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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 9.djvu/282

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& de la statue de pierre qu’on lui érigea sur le mont Laphistius en Béotie. Voyez Laphistius. (D. J.)

LAPHISTIUS MONS, (Géog. anc.) montagne de Grece en Béotie : Pausanias, l. V. c. xxxiv. en parle ainsi. « Il y a vingt stades, c’est-à-dire deux milles & demi, de Coronée au mont Laphistius, & à l’aire de Jupiter Laphistien ; la statue du dieu est de pierre. Lorsque Athamas étoit sur le point d’immoler Hellé & Phrixus en cet endroit, on dit que Jupiter fit paroître tout-à-coup un bélier à toison d’or, sur lequel ces deux enfans monterent, & se sauverent. Plus haut est l’Hercule nommé Charops, c’est-à-dire aux yeux bleus. Les Béotiens prétendent qu’Hercule monta par-là, lorsqu’il traînoit Cerbère, le chien de Pluton. A l’endroit par où l’on descend le mont Laphistius, pour aller à la chapelle de Minerve Itonienne, est le Phalare, qui se dégorge dans le lac de Céphise ; au-delà du mont Laphistius, est Orchomene, ville célebre, &c. (D. J.)»

LAPHRIENNE, Laphria, (Littér.) surnom que les anciens habitans d’Aroé, ville du Péloponnèse, donnerent à Diane, après l’expiation du crime de Ménalippe & de Cométho, qui avoient prophané le temple de cette déesse par leurs impudiques amours. Ils lui érigerent pour lors une statue d’or & d’ivoire, qu’ils gardoient précieusement dans leur citadelle ; ensuite lorsqu’Auguste eut soumis cette ville à l’empire romain, & qu’elle eut pris le nom de Patras, Colonia Augusta, Aræ Patrensis, ses habitans rebâtirent un nouveau temple à Diane Laphrienne, & établirent en son honneur une fête dont Pausanias nous a décrit les cérémonies dans son voyage de Grece. (D. J.)

LAPHYRE, Laphyra, (Littér.) surnom de Minerve, tiré du mot grec λάφυρα, dépouilles, butin ; parce que comme déesse de la guerre, elle faisoit faire du butin ; elle faisoit remporter des dépouilles sur les ennemis aux troupes qu’elle favorisoit. (D. J.)

LAPIDAIRE, s. f. (Arts méchaniq.) ouvrier qui taille les pierres précieuses. Voyez Diamant & Pierre précieuse.

L’art de tailler les pierres précieuses est très ancien, mais son origine a été très-imparfaite. Les François sont ceux qui y ont réussi le mieux, & les Lapidaires ou Orfevres de Paris, qui forment un corps depuis l’an 1290, ont porté l’art de tailler les diamans, qu’on appelle brillans, à sa plus haute perfection.

On se sert de différentes machines pour tailler les pierres précieuses, selon la nature de la pierre qu’on veut tailler. Le diamant, qui est extrêmement dur, se taille & se façonne sur un rouet d’un acier doux, qu’on fait tourner au moyen d’une espece de moulin, & avec de la poudre de diamant qui trempe dans de l’huile d’olive ; cette méthode sert aussi bien à le polir, qu’à le tailler. Voyez Diamant.

Les rubis orientaux, les saphirs & les topases se taillent & se forment sur un rouet de cuivre qu’on arrose avec de la poudre de diamant & de l’huile d’olive. Leur poliment se fait sur une autre roue de cuivre, avec du tripoli détrempé dans de l’eau. Voyez Rubis.

Les émeraudes, les jacynthes, les amétistes, les grenats, les agathes, & les autres pierres moins précieuses, moins dures, on les taille sur une roue de plomb, imbibée de poudre d’émeril détrempée avec de l’eau : on les polit ensuite sur une roue d’étain avec le tripoli.

La turquoise de vieille & de nouvelle roche, le lapis, le girasol & l’opale se taillent & se polissent sur une roue de bois avec le tripoli.

