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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 8.djvu/463

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l’art d’inventer, de dresser, tracer, planter, élever & cultiver toutes sortes de jardins, il doit outre cela connoître le caractere de toutes les plantes, pour leur donner à chacune la culture convenable.

Les différentes parties des jardins détaillées au mot Jardin, font juger qu’un jardinier ne peut guere les posseder toutes ; l’inclination, le goût l’entraîne vers celle qui lui plaît davantage : ainsi on appelle celui qui cultive les fleurs un jardinier-fleuriste, celui qui prend soin des orangers un orangiste (Daviler), des fruits un fruitier, des légumes & marais un maréchais, des simples un simpliciste (Furetiere), des pépinieres un pépineriste (la Quintinie & Daviler.)

On ne donnera point le détail des travaux d’un jardinier dans chaque mois de l’année. Il suffit de dire qu’ils doivent être continuels, qu’ils se succedent, & sont presque toûjours les mêmes. La saison de l’hiver, qui en paroît exempte, peut être utilement employée à retourner les terres usées, à les améliorer, & à faire des treillages, des casses & autres ouvrages.

JARDINIERE, s. f. (Brodeur.) petite broderie étroite & légere en fil, exécutée à l’extrémité d’une manchette de chemise ou de quelqu’autre vêtement semblable.

JARDON ou JARDE, s. m. (Maréchallerie.) tumeur calleuse & dure qui vient aux jambes de derriere du cheval, & qui est située au dehors du jarret, au lieu que l’éparvin vient en-dedans. Voyez Éparvin.

Les jardons estropient le cheval lorsqu’on n’y met pas le feu à-propos. Ce mot signifie aussi l’endroit du cheval où cette maladie vient. Soleisel.

JARETTA la, (Géog.) riviere de Sicile dans la vallée de Noto, ou pour mieux dire, ce sont diverses petites rivieres réunies dans un même lit, qui prennent le nom de la Jaretta, laquelle va se perdre dans le golfe de Catane. (D. J.)

JARGEAU ou GERGEAU, (Géog.) ancienne ville de France dans l’Orléannois sur le bord méridional de la Loire, avec un pont qui faisoit un passage important durant les guerres civiles. Le roi Charles VII. tint ses grands jours dans cette ville en 1430, & Louis XI. y maria sa fille Jeanne de France avec Pierre de Bourbon comte de Beaujeu, le 3 de Novembre 1473. Jargeau n’est pas le Gergovia de César, mais elle est connue sous le nom de Gergosilum dans le 9e siecle ; & dans le 10e, elle appartenoit à l’église d’Orléans ; aussi l’évêque d’Orléans en est encore le seigneur temporel ; elle est à 4 lieues S. E. d’Orléans, 28 S. O. de Paris. Long. 19. 45. lat. 47. 50. (D. J.)

* JARGON, s. m. (Gram.) ce mot a plusieurs acceptions. Il se dit 1°. d’un langage corrompu, tel qu’il se parle dans nos provinces. 2°. D’une langue factice, dont quelques personnes conviennent pour se parler en compagnie & n’être pas entendues. 3°. D’un certain ramage de société qui a quelquefois son agrément & sa finesse, & qui supplée à l’esprit véritable, au bon sens, au jugement, à la raison & aux connoissances dans les personnes qui ont un grand usage du monde ; celui-ci consiste dans des tours de phrase particuliers, dans un usage singulier des mots, dans l’art de relever de petites idées froides, puériles, communes, par une expression recherchée. On peut le pardonner aux femmes : il est indigne d’un homme. Plus un peuple est futile & corrompu, plus il a de jargon. Le précieux, ou cette affectation de langage si opposée à la naïveté, à la vérité, au bon goût & à la franchise dont la nation étoit infectée, & que Moliere décria en une soirée, fut une espece de jargon. On a beau corriger ce mot jargon par les épithetes de joli, d’obligeant, de délicat, d’ingénieux, il emporte toûjours avec lui

une idée de frivolité. On distingue quelquefois certaines langues anciennes qu’on regarde comme simples, unies & primitives, d’autres langues modernes qu’on regarde comme composées des premieres, par le mot de jargon. Ainsi l’on dit que l’italien, l’espagnol & le françois ne sont que des jargons latins. En ce sens, le latin ne sera qu’un jargon du grec & d’une autre langue ; & il n’y en a pas une dont on n’en pût dire autant. Ainsi cette distinction des langues en langues primitives & en jargons, est sans fondement. Voyez l’article Langue.

