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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 6.djvu/658

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les Anglois), est la féve des anciens. On trouvera cette question traitée dans Tragus, Dodonée, J. Bauhin, C. Hoffinan, Melchior Sebizius, &c. Ce qui est certain, c’est que la féve des anciens étoit petite & ronde, comme on le peut voir dans plusieurs endroits de Théophraste, de Droscoride, & autres. D’un autre côté, on a bien de la peine à croire qu’un légume qui étoit si commun, & que l’on employoit tous les jours, ne soit plus en usage à présent, ou qu’il ait changé de nom, & que le boona ait pris sa place & son nom, sans que personne s’en soit apperçu ; car ce boona nous est donné d’un consentement unanime pour la feve, & le mot faba des Latins, répond au κύαμος des Grecs ; ce changement de nom n’est cependant pas sans exemples.

Les feves vertes contiennent un sel essentiel ammoniacal, tellement mêlé de soufre, de terre, & de flegme, qu’il en résulte un mucilage ; mais lorsqu’elles sont mûres, un peu gardées & desséchées, il se fait une certaine fermentation intérieure, qui dissout ce mucilage, & qui développe de plus en plus les principes. Les sels acides, par un nouveau mélange avec le soufre & la terre, se changent en des sels urineux volatils, ou en alkalis fixes : c’est pourquoi on trouve une plus grande quantité de ces sels volatils dans les feves mûres, & elles ne donnent presqu’aucun sel acide dans la distillation. Ces remarques sont de M. Geoffroy.

Pour ce qui regarde la nature & les vertus de la feve, voyez Feve de jardin, (Matiere médic. & Diete.) Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

Feve de Jardin, (Mat. méd. & Diete.) nous faisons beaucoup plus d’usage aujourd’hui de la feve de jardin ou marais, dans nos cuisines, que dans nos boutiques : on les mange vertes & fraîches dans les meilleures tables, après les avoir fait cuire avec des herbes aromatiques, la sarriette, par exemple, & les autres assaisonnemens ordinaires ; entieres, lorsqu’elles sont tendres ; & écorcées, lorsqu’elles commencent à durcir en mûrissant ; lorsqu’elles sont seches, on en fait de la purée : en général on en mange peu de séchées à Paris. Mais il y a certaines provinces où elles sont une nourriture fort ordinaire : sur mer les matelots en font un usage journalier. L’opinion commune est que nos feves sont venteuses & difficiles à digérer : mais en général on peut dire que c’est un mets fort bon pour les gens de la campagne, qui sont accoûtumés à des travaux durs, aussi-bien que pour les gens de mer ; au lieu qu’il ne convient point aux personnes délicates, ni à celles qui ne s’occupent point de travaux pénibles.

Isidore assûre que les feves ont été le premier légume dont les hommes ayent fait usage. Pline rapporte que les feves étoient de tous les légumes ceux qu’on révéroit le plus ; parce que, dit cet auteur, on avoit tenté d’en faire du pain. Il ajoûte que la farine de feves s’appelloit lomentum ; qu’on la vendoit publiquement, & que l’usage en étoit fort commun tant pour les hommes que pour les bestiaux. Il y avoit, selon le même Pline, des nations qui mêloient cette farine avec celle de froment.

Quant à l’usage médicinal, on peut dire en général que nous employons rarement les feves ; leur farine est une des quatre farines résolutives. Voy. Farines (les quatre). Riviere & Etmuler recommandent celle de feve en particulier comme un excellent discussif & résolutif, appliquée en cataplasme, dans les inflammations des testicules.

On distille quelquefois, chez les Apothicaires, les fleurs de feves, & cette eau est estimée bonne pour tenir le teint frais, & blanchir la peau : on fait avec cette eau & la farine de feve, un cataplasme très-liquide, qui, appliqué sur le visage, passe pour en ôter les taches de rousseur.

