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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 4.djvu/1086

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il est sûr qu’elle ne donnera jamais trop peu, & voilà pourquoi on se contente de diviser les premiers chiffres du dividende par le premier du diviseur. Quand la division donne trop, comme dans ce cas-ci, où 8 seroit trop fort, & même 7, on diminuera successivement le quotient jusqu’à ce qu’il ne soit pas trop fort, ce qui arrivera en mettant 6 ; ce 6, comme nous l’avons vû, indique 60, & le produit 2814 est réellement 28140, qui est retranché de 32030 : il reste 389, qui est réellement 3890 ; & le 5 qu’on avoit mis à part, y étant ajoûté, il reste en tout 3895, qu’il faut actuellement diviser par 469 : on suivra pour cela les mêmes principes que ci-dessus, & on trouvera 8, qui font huit unités. Ainsi on voit que toutes les opérations qu’on fait dans la division, ne sont autre chose que les opérations qu’on vient d’expliquer, & qui y sont faites d’une maniere abregée ; car la division faite tout au long & avec tout le développement nécessaire, seroit

32030 469
28140 60 ou six dixaines.
Reste 3890
Ajoût 5
3895 469
3752 8 unités.
Reste 143 Quotiens 60
8
68

Dans la division on fait implicitement toutes ces opérations, en écrivant moins de chiffres.

Quand on a pris dans le dividende autant de chiffres de gauche à droite qu’il y en a dans le diviseur, ou an chiffre de plus, si cela est nécessaire, on voit que le quotient doit contenir autant de chiffres, plus un, qu’il en reste dans le dividende. Cela est aisé à prouver ; car soit, par exemple 523032 à diviser par 469 : après avoir pris 523, qui a autant de chiffres que 469, il reste trois chiffres, 032 : or je dis que le quotient doit avoir trois chiffres plus un, ou quatre ; car il est clair que 523000 est plus de mille fois plus grand que 469, & moins de dix mille fois. En effet, 523000 est mille fois plus grand que 523, qui est plus grand que 469 ; & 523032 est plus petit que 469 pris dix mille fois, parce que 4690000 a un chiffre de plus. Donc le quotient doit contenir des mille, & point de dixaines de mille : donc il doit avoir quatre chiffres, ni plus ni moins. Si le dividende étoit 1523032, alors prenant 1523, qui a un chiffre de plus que 469, on trouveroit de même que le quotient avoit quatre chiffres, ni plus ni moins.

C’est pour cette raison que l’on met quelquefois au quotient, o. Par exemple, je suppose que l’on ait à diviser 416 par 2 ; je vois que le quotient peut contenir des centaines, des dixaines, & des unités. Je divise donc d’abord 4 par 2, suivant la regle, & j’ai 2 ; & le produit 4 étant retranché de 2, il reste 0 ; c’est-à-dire que j’ai divise 400 par 2, & j’ai eu 200 au produit : ce 2 marque donc des centaines. Je descends 1, ce qui est la même chose que si je prenois 10 à diviser par 2, en négligeant le 6 ; je vois que 10 ne peut pas contenir 2 des dixaines de fois : je mets donc 0 au quotient, tant pour indiquer que 2 ne se trouve aucune dixaine de fois dans 416, que pour conserver au 2, premier chiffre du quotient, la valeur de centaine. Ensuite je descends 6 & je l’ajoûte à 1, ce qui est la même chose que si je divisois 16 par 2 ; j’ai pour quotient 8, & le quotient total est 208. On doit, par cet exemple, voir en général pourquoi on met o au quotient, quelquefois même plusieurs fois de suite, comme il arriveroit si on divisoit 40016 par 2 ; le quotient seroit 20008.

