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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 4.djvu/592

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les autres années jusqu’à ce que le cycle entier de 19 ans fût achevé. Inst. astr. de M. le Monnier.

Pour déterminer les jours de la nouvelle ou de la pleine lune, on auroit pû s’y prendre comme les Juifs, qui n’ayant point d’autres regles que celles de l’observation, attendoient soigneusement que la lune fût à son lever héliaque, ou parût pour la premiere fois hors des rayons du soleil un peu après le coucher de cet astre ; & on auroit pû appeller ce jour-là le premier jour de la lune. Cependant au lieu de l’observation de la premiere phase du croissant, il auroit été beaucoup plus sûr (car c’est-là ce qu’on auroit pû pratiquer de plus exact) d’employer pour la disposition de ces nombres les tables astronomiques, en calculant pour chaque mois, & par conséquent pour chaque année du cycle lunaire, les nouvelles lunes, & marquant les caracteres ci-dessus vis-à-vis les jours auxquels on trouve qu’elles auroient dû arriver. Mais de quelque maniere qu’on s’y soit pris, il est certain que le mois lunaire astronomique étant de 29 jours 12h. 44′. 33″. comme le vulgaire ne sauroit distinguer ces petites quantités qui suivent le nombre de jours, on a été obligé de supposer alternativement les mois lunaires d’un certain nombre de jours entiers, comme de 30 & de 29 jours, dont ceux-ci se nomment caves ou simples, & ceux-là pleins, & cela pour satisfaire pleinement aux 29 jours 12 heures du mois astronomique. Enfin parce que, outre ces 29 jours & demi, nous avons encore 44, ou près de trois quarts d’heure de plus dans chaque lunaison ou mois lunaire, il doit s’ensuivre qu’au bout de 32 lunaisons la somme de ces minutes accumulées vaudra un jour entier. Ce jour doit donc s’ajoûter à un des mois simples ; & c’est ainsi que les lunaisons du calendrier peuvent s’accorder avec les lunaisons observées dans le ciel, ou déterminées par les tables astronomiques.

Présentement si le nombre du cycle lunaire est donné, on aura par le moyen du calendrier ecclésiastique les jours des nouvelles lunes pendant le reste de cette même année ; car dans chaque mois le nombre du cycle désignera la nouvelle lune, & la pleine lune doit être 14 jours après.

On croyoit anciennement, comme nous l’avons dit un peu plus haut, que le cycle de 19 ans comprenoit exactement 235 lunaisons ; & qu’après une révolution des années du cycle lunaire, les nouvelles lunes revenoient précisément aux mêmes jours & heures de chaque mois. Mais la chose bien examinée ne s’est pas trouvée véritable. Car dans l’espace de 19 années Juliennes il y a 6939 jours 18 heures ; & s’il est certain, selon les plus exactes observations des astronomes modernes, que chaque lunaison ou mois lunaire soit de 29j. 12h. 44′. 3″. il s’ensuit que 235 lunaisons répondroient à 6939j. 16h. 31′. 45″. Il n’est donc pas vrai de dire que 235 lunaisons répondent exactement à 19 années Juliennes ; mais il s’en faut environ une heure . Ainsi les nouvelles lunes, après 19 ans écoulés, n’arriveront pas précisément à la même heure qu’auparavant, mais environ une heure & demie plûtôt ; de maniere que dans l’espace de 304 ans les nouvelles lunes anticiperont d’un jour dans l’année Julienne. Donc le cycle lunaire suffit seulement pour marquer assez bien les nouvelles lunes dans l’espace de 300 ans, & selon d’autres, d’environ 312 (cette différence venant de la grandeur du mois lunaire, sur laquelle les Astronomes ne sont pas parfaitement d’accord). Pendant ces 300 ans l’erreur ne montera pas à plus d’un jour ou 24 heures. Mais après 300 ans, il faudra nécessairement réformer le cycle. Voyez l’article Proemptose.

