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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 8.djvu/187

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entreprises de plus d’un million d’écus d’Allemagne. Il rend aux grandes qualités de son épouse, le témoignage le plus honorable, & cela après vingt-cinq ans de mariage ; il remercie Jesus de l’avoir formée exprès pour lui ; elle est la seule dans le monde qui lui convînt. Enfin, son heureux état conjugal le conduit à une pensée des plus singulieres & des plus consolantes sur les mariages d’ici-bas ; c’est que si chaque mari vouloit y faire réflexion, il trouveroit de même que la femme qu’il a, est precisément celle qu’il lui falloit, préférablement à toute autre.

Suivant les écrits de M. de Zinzendorf, le Hernhutisme entretenoit en 1749, jusqu’à mille ouvriers répandus par tout le monde ; ses missionnaires avoient déjà fait plus de 200 voyages de mer, & vingt-quatre nations avoient été réveillées de leur assoupissement spirituel ; on prêchoit dans sa secte en vertu d’une vocation légitime en quatorze langues à 20 mille ames au moins ; enfin la société avoit déjà 98 établissemens, entre lesquels se trouvent des châteaux à 20, 30, & 50 appartemens. Il y a sans doute de l’hyperbole dans ce détail, mais il y a beaucoup de vrai, & j’en ai été assez bien instruit dans un voyage que je fis en Hollande en 1750.

La morale des Hernhutes est entierement celle de l’Evangile ; mais en fait d’opinions dogmatiques, le Hernhutisme a ce caractere distinctif du fanatisme, de rejetter la raison & le raisonnement ; il ne demande que la foi qui est produite dans le cœur par le Saint-Esprit seul. La régénération naît d’elle-même, sans qu’il soit besoin de rien faire pour y coopérer ; dès qu’on est régénéré, on devient un être libre ; cependant c’est le Sauveur du monde qui agit toûjours dans le régénéré, & qui le guide dans toutes ses actions.

C’est aussi en Jesus-Christ que la Trinité est concentrée ; il est principalement l’objet du culte des Hernhutes ; ils lui donnent les noms les plus tendres ; Jesus est l’époux de toutes les sœurs, & leurs maris sont, à proprement parler, ses procureurs ; semblables à ces ambassadeurs d’autrefois, qui épousant une princesse au nom de leurs maîtres, mettoient dans le lit nuptial une jambe toute bottée ; un mari n’est que le chambellan de sa femme ; sa charge n’est que pour un tems, & par interim. D’un autre côté, les sœurs Hernhutes sont conduites à Jesus par le ministere de leurs maris, qu’on peut regarder comme leurs sauveurs dans ce monde ; car quand il se fait un mariage, la raison de ce mariage est qu’il y avoit une sœur qui devoit être amenée au véritable époux, par le ministere d’un tel procureur.

Voilà une peinture historique fort abregée, mais fidele, du fanatisme des Hernhutes de nos jours, gens fort estimables par leur conduite & par leurs mœurs. Nous nous sommes bien gardés de leur imputer des sentimens qu’ils n’adoptent pas, ou de tirer de leurs opinions des conséquences qu’ils rejetteroient ; nous n’avons parlé d’eux que d’après eux. Ce que nous venons d’en rapporter, est un précis laconique que nous avons fait du livre d’Isaac le Long, écrit en Hollandois, sous le titre de Merveilles de Dieu envers son Eglise, Amst. 1735, in-8°. Cet auteur êtoit grand admirateur des Hernhutes, & Hernhute lui-même. Il ne publia son livre, qu’après l’avoir communiqué à M. de Zinzendorf, auquel il le dédia, & après en avoir obtenu la permission : c’est ce seigneur qui nous l’apprend à la page 230 d’un de ses propres ouvrages, qui porte pour titre, Réflexions naturelles.

