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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 8.djvu/697

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les soies connue en Angleterre depuis vingt ans, les moulins à scier les planches, par lesquels sous l’inspection d’un seul homme, & le moyen d’un seul axe, on travaille dans une heure de vent favorable, jusqu’à quatre-vingt planches de trois toises de long ; les métiers de rubans à plusieurs navettes, ont encore mille avantages ; mais toutes ces choses sont si connues, qu’il est inutile de nous y étendre. M. Melon a dit très-bien, que faire avec un homme, par le secours des machines de l’industrie, ce qu’on feroit sans elles avec deux ou trois hommes, c’est doubler, ou tripler le nombre des citoyens.

Les occasions d’emploi pour les manufacturiers, ne connoissent de bornes que celles de la consommation ; la consommation n’en reçoit que du prix du travail. Donc la nation qui possédera la main-d’œuvre au meilleur marché, & dont les négocians se contenteront du gain le plus modéré, fera le commerce le plus lucratif, toutes circonstances égales. Tel est le pouvoir de l’industrie, lors qu’en même tems les voies du commerce intérieur & extérieur sont libres. Alors elle fait ouvrir à la consommation des marchés nouveaux, & forcer même l’entrée de ceux qui lui sont fermés.

Qu’on ne vienne plus objecter contre l’utilité des inventions de l’industrie, que toute machine qui diminue la main-d’œuvre de moitié, ôte à l’instant à la moitié des ouvriers du métier, les moyens de subsister ; que les ouvriers sans emploi deviendront plutôt des mendians à charge à l’état, que d’apprendre un autre métier ; que la consommation a des bornes ; de sorte qu’en la supposant même augmentée du double, par la ressource que nous vantons tant, elle diminuera dès que l’étranger se sera procuré des machines pareilles aux nôtres ; enfin, qu’il ne restera au pays inventeur aucun avantage de ses inventions d’industrie.

Le caractere de pareilles objections est d’être dénuées de bon sens & de lumieres ; elles ressemblent à celles que les bateliers de la Tamise alléguoient contre la construction du pont de Westminster. N’ont-ils pas trouvé ces bateliers de quoi s’occuper, tandis que la construction du pont dont il s’agit, répandoit de nouvelles commodités dans la ville de Londres ? Vaut-il pas mieux prévenir l’industrie des autres peuples à se servir de machines, que d’attendre qu’ils nous forcent à en adopter l’usage, pour nous conserver la concurrence dans les mêmes marchés ? Le profit le plus sûr sera toûjours pour la nation qui aura été la premiere industrieuse ; & toutes choses égales, la nation dont l’industrie sera la plus libre, sera la plus industrieuse.

Nous ne voulons pas néanmoins desapprouver le soin qu’on aura dans un gouvernement de préparer avec quelque prudence l’usage des machines industrieuses, capables de faire subitement un trop grand tort dans les professions qui emploient les hommes ; cependant cette prudence même n’est nécessaire que dans l’état de gêne, premier vice qu’il faut commencer par détruire. D’ailleurs, soit découragement d’invention, soit progrès dans les arts, l’industrie semble être parvenue au point, que ses gradations sont aujourd’hui très-douces, & ses secousses violentes fort peu à craindre.

Enfin, nous concluons qu’on ne sauroit trop protéger l’industrie, si l’on considere jusqu’où ses revenus peuvent se porter pour le bien commun dans tous les arts libéraux & méchaniques ; témoin les avantages qu’en retirent la Peinture, la Gravûre, la Sculpture, l’Imprimerie, l’Horlogerie, l’Orfévrerie, les manufactures en fil, en laine, en soie, en or, en argent ; en un mot, tous les métiers & toutes les professions. (D. J.)

* INDUT, s. m. (Liturg. & Rubriq.) c’est un

de ces clercs revétus d’une anbe & d’une tunique, qui assistent à la messe le diacre & le soûdiacre. Ce terme est d’usage dans l’église de Paris.

* INÉBRANLABLE, adj. (Gramm.) il se prend au physique & au moral ; qui ne peut être ébranlé. On dit ce mur est inébranlable ; les vagues frappent en vain les rochers, ils demeurent inébranlables ; cet homme est inébranlable dans ses résolutions. Cette qualité est un effet de caractere ou de réflexion : le stoïcien demeureroit inébranlable au milieu des ruines du monde : si fractus illabatur orbis, impavidum ferient ruinæ.

* INEFFABLE, adj. (Gramm.) qu’on n’entend point, dont on n’a nulle idée, dont on ne peut parler. Il se dit des attributs de Dieu, des mysteres de la Religion, des douceurs de la vie future, & de la vision béatifique. Dieu s’appelle quelquefois par emphase l’ineffable.

* INEFFAÇABLE, adj. (Gramm.) qu’on ne peut effacer ; il se dit au physique & au moral : une tache ineffaçable ; un caractere ineffaçable. Voyez Effacer.

INEFFECTIF, voyez Effectif.

INEFFICACE, voyez Efficace.

* INÉGAL, adj. (Gramm.) qui est plus grand ou plus petit qu’un autre ; il se dit au physique & au moral, des choses & des personnes.

Ces grandeurs sont inégales ; ce chemin est inégal, c’est-à-dire qu’il n’est pas plein & uni ; ils se sont battus à forces inégales.

Il est d’un caractere inégal ; le commerce des personnes inégales est très-incommode ; elles vous ramenent sans cesse sur vous-mêmes, & l’on se tourmente à chercher en soi le motif du changement qu’on apperçoit en elles.

INÉGALITÉ, s. f. terme fort en usage dans l’Astronomie pour designer plusieurs irrégularités qu’on observe dans le mouvement des planetes.

On verra dans l’article Optique, en quoi consiste l’inégalité optique du mouvement des planetes ; inégalité qu’on nomme ainsi pour la distinguer de l’inégalité réelle, le mouvement des planetes n’étant point uniforme. On trouvera aux articles Lunes, Syzygies, Quadratures, &c. les différentes inégalités du mouvement de la lune.

Le mot inégalité est principalement d’usage en parlant des mouvemens des satellites de Jupiter. On y distingue deux inégalités principales ; la premiere, qu’on a remarquée dans le mouvement des satellites, ou ce qui est la même chose, dans le retour de ces satellites à l’ombre de Jupiter, dépend de l’excentricité de l’orbite de Jupiter. Elle produit une équation tantôt additive, tantôt soustractive, dont la plus grande monte à 39′ 8″ pour le premier satellite, & pour les trois autres à 1h 18′ 35″ ; deuxh 38′ 27″  ; sixh 10′ 26″ . Cette premiere inégalité dépendante de l’excentricité, doit répondre à la plus grande équation du centre de Jupiter, laquelle étant de 5d 31′, lorsque cette planete se trouve dans les moyennes distances, il faut nécessairement que chaque satellite parcoure dans son orbe un arc de pareille grandeur, lorsqu’il s’agit de réduire les conjonctions moyennes aux véritables.

Il y a une autre inégalité, qu’on appelle seconde inégalité ; elle est la même pour tous les satellites, & elle dépend du mouvement successif de la lumiere. Ce mouvement fait que les éclipses des satellites de Jupiter paroissent arriver plus tard lorsque Jupiter est en conjonction, que lorsqu’il est en opposition avec la terre ; parce que dans la conjonction de Jupiter la lumiere des satellites a tout le diametre de l’orbe de la terre à traverser de plus que dans l’opposition. Voyez Lumiere.

Cette inégalité, lorsqu’elle est la plus grande qu’il