Au reste il ne faut pas confondre le cycle lunaire de Methon avec la période ou saros Chaldaïque qui

ne contient que 223 lunaisons. Cette période ou saros étant de 18 ans & environ 11 jours, ramene les éclipses à-peu-près dans les mêmes points soit du ciel, soit de l’argument annuel ; au lieu qu’il s’en faut bien que les pleines lunes qui arrivent aux mêmes jours tous les 19 ans, se retrouvent dans une position semblable, tant à l’égard du nœud que de l’anomalie moyenne, le lieu de l’apogée de la lune étant d’ailleurs dirigé bien différemment à l’égard de la ligne qui doit passer par le soleil. Instit. astronom. de M. le Monnier.

L’usage du cycle de 19 ans dans l’ancien calendrier est d’apprendre par le moyen de la nouvelle lune de chaque mois le jour où doit par conséquent tomber pâques. Car la fête de pâques doit se célébrer le dimanche d’après la pleine lune qui suit ou qui tombe sur l’équinoxe du printems fixé au 21 de Mars. Voy. Pasques. Dans le nouveau calendrier, l’usage du cycle lunaire se borne à faire trouver les épactes. Voy. Epacte.

Les Orientaux commencerent à se servir de ce cycle au tems du concile de Nicée, & ils prirent pour la premiere année du cycle, celle où la nouvelle lune pascale tomboit au 23 de Mars ; de sorte que le cycle lunaire III tombe au premier Janvier de la troisieme année.

Au contraire les Occidentaux mirent le nombre I au premier Janvier, ce qui produisit une différence très-considérable dans le tems de la pâques pour l’Orient & pour l’Occident ; aussi Denis le Petit cherchant à dresser un nouveau calendrier, persuada aux chrétiens d’Occident d’anéantir cette différence, & de suivre la pratique de l’église d’Alexandrie.

On forma donc une table générale par laquelle on trouvoit facilement les nouvelles lunes pour chaque année, & qui servit par toute l’Eglise chrétienne Cette table avoit le nombre III au premier Janvier, & elle étoit construite du reste selon la méthode que nous avons exposée ci-dessus. On peut la voir dans le tome IV. des élémens de Mathématiques de M. Wolf. De sorte que quand on avoit trouvé le nombre du cycle lunaire pour une année, on trouvoit vis-à-vis de ce nombre dans la table ou calendrier les jours des nouvelles lunes pour toute cette année.

Lorsque les peres du concile de Nicée résolurent d’adopter dans leur calendrier le cycle de 19 ans, ce cycle marquoit pour lors assez bien les nouvelles lunes, ce qui se continuoit à-peu-près de même pendant quelques centaines d’années. Mais depuis, comme les lunaisons ont anticipé d’un jour en 304 ans, elles arrivent aujourd’hui cinq jours plûtôt que dans le calendrier établi du tems du concile de Nicée ; ou ce qui revient au même, les nouvelles lunes eélestes anticipent de cinq jours celles qui résultent du nombre d’or de l’ancien calendrier ecclésiastique. Malgré ces difficultés l’Eglise anglicane a conservé l’ancienne méthode de calculer les nouvelles lunes par les nombres d’or, tels qu’ils ont été reçûs dans le calendrier du tems du concile de Nicée ; ces nouvelles lunes ainsi calculées se nomment ecclésiastiques, pour les distinguer des véritables ; & la table générale & perpétuelle dont on se sert dans la Liturgie en Angleterre, a été calculée pour le tems de pâques par le moyen de ces nombres d’or, selon les différentes lettres dominicales.

On ne doit pas négliger d’avertir que la premiere année de l’ere chrétienne répondoit au nombre 2 du cycle lunaire, c’est-à-dire que le cycle lunaire a dû commencer sa période l’année qui a précédé immédiatement la naissance de Jesus-Christ. C’est pourquoi si à une année courante quelconque on ajoûte 1, & qu’on divise la somme par 19, en négligeant