Le Hernuthisme a étonné la Hollande par ses progrès rapides, & ne l’a point allarmée ; il joüit dans les Provinces-Unies de cette tolérance universelle qu’on y accorde à toutes les sectes, & qui paroît

être le principe le plus sage & le plus judicieux du gouvernement politique. (D. J.)

HERSAGE, s. m. (Agriculture.) l’action de herser. Voyez les articles Herse & Herser.

HERSBRUCK, (Géog.) petite ville d’Allemagne en Franconie, dans le territoire de la ville de Nuremberg, près des frontieres du haut Palatinat.

HERSE, (Hist. ecclés.) ce sont dans les églises des especes de chandeliers, sur lesquels on peut répandre un grand nombre de lumieres.

Herse, s. f. (Architecture.) espece de barriere en forme de palissade à l’entrée d’un faubourg ; elle differe néanmoins de la barriere en ce que ses pieux sont pointus, pour empêcher de passer par-dessus.

Herse, s. f. en termes de Fortifications, est une espece de porte faite de plusieurs pieces de bois armées par en bas de pointes de fer, & disposées en forme de treillis, laquelle se met au-dessus d’une porte de ville. Elle y est suspendue par une corde attachée à un moulinet qui est au-dessus de la porte, lequel étant lâché, la herse s’abaisse & tombe de bout par deux coulisses qui sont entaillées dans les deux côtés de la porte. On lâche la herse quand la porte a été pétardée ou rompue. Pour éviter les surprises & l’effet du pétard, il vaut mieux se servir des orgues, parce qu’on ne les peut pas arrêter tout d’un coup comme la herse, qu’on peut empêcher de tomber en fichant quelques clous dans les coulisses, ou en mettant dessous des chevalets.

On appelle autrement la herse sarrasine ou cataracte & orgues, quand elle est faite de pieux droits sans traverses. Voyez Sarrasine, Orgues, &c.

On se sert au défaut de chevaux de frise, pour défendre une breche ou un passage, de herses ordinaires, que l’on place les pointes en haut pour incommoder la marche de l’infanterie & de la cavalerie. Voyez Cheval de frise. Chambers. (Q)

Herse de gouvernail, (Marine.) c’est la corde qui joint le gouvernail à l’étambord. (Z)

Herse, terme d’opéra, ce sont deux liteaux de bois d’environ huit pouces de large, qu’on cloue en sens différens, ensorte qu’unis ils forment un demi-quarré. On met sur la partie horisontale des especes de lampions de fer blanc faits en forme de biscuits, & auxquels on donne ce nom ; l’autre partie couvre ces lumieres, & on l’oppose au public ; ensorte que toute la lumiere frappe la partie de la décoration où l’on veut porter un plus grand jour. Il y a de grandes & de petites herses : on les multiplie sur ce théatre autant qu’on croit en avoir besoin ; on les sert à la main, & ce service fait partie de la manœuvre. Voyez Lumiere. (B)

Herse, terme de Mégissier, qui signifie un grand chassis de bois dont les bords sont percés de trous garnis de chevilles, qui sert à étendre les peaux destinées à faire le parchemin, pour pouvoir les travailler plus facilement.

Les Parcheminiers se servent aussi de la herse pour bander le sommier ou la peau du veau sur laquelle ils raturent le parchemin en croûte ou en cosse. Voyez Parchemin, & Pl. du Parcheminier.

*Herse, (Agriculture.) instrument nécessaire au labourage pour ameublir & unir les terres. C’est une espece d’assemblage de pieces de bois, en triangle tronqué & à double base, garni en dessous, sur ses côtés & ses bases, de dents de fer ou de bois. Il en faut avoir de différentes grandeurs ; les construire de bois lourd, les façonner solidement, les bien ferrer, & leur donner des dents longues & fortes. On attache, quand il en est besoin, une ou deux pierres à la herse pour lui ajouter du poids & la rendre propre à briser toutes sortes de terre. Le bœuf ou le cheval traîne la herse à laquelle il est attaché par le petit côté. Il y a des herses à roue & d’autres sans