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ration dans les plaies ; une suppuration primitive & abondante qui opere le dégagement de la partie, & un affaissement manifeste : il l’a appellée suppuration préparante, pour la distinguer de cette suppuration louable qui n’est plus que l’excrétion du suc nourricier des parties divisées ; il appelle cette suppuration secondaire, suppuration régénérante, parce que c’est quand elle a lieu qu’on croit voir les bourgeons d’une nouvelle chair se développer pour remplir le vuide que l’affaissement seul fait disparoître. Car ce n’est jamais le fond des plaies qui s’éleve au niveau de la surface ; il est manifeste que ce sont les bords qui s’affaissent & se dépriment, & qui continuent de le faire à mesure que la suppuration opere le dégorgement des vaisseaux qui s’ouvrent dans la cavité de la plaie. C’est par l’affaissement & la dépression des solides qu’une légere goutte de suc nourricier consolide les orifices de ces vaisseaux de la circonférence au centre, successivement de proche en proche. Supposons un instant que cet affaissement cesse de continuer, supposons qu’il se fasse une régénération de chairs, ce seroit le plus grand obstacle à la cicatrisation. Ces chairs en croissant dans le fond de la plaie, feroient bailler son ouverture, & en augmenteroient les dimensions. Jamais l’extension des vaisseaux qu’on donne pour l’agent de la reproduction des chairs, ne menera au resserrement qui est de l’essence de la cicatrice, puisque sans ce resserrement il est de toute impossibilité qu’il se fasse une consolidation. Nous voyons tous les jours que par l’usage indiscret des remedes relachans & huileux dans les plaies, le tissu des chairs s’amollit, & qu’elles deviennent pâles & fongueuses ; il faut les affaisser par des remedes dessicatifs ; on panse avec de la charpie seche, souvent il faut avoir recours à des caustiques tels que la pierre infernale pour donner aux chairs engorgées la consistence nécessaire, & les mettre dans l’état de dépression qui permet la consolidation. Il est certain que la cicatrice n’avancera point si la dépression est interrompue. Que seroit-ce si les chairs augmentoient & se reproduisoient ? Les sujets bien constitués qui sur la fin de la guérison d’une plaie avec déperdition de substance, se livrent à leur appétit, & prennent une nourriture trop abondante, retardent par cette augmentation de sucs nourriciers, la formation de la cicatrice. La plaie se r’ouvre même quelquefois par le gonflement des chairs qui rompt une cicatrice tendre & mal affermie, par ce qu’il détruit manifestement l’ouvrage de la dépression.

Il y a des cas où la grande maigreur est un obstacle à la réunion des parties divisées ; ceux qui sont dans cet état doivent être nourris avec des alimens d’une facile digestion, qui refournissent la masse du sang de sucs nourriciers. Mais dans ce cas-là même on doit distinguer le rétablissement de l’embonpoint nécessaire jusqu’à un certain dégré, d’avec la prolongation végétative des vaisseaux qui opéroit la régénération d’une nouvelle substance. Comme la réunion ne peut jamais se faire que par l’affaissement des parties, c’est une raison pour qu’on n’en doive pas attendre dans les sujets exténués : il faut donc leur donner un degré d’embonpoint qui puisse permettre aux parties le mécanisme sans lequel la réunion n’auroit jamais lieu.

Le fait de pratique qui m’arrête le plus sur l’idée de la régénération, c’est la réunion d’une plaie à la tête, avec perte de tégumens qui laissent une assez grande portion du crane à découvert. On voit dans ce cas les chairs qui bourgeonnent de toute la circonférence des tégumens, & qui gagnent insensiblement sur une surface convexe qui ne se déprime point. Mais j’ai bien-tôt découvert l’erreur de mes sens. Les bourgeons charnus ne croissent pas sur la

surface de l’os ; c’est l’exfoliation de sa lame extérieure, si mince qu’on voudra la supposer, qui découvre la substance vasculeuse par laquelle l’os est organisé & au nombre des parties vivantes. Ce réseau se tuméfie un peu parce qu’il n’est plus contenu par la lame osseusse dont il étoit recouvert avant l’exfoliation de cette lame. Cette tuméfaction est légere & superficielle, & n’est qu’accidentelle & passagere ; car la cicatrice qui se forme de la circonférence au centre, ne se fait réellement que par l’affaissement & la conglutination successive de ces bourgeons vasculeux tuméfiés. S’ils ne s’affaissoient point, la cicatrice n’avanceroit pas : il est certain qu’ils se dépriment, & que la cicatrice bien faite est toujours plus basse que le niveau des chairs. La cicatrice dans le cas posé, recouvre l’os immédiatement, & y a de très-fortes adhérences, sans aucune partie intermédiaire ; cela ne peut être autrement, puisque cette cicatrice n’est elle-même que l’obturation des vaisseaux découverts par l’exfoliation, & dont les extrémités qui produisoient le pus, sont fermés par une goutte de suc nourricier épaissi. En déposant toute préoccupation, & en consultant les faits avec une raison éclairée, on connoîtra bien-tôt que dans la réunion des plaies, l’idée de leur incarnation n’est pas soutenable. (Y)

INCASSAN, (Géog.) petite contrée d’Afrique sur la côte d’or ; les Brandebourgeois y ont formé quelques habitations, mais qui ne seront pas vraissemblablement de durée. (D. J.)

INCATENATI, (Hist. littéraire.) nom d’une société littéraire établie à Vérone en Italie, qui avoit pour objet l’avancement des sciences & des connoissances humaines ; ce nom pourroit convenir à presque toutes les sociétés de gens de lettres, à qui on cherche toujours à donner des entraves, comme si on craignoit que les lumieres ne devinssent trop communes. Quoi qu’il en soit, cette société ne subsista à Vérone que jusqu’en 1543 ; elle fut alors réunie à celle des Philarmonici.

INCENDIAIRE, s. m. (Gram.) scélérat qui met le feu aux édifices des particuliers. L’incendiaire est puni des plus rigoureux supplices.

* INCENDIE, s. m. (Gram.) grand feu allumé par méchanceté ou par accident. Les villes bâties en bois sont sujettes à des incendies. Les fermes isolées dans les campagnes, sont quelquefois incendiées par des malfaiteurs. On a des seaux & des pompes publics qu’on emploie dans les incendies.

Il se prend aussi au figuré. Il ne faut quelquefois qu’un mot indiscret pour allumer un incendie dans une ame innocente & paisible. Le Dante a renfermé les héresiarques dans des tombeaux, d’où l’on voit la flamme s’échapper de toutes parts, & porter aux loin l’incendie. Cette image est belle.

Incendies, (caisse des) Hist. mod. Dans plusieurs provinces d’Allemagne on a imaginé depuis quelques années un moyen d’empêcher ou de réparer une grande partie du dommage que les incendies pouvoient causer aux particuliers qui ne sont que trop souvent ruinés de fond en comble par ces fâcheux accidents. Pour cet effet, dans chaque ville la plûpart des citoyens forment une espece d’association autorisée & protégée par le souverain, en vertu de laquelle les associés se garantissent mutuellement leurs maisons, & s’engagent de les rebâtir à frais communs lorsqu’elles ont été consumées par le feu. La maison de chaque propriétaire est estimée à sa juste valeur par des experts préposés pour cela ; la valeur est portée sur un registre qui demeure déposé à l’hôtel-de-ville où l’on expédie au propriétaire qui est entré dans l’association, un certificat dans lequel on marque le prix auquel sa maison a été évaluée ; alors le propriétaire est engagé à payer