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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 4.djvu/59

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3°. Palatiales, g, j, c fort, ou k, ou q ; le mouillé fort ille, & le mouillé foible ye.

4°. Dentales ou sifflantes, s ou c doux, tel que se si ; z, ch ; c’est à cause de ce sifflement que les anciens ont appellé ces consonnes, semivocales, demi-voyelles ; au lieu qu’ils appelloient les autres muettes.

5°. Nazales, m, n, gn.

6°. Gutturales ; c’est le nom qu’on donne à celles qui sont prononcées avec une aspiration forte, & par un mouvement du fond de la trachée-artere. Ces aspirations fortes sont fréquentes en Orient & au Midi : il y a des lettres gutturales parmi les peuples du Nord. Ces lettres paroissent rudes à ceux qui n’y sont pas accouttumés. Nous n’avons de son guttural que le , qu’on appelle communément ache aspirée : cette aspiration est l’effet d’un mouvement particulier des parties internes de la trachée-artere ; nous ne l’articulons qu’avec les voyelles, le héros, la hauteur.

Les Grecs prononçoient certaines consonnes avec cette aspiration. Les Espagnols aspirent aussi leur j, leur g & leur x.

Il y a des Grammairiens qui mettent le h au rang des consonnes ; d’autres au contraire soutiennent que ce signe ne marquant aucun son particulier, analogue aux sons des autres consonnes, il ne doit être consideré que comme un signe d’aspiration.

Ils ajoutent que les Grecs ne l’ont point regardé autrement ; qu’ils ne l’ont point mis dans leur alphabet entant que signe d’aspiration, & que dans l’écriture ordinaire ils ne le marquent que comme les accents au-dessus des lettres ; & que si dans la suite il a passé dans l’alphabet latin, & de-là dans ceux des langues modernes, cela n’est arrivé que par l’indolence des copistes qui ont suivi le mouvement des doigts, & écrit de suite ce signe avec les autres lettres du mot, plûtôt que d’interrompre ce mouvement pour marquer l’aspiration au-dessus de la lettre.

Pour moi, je crois que puisque les uns & les autres de ces Grammairiens conviennent de la valeur de ce signe ; ils doivent se permettre réciproquement de l’appeller ou consonne ou signe d’aspiration, selon le point de vûe qui les affecte le plus.

Les lettres d’une même classe se changent facilement l’une pour l’autre ; par exemple, le b se change facilement ou en p, ou en v, ou en f ; parce que ces lettres étant produites par les mêmes organes, il suffit d’appuyer un peu plus ou un peu moins pour faire entendre ou l’une ou l’autre.

Le nombre des lettres n’est pas le même partout. Les Hébreux & les Grecs n’avoient point le le mouillé, ni le son du gn. Les Hébreux avoient le son du che, ש, schin : mais les Grecs ni les Latins ne l’avoient point. La diversité des climats cause des différences dans la prononciation des langues.

Il y a des peuples qui mettent en action certains organes, & même certaines parties des organes, dont les autres ne font point d’usage. Il y a aussi une forme ou maniere particuliere de faire agir les organes. De plus, en chaque nation, en chaque province, & même en chaque ville, on s’énonce avec une sorte de modulation particuliere, c’est ce qu’on appelle accent national ou accent provincial. On en contracte l’habitude par l’éducation ; & quand les esprits animaux ont pris une certaine route, il est bien difficile, malgré l’empire de l’ame, de leur en faire prendre une nouvelle. De-là vient aussi qu’il y a des peuples qui ne sauroient prononcer certaines lettres ; les Chinois ne connoissent ni le b, ni le d, ni le r ; en revanche ils ont des consonnes particulieres que nous n’avons point. Tous leurs mots sont monosyllabes, & commencent par une consonne &

jamais par une voyelle. Voyez la Grammaire Chinoise de M. Fourmont.

