Page:Dostoïevski - Le Sous-sol, 1909.djvu/308

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son assistance pour cette besogne. Jaloux de se rendre utiles de leur côté, les autres proposèrent de préparer de la tisane de framboises d’un elfet immédiat et souverain dans toutes les maladies. Mais Zimoveikine s’éleva contre cette prétention. D’après lui, rien ne valait une bonne tasse de camomille. Quant à Zénobi Prokofitch, avec son cœur excellent, il sanglotait, émettait des torrents de larmes et criait son repentir d’avoir épouvanté Sémione Ivanovitch en lui racontant toutes ces stupides histoires. Puis considérant que le malade s’était plaint de sa pauvreté et avait imploré l’aumône, il ouvrit une souscription, pour le moment bornée au petit cercle des pensionnaires. Chacun soupirait et se lamentait, et plaignait le sort misérable de Sémione Ivanovitch, sans pourtant parvenir à comprendre une pareille et aussi subite terreur. Mais à quel propos ? Encore, s’il eût occupé quelque importante situation et qu’il eût eu femme et enfants ; s’il se fût vu traîné devant un tribunal, mais il ne valait pas tripette, n’ayant pour tout bien qu’un vieux coffre avec un cadenas allemand ; il était resté pendant vingt ans couché derrière un paravent, ignorant tout du monde, de la vie et de ses peines. Et voilà tout à coup, pour une vaine et sotte plaisanterie, qu’il se mettait la tête à l’envers et s’épouvantait à cette découverte que la vie est dure… Mais ne l’est-elle pas pour tout le monde ? « S’il eût seulement pris la peine, comme le