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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 4.djvu/518

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faut-il pas réduire à une les deux combinaisons qui donnent croix au premier coup ? Car dès qu’une fois croix est venu, le jeu est fini, & le second coup est compté pour rien. Ainsi il n’y a proprement que trois combinaisons de possibles :

Croix, premier coup.
Pile, croix, premier & second coup.
Pile, pile, premier & second coup.


Donc il n’y a que 2 contre 1 à parier. De même dans le cas de trois coups, on trouvera

Croix.
Pile, croix.
Pile, pile, croix.
Pile, pile, pile.

Donc il n’y a que 3 contre 1 à parier : ceci est digne, ce me semble, de l’attention des Calculateurs, & iroit à réformer bien des regles unanimement reçûes sur les jeux de hasard.

Autre question. Pierre joüe contre Paul à cette condition, que si Pierre amene croix du premier coup, il payera un écu à Paul ; s’il n’amene croix qu’au second coup, deux écus ; si au troisieme coup, quatre, & ainsi de suite. On trouve par les regles ordinaires (en suivant le principe que nous venons de poser), que l’espérance de Paul, & par conséquent ce qu’il doit mettre au jeu est quantité qui se trouve infinie. Cependant il n’y a personne qui voulût mettre à ce jeu une somme un peu considérable. On peut voir dans les mémoires de l’académie de Petersbourg, tome V. quelques tentatives pour résoudre cette difficulté ; mais nous ne savons si on en sera satisfait ; & il y a ici quelque scandale qui mérite bien d’occuper les Algébristes. Ce qui paroît surprenant dans la solution de ce problème, c’est la quantité infinie que l’on trouve pour l’espérance de Paul. Mais on remarquera que l’espérance de Paul doit être égale au risque de Pierre. Ainsi il ne s’agit que de savoir si le risque de Pierre est infini, c’est-à-dire (suivant la véritable notion d’infini) si ce risque est tel qu’on puisse toûjours le supposer plus grand qu’aucun nombre fini assignable. Or pour peu qu’on réfléchisse à la question, on verra que ce risque est tel en effet. Car ce risque augmente avec le nombre des coups, comme il est très-évident par le calcul. Or le nombre des coups peut aller & va en effet à l’infini, puisque par les conditions du jeu le nombre n’est pas fixé. Ainsi le nombre indéfini des coups est une des raisons qui font trouver ici le risque de Pierre infini. Voyez Absent & Probabilité.

Selon un très-savant géometre avec qui je raisonnois un jour sur cette matiere, l’espérance de Paul & son enjeu ne peut jamais être infini, parce que le bien de Pierre ne l’est pas ; & que si Pierre n’a, par exemple, que 220 écus de biens, il ne doit y avoir que 21 coups, après lesquels on doit cesser, parce que Pierre ne sera pas en état de payer. Ainsi le nombre des coups possibles est déterminé, fini, & égal à 21, & on trouvera que l’espérance de Paul est . Quoique cette somme ne soit plus infinie, je doute que jamais aucun joüeur voulût la donner. Ainsi cette solution, toute ingénieuse qu’elle est, ne paroît pas d’abord résoudre la difficulté. Cependant toutes choses bien examinées, il me semble qu’on doit en être satisfait. Car il ne s’agit pas ici de la peine ou de la facilité que Paul doit avoir à risquer la somme en question, il s’agit de ce qu’il doit donner pour joüer à jeu égal avec Pierre ; & il est certain que ce qu’il doit donner est la somme ci-dessus. Paul seroit un fou sans doute de la donner ; mais il ne le seroit, que parce que Pierre est un fou aussi de proposer un jeu où lui Pierre peut perdre en une

minute des sommes immenses. Or, pour joüer avec un fou à jeu égal, il faut se faire fou comme lui. Si Pierre joüant en un seul coup, parioit un million qu’il amenera pile, il faudroit que chacun mît au jeu un demi-million : cela est incontestable. Il n’y a pourtant que deux insensés qui pussent joüer un pareil jeu.

Nous remarquerons à cette occasion, que pour rendre plus complettes, & pour ainsi dire plus usuelles, les solutions de problèmes concernans les jeux, il seroit à souhaiter qu’on pût y faire entrer les considérations morales, relatives, soit à la fortune des joüeurs, soit à leur état, soit à leur situation, à leur force même (quand il s’agit des jeux de commerce), & ainsi du reste. Il est certain, par exemple, que de deux hommes inégalement riches qui joüent à jeu égal suivant les regles ordinaires, celui qui est le moins riche risque plus que l’autre. Mais toutes ces considérations étant presque impossibles à soûmettre au calcul à cause de la diversité des circonstances, on est obligé d’en faire abstraction, & de résoudre les problèmes mathématiquement, en supposant d’ailleurs les circonstances morales parfaitement égales de part & d’autre, ou en les négligeant totalement. Ce sont ensuite ces circonstances, quand on vient à y faire attention, qui font croire le calcul en faute, quoiqu’il n’y soit pas. Voyez Avantage, Jeu, Pari, &c. (O)

Croix, (Sainte.) Géog. île de l’Amérique septentrionale, l’une des Antilles.

Croix, (Sainte-) Géog. petite ville de France dans la haute Alsace.

CROKETHORN, (Géog.) petite ville d’Angleterre dans la province de Sommerset, sur la riviere de Perd.

CROLER, (Fauconn.) il se dit du bruit que font les oiseaux en se vuidant par bas. Quand un oiseau de proie crole, c’est en lui une marque de santé.

CROMARTYE, (Géog. mod.) petite ville de l’Ecosse septentrionale, dans la province de Ross.

CROMAU, (Géog.) ville du royaume de Bohême, près de Budweis.

CROMORNE, sub. m. (jeu d’Orgue.) sonne l’unisson du 8 piés. Voyez la table du rapport de l’étendue des jeux de l’Orgue. C’est un jeu d’anche dont le corps AB, fig. 47. Pl. d’Orgue, est partout du même diametre ou de forme cylindrique ; il est terminé par embas par une portion conique BC qu’on appelle la pointe, à l’extrémité de laquelle est soudée une noix garnie de son anche & de sa languette, que l’on accorde par le moyen de la rasette qui traverse la noix & vient appuyer dessus. Voyez Trompette, dont ce jeu ne differe que parce que le corps du tuyau est d’un bout à l’autre du même diametre.

L’anche, la noix, la rasette, & une partie de la pointe du tuyau, entrent dans la boîte DE, qui reçoit le vent du sommier par l’ouverture E pratiquée à son pié. Voyez Orgue, où la facture de ce jeu qui est d’étain est expliquée.

CRON ou CRAN, (Hist. nat. Minéral.) On nomme ainsi une terre ou un sable qui n’est formé que par un amas de fragmens de coquilles qui ont été réduites en poudre : cependant on y distingue presque toûjours de petites coquilles encore entieres ; mais ce n’est guere sans l’aide de la loupe ou du microscope. Quand ces coquilles sont dans un état de destruction encore plus grand, & que cette poudre a pris de la consistance, il y a lieu de croire que c’est elle qui forme la craie. Voyez l’article Craie.

Le cron est très-propre à fertiliser les terres ; on s’en sert dans plusieurs endroits avec autant de succès que de la marne. On le nomme falun dans de certaines provinces. (—)

CRONACH, (Géog. mod.) ville fortifiée d’Alle-