On tenoit autrefois dans les boutiques une eau distillée de gouttes de feves, & un sel fixe tiré des cendres de toute la plante ; on regardoit cette eau & ce sel comme de puissans diurétiques, & même comme des spécifiques dans la néphrétique : mais on est revenu de cette niaiserie ; on ne prépare plus cette eau, & fort rarement ce sel. (b)

Feve de Bengale, (Mat. méd.) fruit étranger, qu’on trouve souvent avec le myrobolan citrin, & qui nous vient des Indes orientales par les vaisseaux de nos compagnies. Myrobolani species à nonnullis credita, Raii Dendrol. 134. Faba Bengalensis, Angl. C’est une excroissance compacte, ridée, ronde, applatie, creusée en maniere de nombril, large d’environ un pouce, brune en-dehors, noirâtre en-dedans, d’un goût stiptique & astringent sans odeur.

Le docteur Marloë medecin anglois, est le premier, dit Samuel Dale, qui ait fait connoître & mis en usage ce remede étranger sous le nom énigmatique de feve de Bengale : c’est pourquoi quelques-uns ont cru que c’étoit le fruit de Bengale de Clusius, Exot. liv. II. ch. xxjv. d’autres, que c’est une espece de myrobolans ; d’autres enfin, que c’est la fleur du myrobolan citrin, parce qu’il se trouve souvent avec ces fruits. Mais Dale croit que c’est une excroissance qui s’est formée par la piquûre de quelque insecte, ou plûtôt que c’est le myrobolan citrin lui-même, qui blessé par cette piquûre, a pris une forme monstrueuse. On observe souvent que les prunes étant piquées par quelque insecte, perdent leur figure naturelle & deviennent creuses en-dedans sans contenir aucun osselet.

Ce fruit n’est pas d’un grand usage en France : cependant comme il est fort astringent, on peut l’employer avec utilité seul, ou joint aux myrobolans, & autres remedes de même espece, dans les diarrhées, les dyssenteries, les hémorrhagies, & tout cas où il s’agit d’incrasser modérément le sang, de resserrer les orifices des veines & artérioles, & d’adoucir les humeurs acres. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

Feve d’Égypte, (Bot. exotiq.) cette plante curieuse par sa beauté, est la nymphæa affinis malabarica, folio & fore amplo, colore candido, Hort. Mal. 11. 39. fab. 30. Breyn Nelumbo Zeylonensium. Tour. inst. 261. Nelumbo nymphæa alba indica, maxima, flore albo, fabifera, Herm. Mus. Zeyl. 66. Nymphæa indica, glandifera, indiæ paludum, gaudens foliis umbilicatis, amplis, pediculis spinosis, flore roseo, purpureo, & albo, Pluk. Almag. 267.

Ainsi nos meilleurs botanistes connoissent la feve d’Egypte pour une espece de nymphée à fleurs blanches, pourpres, & incarnates ; idée qu’Hérodote semble en avoir eue, lorsqu’il a parlé d’un lis d’eau, couleur de rose, & d’un lis blanc, qui naissent dans le Nil.

Sa fleur est peut-être la même qu’un certain poëte présenta comme une merveille à Hadrien, sous le nom de lotus antinoien, suivant le témoignage d’Athénée, liv. XV. & Plutarque l’appelle le crépuscule, par rapport à la couleur de ce beau moment du jour.

Son fruit, qui a la forme d’une coupe de ciboire, en portoit le nom chez les Grecs ; dans les bas-reliefs, sur les médailles, & sur les pierres gravées, il sert souvent de siége à un enfant.

La tige de la feve d’Egypte a une coudée de haut ; ses feuilles sont très-larges, creusées en forme de nombril, & attachées à des pédicules hérissés de piquans. Voyez les figures de la plante entiere dans les auteurs que nous avons cités, Plucknet, Breynius, & Commelin. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

Feve de S. Ignace, (Bot. & Mat. med.) en latin faba sancti Ignatii, off. Igasur, seu nux vomica legi-