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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 8.djvu/183

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qu’ils étoient seuls propres pour la poésie héroïque. Les écrivains modernes emploient des vers de dix syllabes. Voyez Alexandrin.

Nous n’avons point en françois d’exemples de poëmes héroïques écrits en vers de dix syllabes. Le S. Louis du P. le Moine, la Pucelle de Chapelain, le Clovis de S. Didier, la Henriade de M. de Voltaire, sont en vers alexandrins. Nous n’avons que le Vert-Vert de M. Gresset qui soit en vers de dix syllabes, mais on ne le regarde pas comme un poëme héroïque : c’est un badinage ingénieux & délicat, auquel la mesure de vers que le poëte a choisie convenoit mieux que celle du vers alexandrin. Tous ceux qui connoissent notre poésie, savent que celui-ci a plus de pompe, l’autre plus d’aisance & de naïveté, & que M. Gresset ne pouvoit prendre une versification plus assortie à son sujet. (G)

Heroïque, adj. (Méd.) ce terme est employé pour désigner l’espece de traitement ou celle des remedes, dont les effets produisent des changemens considérables & prompts dans l’économie animale ; soit en excitant d’une maniere violente, des efforts, des mouvemens, des irritations extraordinaires dans les parties qui en sont susceptibles, des ébranlemens subits, des secousses fortes dans toute la machine ; soit en produisant un spasme, un resserrement ou un relâchement, une atonie outremesurée dans les solides ; soit en procurant des fontes, des évacuations d’humeurs excessives, ce semble, mais nécessaires ; dans tous les cas où la nature demande à être secourue d’une maniere pressante & décisive par des moyens propres à changer la disposition viciée des parties affectées, & à les faire passer à un état opposé d’une extrémité à une autre.

Les moyens propres à opérer ces différens effets, sont les saignées abondantes & répetées dans un court espace de tems, les médicamens purgatifs, les vomitifs, les sudorifiques & tous les évacuans les plus forts ; les stimulans, les cordiaux, les apéritifs, les fondans les plus actifs ; les âcres, les épispastiques, les astringents de toute espece, employés tant intérieurement qu’extérieurement ; les scarifications, les caustiques, les narcotiques les plus efficaces & à grande dose ; les engourdissans, les ligatures des nerfs, des gros vaisseaux, des membres, &c. les exercices violens, actifs & passifs, &c.

Tels sont les différens remedes principaux, qui peuvent servir au traitement héroïque, qui suppose toujours des maux proportionnés à l’importance des effets qu’il tend à produire, & qui exige par conséquent beaucoup de prudence, pour décider de la nécessité d’employer les moyens qui peuvent les opérer : ce qui doit être déterminé par les indications tirées du caractere de la lésion dont il s’agit, comparé avec ce que la nature & les forces peuvent supporter, sans préjugés formés d’après le tempérament du médecin, qui est plus ou moins disposé à l’action dans la pratique, à proportion qu’il est plus ou moins vif, violent, emporté ou anodin, tranquille & doux ; ou d’après l’impatience ou la crainte, & la sensibilité plus ou moins grandes du malade. Voyez Medecin.

Mais il est certain que dans tous les cas, où la nature a besoin d’être puissamment secourue pour surmonter les obstacles qui l’empêchent d’agir, ou pour faire cesser des mouvemens excessifs, qui sont occasionnés & produits méchaniquement ou physiquement par des causes qui lui sont étrangeres, & qu’il n’est pas en son pouvoir de réprimer, de corriger, d’emporter, ou pour diminuer le volume des humeurs qui l’accablent, &c. l’art de guérir seroit en défaut, & manqueroit aux occasions où il peut être le plus évidemment utile, en suppléant à l’impuissance de la nature, qui peut si souvent se passer

de secours, pour la guérison d’un grand nombre de maladies, voyez Expectation, s’il ne pouvoit ou ne savoit pas faire usage des remedes héroïques, avec lesquels la Medecine paroît opérer & opere souvent réellement des prodiges ; en détruisant les différentes causes d’un grand nombre de maladies, tant aiguës que chroniques, sur-tout de ces dernieres qui deviendroient mortelles ou resteroient incurables, si on ne les combattoit pas d’une maniere vigoureuse & par les moyens les plus propres à produire de grands effets, ou à faire cesser de grands désordres. Voyez Medecine.

Il n’est pas hors de propos de remarquer ici que c’est principalement aux médicamens héroïques que Paracelse dut sa plus grande réputation en Allemagne, où il fut le premier à faire usage de l’antimoine, du mercure, de l’opium, tandis qu’on ne connoissoit encore dans ce pays-là que la pratique douce, anodine des Arabes. Voyez Medicament, Remede.

HÉROISME, s. m. (Morale.) la grandeur d’ame est comprise dans l’héroïsme ; on n’est point un héros avec un cœur bas & rampant : mais l’héroïsme differe de la simple grandeur d’ame, en ce qu’il suppose des vertus d’éclat, qui excitent l’étonnement & l’admiration. Quoique pour vaincre ses penchans vicieux, il faille faire de généreux efforts, qui coûtent à la nature ; les faire avec succès est, si l’on veut, grandeur d’ame, mais ce n’est pas toûjours ce qu’on appelle héroïsme. Le héros, dans le sens auquel ce terme est déterminé par l’usage, est un homme ferme contre les difficultés, intrépide dans les périls, & vaillant dans les combats.

Jamais la Grece ne compta tant de héros, que dans le tems de son enfance, où elle n’étoit encore peuplée que de brigands & d’assassins. Dans un siecle plus éclairé, ils ne sont pas en si grand nombre ; les connoisseurs y regardent à deux fois avant que d’accorder ce titre ; on en dépouille Alexandre ; on le refuse au conquérant du nord, & nul prince n’y peut prétendre, s’il n’offre pour l’obtenir que des victoires & des trophées. Henri le grand en eût été lui-même indigne, si content d’avoir conquis ses états, il n’en eût pas été le défenseur & le pere.

La plûpart des héros, dit la Rochefoucaut, sont comme de certains tableaux ; pour les estimer il ne faut pas les regarder de trop près.

Mais le peuple est toûjours peuple ; & comme il n’a point d’idée de la véritable grandeur, souvent tel lui paroît un héros, qui réduit à sa juste valeur, est la honte & le fleau du genre humain.

HERON gris, sub. masc. ardea cinerea major, (Hist. nat.) oiseau aquatique qui a le col & les jambes fort longs, & qui se nourrit de poisson. Willughbi a décrit un héron femelle qui pesoit près de quatre livres, & qui avoit quatre piés huit pouces d’envergure, trois piés huit pouces de longueur depuis l’extrémité du bec jusqu’au bout des ongles, & seulement trois piés cinq pouces jusqu’au bout de la queue. La partie antérieure du sommet de la tête étoit blanche, & il y avoit sur la partie postérieure une crête formée par des plumes noires longues de quatre pouces ; le menton étoit blanc, le cou avoit des teintes de blanc, de cendré & de roussâtre, le dos étoit couvert de duvet, sur lequel s’étendoient les plumes des épaules qui avoient une couleur cendrée & de petites bandes blanches ; le milieu de la poitrine & le dessous du croupion étoient jaunâtres ; il y avoit vingt-sept grandes plumes dans chaque aîle ; les dernieres étoient cendrées, & toutes les autres avoient une couleur noirâtre, excepté les bords extérieurs de la onzieme & de la douzieme plume, qui avoient une teinte de couleur cendrée ; toute la face inférieure de l’oiseau & la queue étoient