Maniere de graver sur les pierres précieuses & les crystaux. La gravure sur les pierres précieuses, tant

en creux que de relief, est fort ancienne, & l’on voit plusieurs ouvrages de l’une & de l’autre espece, où l’on peut admirer la science des anciens sculpteurs, soit dans la beauté du dessein, soit dans l’excellence du travail.

Quoiqu’ils ayent gravé presque toutes les pierres précieuses, les figures les plus achevées que nous voyons sont cependant sur des onices ou des cornalines, parce que ces pierres sont plus propres que les autres à ce genre de travail, étant plus fermes, plus égales, & se gravent nettement ; d’ailleurs on rencontre dans les onices différentes couleurs disposées par lits les unes au-dessus des autres, au moyen de quoi on peut faire dans les pieces de relief que le fond reste d’une couleur & les figures d’une autre, ainsi qu’on le voit dans plusieurs beaux ouvrages que l’on travaille à la roue & avec de l’émeril, de la poudre de diamant & les outils, dont on parlera ci-dessous.

A l’égard de ceux-ci qui sont gravés en creux, ils sont d’autant plus difficiles, qu’on y travaille comme à tâtons & dans l’obscurité, puisqu’il est nécessaire pour juger de ce qu’on fait, d’en faire à tous momens des épreuves avec des empreintes de pâte ou de cire. Cet art, qui s’étoit perdu comme les autres, ne commença à reparoître que sous le pontificat du pape Martin V. c’est-à-dire au commencement du quinzieme siecle. Un des premiers qui se mit à graver sur les pierres, fut un Florentin, nommé Jean, & surnommé delle Corgnivole, à cause qu’il travailloit ordinairement sur ces sortes de pierres. Il en vint d’autres ensuite qui graverent sur toutes sortes de pierres précieuses, comme fit un Dominique, surnommé de Camai, milanois, qui grava sur un rubis balais le portrait de Louis dit le Maure, duc de Milan. Quelques autres représenterent ensuite de plus grands sujets sur des pierres fines & des crystaux.

Pour graver sur les pierres & les crystaux, l’on se sert du diamant ou de l’émeril. Le diamant, qui est la plus parfaite & la plus dure de toutes les pierres précieuses, ne se peut tailler que par lui-même, & avec sa propre matiere. On commence par mastiquer deux diamans bruts au bout de deux bâtons assez gros pour pouvoir les tenir fermes dans la main, & les frotter l’un contre l’autre, ce que l’on nomme égriser, ce qui sert à leur donner la forme & la figure que l’on desire.

En frottant & égrisant ainsi les deux pierres brutes, il en sort de la poudre que l’on reçoit dans une espece de boëte, que l’on nomme gresoir ou égrisoir ; & c’est de cette même poudre dont on se sert après pour polir & tailler les diamans, ce que l’on fait avec un moulin qui fait tourner une roue de fer doux. On pose sur cette roue une tenaille aussi de fer, à laquelle se rapporte une coquille de cuivre. Le diamant est soudé dans la coquille avec de la soudure d’étain ; & afin que la tenaille appuie plus fortement sur la roue, on la charge d’une grosse plaque de plomb. On arrose la roue sur laquelle le diamant est posé, avec de la poudre sortie du diamant, & délayée avec de l’huile d’olive. Lorsqu’on veut le tailler à facettes, on le change de facette en facette à mesure qu’il se finit, & jusqu’à ce qu’il soit dans sa derniere perfection.

Lorsqu’on veut scier un diamant en deux ou plusieurs morceaux, on prend de la poudre de diamant bien broyée dans un mortier d’acier avec un pilon de même métal : on la délaye avec de l’eau, du vinaigre, ou autre chose que l’on met sur le diamant, à mesure qu’on le coupe avec un fil de fer ou de laiton, aussi délié qu’un cheveu. Il y a aussi des diamans que l’on fend, suivant leur fil, avec des outils propres pour cet effet.