Jargons, s. m. (Hist. nat. Litholog.) nom que donnent quelques auteurs à un diamant jaune, moins dur que le diamant véritable. On appelle aussi jargons des crystallisations d’un rouge-jaunâtre, & qui imitent un peu les hyacinthes ; elles viennent d’Espagne & d’Auvergne.

JARIBOLOS, s. m. (Antiq.) divinité palmyrénienne, dont le nom se lit dans les inscriptions des ruines de Palmyre. Elle avoit, selon les apparences, les mêmes attributs que le dieu Lunus des Phéniciens, je veux dire une couronne sur la tête, & un croissant derriere les épaules ; car jari signifie le mois auquel la lune préside. Jaribolus n’est peut-être que Baal ou Belus. Le soleil qui tourne en différentes manieres, à cause de la difficulté d’exprimer les mots orientaux en caractères grecs, a été la principale divinité des Phéniciens & Palmyréniens ; de ce mot de baal ou belus ont été formés malakbelus, aglibolus, jaribolus, & autres semblables qu’on trouve dans les inscriptions. (D. J.)

* JARJUNA, f. m. (Bot. exotiq.) arbre qui croît dans l’île de Huaga & qui ressemble au figuier. Il porte un fruit oblong d’un palme, mou comme la figue, savonneux & vulnéraire ; on emploie sa feuille dans les luxations. Ray.

JARLOT ou RABLURE, (Marine.) c’est une entaille faire dans la quille, dans l’étrave & dans l’étambord d’un bâtiment, pour y faire entrer une partie du bordage qui couvre les membres du vaisseau. Voyez Rablure. (Q)

JARNAC, (Géog.) bourg de France dans l’Angoumois sur la Charente, à 2 lieues de Cognac, 6 N. O. d’Angoulême, 100 S. O. de Paris. Long. 17d. 22′. lat. 45. 40.

C’est à la bataille donnée sous les murs de ce lieu en 1569, que Louis de Bourbon fut tué à la fleur de son âge, & traitreusement, par Montesquiou capitaine des gardes du duc d’Anjou, qui sous le nom d’Henri III. monta depuis sur le trône ; ainsi périt (non sans soupçon des ordres secrets de ce prince) le frere du roi de Navarre pere d’Henri IV. Il réunissoit à sa grande naissance toutes les qualités du héros & les vertus du sage, sa vie n’offre qu’un mêlange d’événemens singuliers ; la faction des Lorrains l’ayant fait condamner injustement à perdre la tête, il ne dut son salut qu’au décès de François II. qui arriva dans cette conjoncture : il fut ensuite fait prisonnier à la bataille de Dreux en changeant de cheval, & conduit au duc de Guise son ennemi mortel, mais qui le reçut avec les manieres & les procédés les plus propres à adoucir son infortune ; ils mangerent le soir à la même table, & comme il ne se trouva qu’un lit, les bagages ayant été perdus ou dispersés, il coucherent ensemble, ce qui est, je pense, un fait unique dans l’histoire. Henri de Bourbon mort empoisonné à S. Jean d’Angely, ne dégénéra point du mérite de son illustre pere ; les malheurs qu’ils éprouverent l’un & l’autre dans l’espace d’une courte vie, & qui finirent par une mort prématurée, arrachent les larmes de ceux qui en lisent le récit dans M. de Thou, parce qu’on s’intéresse aux gens vertueux, & qu’on voudroit les voir