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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 8.djvu/809

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& une infinité d’autres, d’après l’habitude où il est de se prendre pour la mesure & le terme de tout, & de louer ou blâmer les causes & les effets, selon qu’ils lui sont favorables ou contraires.

Si l’ordre des choses est nécessaire, il n’est ni mal ni bien ; & il est nécessaire, s’il est ou d’après les qualités essentielles des choses, ou d’après les desseins d’un être immuable, parfait, & un en tout.

Intempérie, (Pathologie.) ce mot signifie dans la doctrine des Galénistes un excès dans quelqu’une des qualités premieres du corps animal ; savoir, la chaleur, la froideur, la sécheresse, & l’humidité. Voyez Qualités (Medecine.)

L’intempérie est simple ou composée, générale ou particuliere, avec matiere ou sans matiere.

L’intempérie simple est l’excès d’une seule qualité : on en reconnoît par conséquent autant que de qualités premieres, c’est-à-dire quatre ; une intempérie chaude, une intempérie froide, une intempérie seche, & une intempérie humide. Les modernes expriment les mêmes vices dans l’économie animale par les mots plus génériques, plus vagues, & par conséquent moins théoriques, moins arbitraires de chaleur contre nature. Voyez ces articles, Froid, Sécheresse, Humidité.

Les intempéries composées sont produites par l’excès simultané de deux qualités compatibles. On en reconnoît aussi quatre dans la même doctrine : l’intempérie chaude & seche, l’intempérie chaude & humide, l’intempérie froide & seche, l’intempérie froide & humide.

L’intempérie générale est celle qui réside également dans tout le corps ; & l’intempérie particuliere, celle qui domine dans une partie, ou même qui n’affecte absolument qu’une partie. Ainsi certaines affections contre nature du cerveau, du foie, des membres, &c. sont appellées intempéries chaudes, froides du cerveau, du foie, des membres, &c. L’intempérie générale est aussi quelquefois appellée égale, & l’intempérie particuliere, inégale.

L’intempérie avec matiere, est celle qui est accompagnée de la surabondance de quelque humeur, & qui est entretenue par cette humeur : l’intempérie sans matiere, est celle qui ne dépend d’aucune cause humorale. L’excès de chaleur dû, par exemple, à la longue application d’une chaleur extérieure, ou à un exercice violent, est une intempérie chaude sans matiere.

Le tempérament constitué par l’excès d’une ou de deux qualités premieres, differe de l’intempérie analogue ou respective, en ce que le premier excès subsiste avec la santé, ou pour mieux dire, est une espece de santé ; au lieu que le second établit un état contre nature ou de maladie. Voyez Tempérament.

Toute cette doctrine des intempéries a été abandonnée avec raison : elle ne porte que sur des notions théoriques, non seulement gratuites & frivoles, mais même très-propres à détourner la vûe du praticien de la considération des vices plus réels qui constituent la vraie essence des maladies. Voyez Qualités & Maladies, Medecine. (b)

Intempérie de l’Air, (Medecine.) on se sert quelquefois de ce mot dans le langage ordinaire de la Medecine, pour désigner un vice quelconque de l’atmosphere considéré comme cause de maladie. Voyez l’article Air, page 233. colonne 1. & suiv. & l’art. Atmosphere, pag. 820. colonne 1. & suiv. (b)

INTENDANT, s. m. (Hist. mod.) homme préposé à l’inspection, à la conduite, & à la direction de quelques affaires qui forment son district.

Il y en a en France de plusieurs sortes. Voyez les articles suivans.

Intendans & Commissaires départis pour S. M. dans les provinces & généralités du royaume ; ce sont des magistrats que le roi envoie dans les différentes parties de son royaume, pour y veiller à tout ce qui peut intéresser l’administration de la justice, de la police, & de la finance ; leur objet est, en général, le maintien du bon ordre dans les provinces qui forment leur département, ou ce qu’on appelle généralités, & l’exécution des commissions dont ils sont chargés par S. M. ou par son conseil. C’est de-là qu’ils ont le titre d’intendans de justice, police, & finance, & commissaires départis dans les généralités du royaume, pour l’exécution des ordres de S. M.

Ce qu’on appelle généralités, est la division qui a été faite de toutes les provinces du royaume, en 31 départemens, qui forment autant d’intendances, & n’ont aucuns rapports avec la division du royaume en gouvernemens ou en parlemens. Outre ces 31 intendances, il y en a encore six dans les colonies françoises.

L’intendant fait le plus ordinairement son séjour dans la ville principale de son département ; mais il fait au-moins une fois l’année, une tournée dans les villes & autres lieux de ce département, qui est aussi divisé en élections, ou autres siéges qui connoissent des impositions. M. Colbert avoit réglé qu’ils feroient deux tournées par an ; l’une dans toute la généralité, l’autre dans une des élections, dont ils rendroient compte en détail au contrôleur général ; en sorte qu’au bout d’un certain nombre d’années, ils prenoient une connoissance détaillée, & rendoient compte de chaque élection, & par conséquent de toutes les villes, villages, & autres lieux qui composoient leur généralité.

Les intendans sont presque toûjours choisis parmi les maîtres des requêtes ; copendant il y a eu quelquefois des officiers des cours qui ont rempli cette fonction, comme actuellement les intendans de Bretagne & de Roussillon ; elles ont aussi été réunies d’autres fois à des places de premier président. Actuellement les intendances d’Aix & de Roussillon, sont remplies par les premiers présidens du parlement de Provence, & du conseil supérieur de Roussillon.

Sous la premiere & la seconde race, le roi envoyoit dans les provinces des commissaires appellés missi dominici, ou missi regales, avec un pouvoir fort étendu, pour réformer tous les abus qui pouvoient se glisser, soit dans l’administration de la justice & de la police, soit dans celle des finances.

On en envoyoit souvent deux ensemble dans chaque province ; par exemple Fardulphus & Stephanus faisoient la fonction d’intendans de Paris en 802, sous le regne de Charlemagne. Cet usage fut conservé par les rois successeurs de Charlemagne pendant plusieurs siecles ; ils continuerent d’envoyer dans chaque province deux intendans ; & dans les cas extraordinaires, on envoyoit un plus grand nombre de commissaires.

Une ordonnance de Charlemagne de 812 porte, que les commissaires qui sont envoyés par le roi dans les provinces, pour en corriger les abus, tiendront les audiences avec les comtes, en hiver, au mois de Janvier ; au printems, en Avril ; en été, au mois de Juillet ; & en automne, au mois d’Octobre.

Louis-le-Débonnaire ordonna en 819, que les commissaires par lui envoyés dans les provinces, ne feroient pas de long séjour, ni aucune assemblée dans les lieux où ils trouveroient que la justice seroit bien administrée par les comtes.

Ce même prince en 829 enjoignit à ces commissaires d’avertir les comtes & le peuple que S. M. donneroit audience un jour toutes les semaines, pour entendre & juger les causes de ses sujets, dont les commissaires ou les comtes n’auroient voulu faire