige-t-il guere alors d’avertir de la difformité qui peut en résulter, avant que d’entreprendre de la remettre.

Les clavicules sont encore exposées aux luxations, mais rarement, à cause de la force de leurs ligamens : la cure sera d’autant plus difficile qu’on différera la réduction ; car les luxations des clavicules sont presque toûjours incurables, quand elles sont une fois invétérées : la réussite dépend des bandages, qu’il faut appliquer avec tout le soin possible, après avoir réuni les parties disloquées dans leur situation naturelle. Galien s’est une fois démis la clavicule en luttant, & les deux os se réunirent par un bandage qu’il porta pendant quarante jours. Art. de M. le Chevalier de Jaucourt.

CLAVIER, s. m. (Luth.) c’est la partie d’un orgue sur laquelle l’organiste posant ses doigts ouvre les soûpapes, qui étant ouvertes laissent aller le vent aux tuyaux. C’est cet usage qui lui a fait donner le nom de clavier, comme étant composé de toutes les clés qui ouvrent le passage au vent qui fait parler les tuyaux.

Un clavier est composé de deux parties ; savoir, du chassis sur lequel les touches sont montées, & des touches. Le chassis AB, CD, (fig. 15.) est composé de trois barres de bois de chêne de deux pouces d’équarrissage, assemblées à tenons & mortaises ; la barre BC du fond doit avoir une rainure d’un demi-pouce de large, & avoir deux piés de long pour quatre octaves : s’il y a ravalement au clavier, on ajoûte une longueur convenable pour pouvoir placer les touches du ravalement. Les deux côtés AB, DC, du chassis doivent avoir au moins un pié & demi de long. Lorsque la place est commode, on ne risque rien de leur donner plus de longueur. A environ un demi-pié des extrémités A & D des côtés du chassis, on met une regle EF épaisse d’un demi-pouce, & large de deux, dans laquelle sont plantées des pointes de fil-de-fer. Cette piece qui est assemblée dans les côtés du chassis à queue d’aronde, s’appelle le guide. Ces pointes servent en effet à guider & à tenir libres & séparées les touches qui passent chacune entre deux pointes.