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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 8.djvu/516

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En 1560, Gonzalès Silveria est supplicié au Mono motapa, comme espion du Portugal & de sa société.

En 1578, ce qu’il y a de Jésuites dans Anvers en est banni, pour s’être refusés à la pacification de Gand.

En 1581, Campian, Skerwin & Briant sont mis à mort pour avoir conspiré contre Elisabeth d’Angleterre.

Dans le cours du regne de cette grande Reine, cinq conspirations sont tramées contre sa vie, par des Jésuites.

En 1588, on les voit animer la ligue formée en France contre Henry III.

La même année, Molina publie ses pernicieuses rêveries sur la concorde de la grace & du libre arbitre.

En 1593, Barriere est armé d’un poignard contre le meilleur des rois, par le jésuite Varade.

En 1594, les Jésuites sont chassés de France, comme complices du parricide de Jean Chatel.

En 1595, leur pere Guignard, saisi d’écrits apologétiques de l’assassinat d’Henry IV. est conduit à la greve.

En 1597, les congrégations de auxiliis se tiennent, à l’occasion de la nouveauté de leur doctrine sur la grace, & Clément VIII. leur dit : brouillons, c’est vous qui troublez toute l’Eglise.

En 1598, ils corrompent un scélérat, lui administrent son Dieu d’une main, lui présentent un poignard de l’autre, lui montrent la couronne éternelle descendant du ciel sur sa tête, l’envoyent assassiner Maurice de Nassau, & se font chasser des états de Hollande.

En 1604, la clémence du cardinal Frédéric Borromée les chasse du college de Braida, pour des crimes qui auroient dû les conduire au bucher.

En 1605, Oldecorn & Garnet, auteurs de la conspiration des poudres, sont abandonnés au supplice.

En 1606, rebelles aux decrets du sénat de Venise, on est obligé de les chasser de cette ville & de cet état.

En 1610, Ravaillac assassine Henry IV. Les Jésuites restent sous le soupçon d’avoir dirigé sa main ; & comme s’ils en étoient jaloux, & que leur dessein fût de porter la terreur dans le sein des monarques, la même année Mariana publie avec son institution du prince l’apologie du meurtre des rois.

En 1618, les Jésuites sont chassés de Boheme, comme perturbateurs du repos public, gens soulevant les sujets contre leurs magistrats, infectant les esprits de la doctrine pernicieuse de l’infaillibilité & de la puissance universelle du pape, & semant par toutes sortes de voies le feu de la discorde entre les membres de l’état.

En 1619, ils sont bannis de Moravie, pour les mêmes causes.

En 1631, leurs cabales soulevent le Japon, & la terre est trempée dans toute l’étendue de l’empire de sang idolâtre & chrétien.

En 1641, ils allument en Europe la querelle absurde du jansénisme, qui a coûté le repos & la fortune à tant d’honnêtes fanatiques.

En 1643, Malte indignée de leur dépravation & de leur rapacité, les rejette loin d’elle.

En 1646, ils font à Séville une banqueroute, qui précipite dans la misere plusieurs familles. Celle de nos jours n’est pas la premiere, comme on voit.

En 1709, leur basse jalousie détruit Port-Royal, ouvre les tombeaux des morts, disperse leurs os, & renverse les murs sacrés dont les pierres leur retombent aujourd’hui si lourdement sur la tête.

En 1713, ils appellent de Rome cette bulle Unigenitus, qui leur a servi de prétexte pour causer tant de maux, au nombre desquels on peut compter qua-

tre-vingt mille lettres de cachets décernées contre

les plus honnêtes gens de l’état, sous le plus doux des ministeres.

La même année le jésuite Jouvency, dans une histoire de la société, ose installer parmi les martyrs les assassins de nos rois ; & nos magistrats attentifs font brûler son ouvrage.

En 1723, Pierre le Grand ne trouve de sûreté pour sa personne, & de moyen de tranquilliser ses états, que dans le bannissement des Jésuites.

En 1728, Berruyer travestit en roman l’histoire de Moïse, & fait parler aux patriarches la langue de la galanterie & du libertinage.

En 1730, le scandaleux Tournemine prêche à Caën dans un temple, & devant un auditoire chrétien, qu’il est incertain que l’évangile soit Ecriture-sainte.

C’est dans ce même tems qu’Hardouin commence à infecter son ordre d’un scepticisme aussi ridicule qu’impie.

En 1731, l’autorité & l’argent dérobent aux flammes le corrupteur & sacrilege Girard.

En 1743, l’impudique Benzi suscite en Italie la secte des Mamillaires.

En 1745, Pichon prostitue les sacremens de Pénitence & d’Eucharistie, & abandonne le pain des saints à tous les chiens qui le demanderont.

En 1755, les Jésuites du Paraguay conduisent en bataille rangée les habitans de ce pays contre leurs légitimes souverains.

En 1757, un attentat parricide est commis contre Louis XV. notre monarque, & c’est par un homme qui a vécu dans les foyers de la société de Jésus, que ces peres ont protégé, qu’ils ont placé en plusieurs maisons ; & dans la même année ils publient une édition d’un de leurs auteurs classiques, où la doctrine du meurtre des rois est enseignée. C’est comme ils firent en 1610, immédiatement après l’assassinat de Henry IV. mêmes circonstances, même conduite.

En 1758, le roi de Portugal est assassiné, à la suite d’un complot formé & conduit par les Jésuites Malagrida, Mathos & Alexandre.

En 1759, toute cette troupe de religieux assassins est chassée de la domination portugaise.

En 1761, un de cette compagnie, après s’être emparé du commerce de la Martinique, menace d’une ruine totale ses correspondans. On réclame en France la justice des tribunaux contre le jésuite banqueroutier, & la société est déclarée solidaire du pere la Valette.

Elle traîne maladroitement cette affaire d’une jurisdiction à une autre. On y prend connoissance de ses constitutions ; on en reconnoît l’abus, & les suites de cet évenement amenent son extinction parmi nous.

Voilà les principales époques du Jésuitisme. Il n’y en a aucune entre lesquelles on n’en pût intercaller d’autres semblables.

Combien cette multitude de crimes connus n’en fait-elle pas présumer d’ignorés ?

Mais ce qui précede suffit pour montrer que dans un intervalle de deux cens ans, il n’y a sortes de forfaits que cette race d’hommes n’ait commis.

J’ajoute qu’il n’y a sortes de doctrines perverses qu’elle n’ait enseignées. L’Elucidarium de Posa en contient lui seul plus que n’en fourniroient cent volumes des plus distingués fanatiques. C’est-là qu’on lit entr’autre chose de la mere de Dieu, qu’elle est Dei-pater & Dei-mater, & que, quoiqu’elle n’ait été sujette à aucune excrétion naturelle, cependant elle a concouru comme homme & comme femme, secundum generalem naturæ tenorem ex parte maris & ex parte feminæ, à la production du corps de Jésus-Christ, & mille autres folies.