Les Allemans ne peuvent pas distinguer le z d’avec le s ; ils prononcent zele comme sel : ils ont de la peine à prononcer les l mouillés, ils disent file au lieu de fille. Ces l mouillés sont aussi fort difficiles à prononcer pour les personnes nées à Paris : elles le changent en un mouillé foible, & disent Versayes au lieu de Versailles, &c. Les Flamans ont bien de la peine à prononcer la consonne j. Il y a des peuples en Amérique qui ne peuvent point prononcer les lettres labiales b, p, f, m. La lettre th des Anglois est très-difficile à prononcer pour ceux qui ne sont point nés Anglois. Ces réflexions sont fort utiles pour rendre raison des changements arrivés à certains mots qui ont passé d’une langue dans une autre. Voyez la dissertation de M. Falconet, sur les principes de l’étymologie ; Histoire de l’Acad. des Belles-Lettres.

A l’égard du nombre de nos consonnes, si l’on ne compte que les sons & qu’on ne s’arrête point aux caracteres de notre alphabet, ni à l’usage souvent déraisonnable que l’on fait de ces caracteres, on trouvera que nous avons d’abord dix-huit consonnes, qui ont un son bien marqué, & auxquelles la qualification de consonne n’est point contestée.

Nous devrions donner un caractere propre, déterminé, unique & invariable à chacun de ces sons, ce que les Grecs ont fait exactement, conformément aux lumieres naturelles. Est-il en effet raisonnable que le même signe ait des destinations différentes dans le même genre, & que le même objet soit indiqué tantôt par un signe tantôt par un autre ?

Avant que d’entrer dans le compte de nos consonnes, je crois devoir faire une courte observation sur la maniere de les nommer.

Il y a cent ans que la Grammaire générale de P. R. proposa une maniere d’apprendre à lire facilement en toutes sortes de langues. I. part. chap. vj. Cette maniere consiste à nommer les consonnes par le son propre qu’elles ont dans les syllabes où elles se trouvent, en ajoûtant seulement à ce son propre celui de l’e muet, qui est l’effet de l’impulsion de l’air nécessaire pour faire entendre la consonne ; par exemple, si je veux nommer la lettre B que j’ai observée dans les mots Babylone, Bibus, &c. je l’appellerai be, comme on le prononce dans la derniere syllabe de tombe, ou dans la premiere de besoin.

Ainsi du d, que je nommerai de, comme on l’entend dans ronde ou dans demande.

Je ne dirai plus effe, je dirai fe, comme dans fera, étoffe ; je ne dirai plus elle, je dirai le ; enfin je ne dirai ni emme ni enne, je dirai me, comme dans aime, & ne, comme dans sone ou dans bonne, ainsi des autres.

Cette pratique facilite extrèmement la liaison des consonnes avec les voyelles pour en faire des syllabes, fe, a, fa, fe, re, i, fri, ensorte qu’épeler c’est lire. Cette méthode a été renouvellée de nos jours par MM. de Launay pere & fils, & par d’autres maîtres habiles : les mouvemens que M. Dumas s’est donnés pendant sa vie pour établir son bureau typographique, ont aussi beaucoup contribué à faire connoître cette dénomination, ensorte qu’elle est aujourd’hui pratiquée, même dans les petites écoles.

Voyons maintenant le nombre de nos consonnes ; je les joindrai, autant qu’il sera possible, à chacune de nos huit voyelles principales.

Figure de la Lettre. Nom de la Lettre. Exemples de chaque consonne avec chaque voyelle.
B, b, be. Babylone, béat, bi


Babylone, béat, biere,

Bonet, bule, bou


Bonet, bule, boule,

Beurre, be muet.


Beurre, bedeau.

C, c dur,


K, Q, q

que. Cadre ou quadre, karat ou carat, kalendes ou calendes, le Quénoi, qui, kiricle, coco, cure, le cou, queue, querir, querelle.
Note : pour ne pas compliquer inutilement la mise en page, la fin du tableau, présente sur la page suivante, a été reportée ici.