Enfin il nous reste à expliquer pourquoi on ne met jamais au quotient plus de 9. Pour cela il suffit de

faire voir que jamais le diviseur n’est égal à dix fois la partie du dividende qu’on a prise ; ce qui est aisé à prouver. Car le diviseur pris dix fois, augmente d’un chiffre : or la partie du dividende qu’on a prise, est ou égale en nombre de chiffres au diviseur, ou d’un chiffre de plus. Dans le premier cas, il est visible qu’elle est plus petite que le diviseur pris dix fois, puisqu’elle a un chiffre de moins. Dans le second, le dividende diminué d’un chiffre vers la droite, est plus petit que le diviseur : donc le dividende avec ce chiffre rétabli, est plus petit que le diviseur pris dix fois.

En voilà ce me semble suffisamment pour faire entendre d’une maniere sensible les regles de la division, dont la plûpart des arithméticiens paroissent avoir négligé les démonstrations.

A l’égard des différentes manieres de faire la division, nous n’entrerons point ici dans ce détail, parce qu’à proprement parler elles reviennent toutes au même ; elles ne different qu’en ce que dans l’une le quotient, le diviseur & les produits sont placés d’une façon, & dans une autre d’une façon différente : on se dispense aussi quelquefois d’écrire les produits, & on fait la soustraction en formant le produit de mémoire. Ainsi dans l’exemple ci-dessus on peut n’écrire point les produits 2184 & 3752, & on fera sans cela la soustraction, qui donnera les nombres 389 & 143 : voici comme on s’y prend. On dit : 6 fois 9 font 54 ; qui de 13 ôte 4, reste 9 & retiens 5 : 6 fois 6 font 36, & 5 font 41 ; qui de 9 ôte 1, reste 8 & retiens 4 : 6 fois 4 font 24, & 4 font 28 ; qui de 31 ôte 28, reste 3 : & ainsi des autres. Cette maniere de faire la division sans écrire les produits, & en arrangeant les chiffres comme ci-dessus, s’appelle l’italienne abregée. Peu importe le nom qu’on lui donnera ; mais il est bon que les commençans, & ceux qui n’ont pas un usage très-familier du calcul, écrivent les produits, afin de ne se pas tromper.

Lorsque le dividende & le diviseur sont l’un & l’autre des nombres concrets, il faut distinguer si ce sont des nombres concrets de la même espece, ou de différentes especes.

Premier cas. Si on a, par exemple, des livres, des sous & des deniers à diviser par des livres, des sous & des deniers, il faut réduire le dividende & le diviseur en deniers, c’est-à-dire dans la plus petite monnoie : si le diviseur ne contenoit pas de deniers, & que le dividende en contint, il faudroit toûjours réduire l’un & l’autre en deniers ; le quotient indiqueroit combien le diviseur est contenu dans le dividende. En effet, si on avoit, par exemple, 1 livre à diviser par 12 deniers, c’est-à-dire si on vouloit savoir combien de fois 12 deniers sont dans 1 livre, il faudroit réduire 1 livre en 240 deniers pour avoir le quotient 20, & ainsi du reste.

Second cas. Soit proposé de diviser, par exemple, 7 toises 2 piés par 1 livre 2 sous. Voilà un dividende & un diviseur qui sont des nombres concrets de différentes especes. Voyons d’abord ce que signifie cette question. Si j’avois 60 toises à diviser par 10 sous, le quotient de 60 divisé par 10, c’est à-dire 6, m’indiqueroit que 6 toises valent 1 sou, c’est-à-dire que 6 toises d’ouvrage ou de marchandise valent 1 sou ; or 7 toises 2 piés sont 44 piés, & 1 livre 2 sous font 22 sous : donc divisant 44 par 22, je vois que 2 piés d’ouvrage valent 1 sou : & ainsi du reste.

A l’égard de la division algébrique, elle n’a aucune difficulté, elle porte avec elle sa démonstration ; il y en a des exemples plus compliqués, qu’on peut voir dans les auteurs d’Algebre ordinaire. Il faut avoir soin de bien arranger les termes du dividende & du diviseur suivant les dimensions d’une même lettre ; car c’est de-là que dépend la facilité & même la possibilité de l’opération : car si on écri-