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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 8.djvu/130

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ment qu’extérieurement, c’est-à-dire sous forme de ptisane, d’aposeme, de bouillon, de julep, de clystere, de cataplasme, de fomentation, de vaporation, différemment employés selon les différentes indications. L’application des sangsues peut aussi être mise en usage avec succès ; mais seulement lorsque la douleur est bien diminuée, pour en prévenir le retour, en dégorgeant les vaisseaux, s’ils ne sont pas disposés à s’ouvrir d’eux-mêmes ; ainsi lorsque cette disposition manque habituellement, & qu’il ne se forme pas de flux hémorrhoïdal spontané, comme il ne peut paroître dans ce cas que des tumeurs hémorrhoïdales, qui ne peuvent produire que des effets fâcheux lorsqu’elles sont sujettes à devenir douloureuses, on doit s’appliquer à en empêcher la cause, en évitant qu’il ne se forme de pléthore, ou au moins à détourner lorsqu’elle est formée, les efforts que la nature est portée à faire pour la dissiper par la voie des vaisseaux hémorrhoïdaux, ou pour y déposer l’excédent de la masse du sang. Voyez Pléthore.

On propose dans tous les ouvrages de pratique, une infinité de remedes comme spécifiques, pour la guérison ou pour le soulagement des hémorrhoïdes douloureuses ; mais de ce qu’on varie si fort sur ceux auxquels on doit attribuer cette qualité, qui ne peut convenir qu’à un très-petit nombre, sinon à un seul, pour avoir égard aux différentes circonstances ; il s’ensuit qu’elle n’est reconnue dans aucun, que l’expérience & même le raisonnement, puisse faire regarder comme un vrai spécifique. Voyez Remede, Spécifique.

Au reste, pour le détail des remedes & médicamens indiqués dans les différens états des hémorrhoïdes, il faut consulter les auteurs célebres qui ont recueilli ce qui a été proposé de mieux par les anciens, & qui y ont ajouté ce qu’une expérience éclairée a pu leur apprendre à cet égard ; tels sont entr’autres, Pison, Sennert, Riviere, Ethmuller, Baglivi, Hoffman, & le Trésor de Pratique de Burnet, qui réunit un grand nombre de curations faites par différens médecins de réputation : pour les observations, Forestus, Baillou, le Sepulchretum anatomicum de Bonnet, &c. pour la théorie en général, Sthaal, qui en a traité ex professo d’une maniere particuliere, avec des observations intéressantes ; Neuter, la dissertation de Santorinus sur ce sujet, Hoffman déja cité, &c. & pour la partie chirurgicale, les institutions d’Heister, &c.

HÉMORRHOIDES, sub. fém. pl. terme de Chirurgie. Ces gonflemens variqueux viennent de la stagnation du sang, par sa lenteur à retourner par la veine hémorrhoïdale dans les branches méséraïques, ou celles de la veine-porte. Les veines hémorrhoïdales sont plus sujettes à ces dilatations contre nature, que toutes les veines du corps, parce qu’il n’y a aucun muscle qui par son action procure ou facilite le retour du sang ; au contraire le séjour des excrémens dans le rectum, & les efforts du diaphragme & des muscles du bas-ventre pour l’expulsion des matieres stercorales, contribuent à la production des hémorrhoïdes, parce qu’ils poussent le sang vers l’anus, & le font séjourner dans les veines hémorrhoïdales qui sont forcées de s’étendre & de produire ainsi cette fâcheuse maladie.

Les différences des hémorrhoïdes sont assez sensibles ; les auteurs les ont nommées uvales, verrucales, véticales, par rapport aux différentes figures qu’elles représentent. De quelque figure & de quelque grosseur qu’elles soient, on les distingue des autres excroissances qui sont situées aux environs de l’anus, en ce que celles-ci confinent moins le bord de l’anus ; que la peau seule y est affectée sans noirceur ni gonflement d’aucune veine, comme dans les hémorrhoïdes.

Les hémorrhoïdes sont sujettes à s’enflammer, elles suppurent quelquefois & causent des fistules. Voyez Fistules à l’anus. Dans des sujets mal constitués, les hémorrhoïdes dégenerent quelquefois en ulceres chancreux. Voyez Cancer.

La guérison des hémorrhoïdes a été regardée comme impossible par plusieurs auteurs ; elle est au moins très-difficile. On peut les traiter palliativement, ou tenter la guérison radicale ; pour la cure des hémorrhoïdes fluentes, voyez Flux hémorrhoidal.

La cure palliative des gonflemens hémorrhoïdaux s’obtient par les saignées, par un régime humectant & rafraîchissant. On applique extérieurement des pommades ou onguens anodins, tels que le populeum, l’onguent de linaire, de l’huile d’œufs agité dans un mortier de plomb, &c. Il n’y a point d’auteur qui ne rapporte une quantité de formules extérieures qui peuvent convenir dans ce cas. Lorsque les douleurs sont violentes, on peut appliquer sur la partie un cataplasme anodin, ou des compresses trempées dans une décoction de plantes émollientes : le demi bain avec cette décoction, ou le lait, ou un bouillon fait avec les tripes de mouton, est fort bon, de même que la vapeur de ces fomentations reçûe sur une chaise de commodité. Après les anodins on passe quelquefois, dans le cas d’extrèmes douleurs, à l’application des stupéfians ou narcotiques.

Les purgatifs augmentent la douleur que causent les hémorrhoïdes ; il faut être circonspect sur leur administration ; la décoction de casse ou sa pulpe, sont ceux qui ont le moins d’inconvéniens. Si malgré l’usage des remedes les mieux indiqués, on ne parvient point à calmer les douleurs, on se détermine à vuider ces tumeurs ou par l’application d’une sangsue, voyez Sangsue, ou par l’ouverture, au moyen d’une ponction avec la lancette.

Le malade se sent soulagé immédiatement après que les hémorrhoïdes ont été desemplies, parce qu’alors la tension cesse ; mais il reste assez souvent un écoulement continuel par ces ouvertures qui devient très-incommode, & qu’il est souvent très dangereux de supprimer.

La cure radicale consiste à emporter totalement les sacs hémorrhoïdaux ; pour pratiquer cette opération, on prépare le malade par les remedes généraux comme pour l’opération de la fistule à l’anus. Lorsque le malade a pris sa résolution, & que l’heure de l’opération est fixée, pour y procéder on fait mettre le malade couché sur le bord de son lit, le ventre en-dessous & les piés par terre : deux aides écartent les fesses tournées du côté du jour. Le chirurgien saisit alors chaque poche variqueuse avec des pincettes qu’il tient de la main gauche ; il l’emporte entierement avec des ciseaux, & observe d’en laisser une des plus petites pour conserver une issue libre au sang, & procurer par-là le flux hémorrhoïdal. L’appareil consiste à mettre de la charpie brute soutenue par des compresses & par un bandage en T, comme pour l’opération de la fistule à l’anus. Voyez Fistule à l’anus. On est souvent obligé d’en venir à cette opération, lorsque les hémorrhoïdes ne peuvent rentrer, & qu’elles commencent à noircir ; car elles tombent alors bien-tôt en gangrene, ainsi qu’un bourlet formé par la membrane interne du rectum, que le moindre effort fait sortir, & qui se gonfle, s’enflamme & se gangrene fort promptement par l’étranglement que la marge de l’anus cause au-dessus.

Les pansemens doivent être fort simples ; on applique des plumaceaux couverts de digestifs ; on emploie ensuite des lotions détersives, & ensuite des dessicatives. Il est bon que pendant le traite-