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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 9.djvu/67

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ce furent les assiégeans ou les assiégés qui y mirent le feu.

Vespasien le releva de fond en comble l’année qui suivit la mort de Vitellius, en l’élevant plus haut que les deux autres ne l’avoient été. On peut voir dans le IV. livre de l’histoire de Tacite le détail de toutes les cérémonies qu’on mit en usage à cette occasion : on marqua cet événement par des médailles greques au nom de l’empereur, avec l’effigie de Jupiter Capitolin, & une nouvelle époque d’années. Ce temple qui avoit jadis échappé à la fureur des Gaulois, dans la prise de Rome, & où tant de peuple s’assembloit tous les jours, passoit pour renfermer les destins de l’empire.

Mais à peine Vespasien fut décédé que le feu consuma pour la quatrieme fois & le Capitole & ce temple qu’il avoit bâti onze ans auparavant. Domitien le réédifia sans délai dès la premiere année de son regne, l’an 81 de J. C. avec une dépense incroyable ; aussi mit-il son nom à cet ouvrage, sans faire mention des premiers fondateurs.

La seule dorure coûta plus de douze mille talens, c’est-à-dire plus de sept millions d’or. Les colonnes de marbre pentélique dont il le décora, avoient été tirées d’Athènes toutes taillées, & d’une longueur admirablement proportionnée à leur grosseur ; mais on voulut les retailler & les repolir à Rome, & l’on gâta leur grace & leur symétrie : jamais Rome n’eut la gloire de pouvoir disputer l’empire des beaux Arts à la Grece ; voyez le mot Grecs, si vous voulez en être convaincu. (D. J.)

Jupiter Lapis, (Mythol.) Les premiers Romains adoroient Jupiter sous ce nom de lapis, pierre, comme les Grecs sous celui de ὁμόριος qui veut dire la même chose. C’étoit par ce nom d’ὁμόριος que se faisoient leurs sermens les plus solemnels au rapport d’Aristote, de Demosthene & de Tite-Live. Les Romains, à leur imitation, ne connurent point de serment plus sacré, que lorsqu’ils juroient par Jupiter lapis. Quid igitur censes ? jurabo per Jovem lapidem romano vetustissimo ritu, dit Apulée dans son traité de deo sacratis.

Jupiter, (Hist. nat.) nom donné par les anciens Chimistes à l’étain. voyez Etain.

JUPON, s. m. (Hist. moder.) habillement de femme semblable à la jupe, plus court seulement, & qui se porte dessous la juppe. Voyez Jupe.

On a des jupons piqués ; ces jupons sont ouattés, & on les pique pour empêcher la ouatte de tomber. La piquure forme différens desseins de goût.

On trace ces desseins par le moyen de moules. Pour cet effet on a un établi de hauteur convenable, & de deux piés de large ou environ, sur cinq à six piés de long. On le garnit de drap bien tendu & bien cloué sur les bords de l’établi. Pour dessiner un jupon, on commence par la campane ou le bas du jupon. On place le jupon sur la longueur de l’établi ; le bord d’en bas du jupon, le long du bord de l’établi opposé à celui qu’on a devant soi. Pour donner à la campane la hauteur, on a une corde qui porte un plomb de chaque bout : on place cette corde sur le jupon. On a à côté de soi deux ou trois morceaux imbibés d’eau, & couverts de blanc, ni trop clair delayé, ni délayé trop épais : on prend le moule à campane, on en frappe le côté gravé sur les morceaux de drap blanchis ; & ensuite on applique ce moule sur le jupon. Appliqué ainsi, on a un maillet dont on frappe le moule appliqué sur le jupon ; par ce moyen le moule laisse le dessein imprimé sur le jupon. On continue ainsi la campane ; la corde dirige. On passe au reste du jupon, procédant de la même maniere ; on laisse sécher. Sec, on le donne à une ouvriere qui le tend sur un métier & qui le pique : piquer, c’est

faire une couture en suivant tous les trais du dessein imprimé par le moule.

JURA, (Géog.) haute montagne qui sépare la Suisse de la Franche-Comté : les anciens l’ont nommé Jurassus, & les Allemans l’appellent Leberberg. Cette chaîne de montagnes commence un peu au-delà de Genève, où elle fait le célebre pas de l’Ecluse, ne laissant qu’un chemin étroit entre le Rhône & la montagne ; & ce chemin est fermé par une forteresse qui appartient à la France ; de-là le mont Jura court du sud-ouest au nord-ouest, couvrant le pays de Vaud, celui de Neuf Châtel & le canton de Soleurre, jusqu’au Botzberg, appellé Vocatius par Tacite. (D. J.)

Jura, l’ile de (Géog.) petite île d’Ecosse, l’une des Westernes, de huit lieues de long sur deux de large ; elle abonde en pâturages, & on y pêche de bons saumons. Long. 11 deg. 12 min. 50 sec. lat. 56 deg. 15 min. 53. sec. (D. J.)

JURANDE, s. f. (Jurisprud.) est la charge ou fonction de juré d’une communauté de marchands ou artisans. Les jurandes furent établies en même tems que les arts & métiers furent mis en communauté par saint Louis : on établit dans chaque communauté des préposés, suprapositi, pour avoir l’inspection sur les autres maîtres du même état. Une ordonnance du roi Jean porte, qu’en tous les métiers & toutes les marchandises qui sont & se vendent à Paris, il y aura visiteurs, regardeurs & maîtres, qui regarderont par lesdits métiers & marchandises, les visiteront & rapporteront les défauts qu’ils trouveront aux commissaires, au prevôt de Paris ou aux auditeurs du châtelet. Dans la suite ces préposés ont été nommés jurés, parce qu’ils ont serment à justice dans les six corps des marchands, & dans quelques autres communautés, on les appelle gardes, dans d’autres, jurés-gardes.

Cette charge se donne par élection à deux ou quatre anciens, pour présider aux assemblées & avoir soin des affaires de la communauté, faire, recevoir les apprentifs & les maîtres ; & faire observer les statuts & réglemens : les jurés n’ont cependant aucune jurisdiction ; ils ne peuvent même faire aucuns procès verbaux sans être assistés d’un huissier ou d’un commissaire.

Le tems de la jurande ne dure qu’un an ou deux. (A)

JURAT, s. m. (Commerce.) nom d’une charge municipale de plusieurs villes de Guienne, entre autres de Bordeaux. Voyez Consuls, Echevins.

JURATOIRE, adj. (Jurisprud.) se dit de ce qui est accompagné du serment. La caution juratoire est une soumission que l’on fait à l’audience ou au greffe, de se représenter, ou quelques deniers ou effets, toutes fois & quantes que par justice sera ordonné. Voyez Caution & Serment. (A)

* JURÉ, s. m. (Commerce.) marchand ou artisan, élu à la pluralité des voix, pour avoir soin des affaires du corps ou de la communauté.

Le nombre des jurés n’est pour l’ordinaire que de quatre dans chaque corps ; il y a pourtant certaines communautés d’Arts & Métiers à Paris qui en ont jusqu’à six, quelques-unes cinq, & d’autres un syndic avec les quatre jurés, & quelques-unes seulement deux.

L’élection des jurés se fait tous les ans, non de tous les quatre, mais de deux seulement ; ensorte qu’ils sont en charge chacun deux années ; ce sont toujours les deux plus anciens qui doivent sortir, & quinze jours après l’élection des nouveaux jurés, ils doivent rendre compte de leur jurande.

Il y a aussi des maîtresses jurées dans les communautés qui ne sont composées que de femmes & de filles, telles que les lingeres, couturieres, &c.